une ile triangulaire
semblable à celle de Rhodes, qu'il appela Louise, du nom de la mère du roi de France, &
derrière laquelle s'ouvrait une baie commode; Narraganset habitée par une population
beaucoup plus blanche que toutes les autres & qui lui fit l'accueil le plus cordial. Après
avoir joui pendant quinze jours de cette gracieuse hospitalité, il reprit sa route le 6 mai,
longeant une côte qui s'élevait progressivement & se couvrait de bois touffus habités par
un peuple brun & farouche, puis une terre nue & rocheuse bordée d'un grand nombre
d'iles; jusqu'à ce qu'arrivé à 50° de latitude, ayant consommé toutes ses munitions & ses
vivres, il revint en France, & écrivit en rade de Dieppe le compte-rendu de son voyage,
qu'il adressa au roi le 8 juillet 1524.
On raconte que dans une expédition ultérieure aux mêmes parages, Verrazzano étant
descendu à terre sans assez de précaution, fut saisi par les sauvages, & servit de pâture à
un horrible festin. Avait-il immédiatement reçu de François Ier une nouvelle mission, on
ne sait. D'autres soucis étaient venus absorber les pensées du monarque, & le prisonnier
de Pavie n'eut bientôt plus le loisir de songer de long-temps à la poursuite de ses projets
d'établissement outremer.
X
L'Espagne, au contraire, triomphait, & pendant que Fernand Cortez adressait de Mexico,
le 18 octobre 1524, à l'empereur Charles-Quint, un rapport où il développait l'idée de
faire explorer à la fois la côte atlantique depuis la Floride jusqu'aux Bacalaos, & la côte
opposée sur l'Océan pacifique, pour trouver le secret de ce passage que Verrazzano était
allé découvrir; un pilote portugais au service de l'Espagne, déserteur de l'expédition de
Magellan & repoussé de celle de Loaysa, Etienne Gomes de Porto, obtenait à Séville, à la
fin de cette même année, l'autorisation d'aller explorer aussi, sur les traces de Verrazzano,
le littoral compris entre la Floride & les Bacalaos. Le comte Fernand d'Andrade, le
docteur Beltram, le riche Chistophe de Haro, lui armèrent un petit navire avec lequel il
partit de la Corogne au commencement de 1525, alla toucher à Cuba & à la pointe de la
Floride, & remontant au nord, explora particulièrement la côte comprise de 40° à 41° de
latitude, un peu en-deçà & un peu au-delà, y enleva un grand nombre d'habitants pour en
faire des esclaves, poussa ensuite sa navigation, à ce qu'on dit, jusqu'au cap Ras, & revint,
après une absence de dix mois, désarmer à la Corogne, d'où il se rendit à Tolède en
novembre, précédé de la fausse nouvelle qu'il apportait du girofle, tandis qu'il n'amenait
en réalité que des esclaves: méprise née d'un jeu de mots involontaire qui avait substitué
clavos à esclavos. Et les cosmographes espagnols donnèrent le nom de Tierra de Estévan
Gomez à la contrée qu'il avait reconnue & pillée, entre celle du licencié Luc Vasquez de
Ayllon & les pêcheries bretonnes.
XI.
Les Anglais de leur côté renouvelèrent leurs tentatives: un riche commerçant de Bristol
établi à Séville, fils de l'un des associés de Hugues Elyot dans l'armement de 1503 pour
Terre-Neuve, Robert Thorne, qui venait de prendre un intérêt matériel considérable dans
l'entreprise de Sébastien Cabot par le sud en 1526, adressait peu de temps après au roi
Henri VIII, un mémoire pour signaler à son attention l'avantage que l'Angleterre aurait
sur les Espagnols & les Portugais si elle découvrait un passage par le nord-ouest vers les
îles aux épices; & sur l'invitation du révérend Edouard Lee, envoyé de Henri VIII auprès
de Charles-Quint, il remettait à cet ambassadeur des considérations étendues &
développées, pour le même objet.
Quelle qu'ait pu être l'influence de ces écrits sur les déterminations royales, toujours est-il
que deux navires, le Samson & la Mary de Guilford, quittant la Tamise le 20 mai 1527, &
partant définitivement de Plymouth le 10 juin, sous le commandement de Jean Rut, firent
voile vers le nord jusqu'au 1er juillet, qu'ils furent assaillis dans la nuit par un violent
orage; la tempête les sépara, & fit probablement sombrer le Samson, qui ne reparut plus;
deux jours après par 53° de latitude, la Mary, drossée par les glaces redescendait vers 52°
elle aperçut la terre; elle atteignit un havre bien abrité, & s'y arrêta dix jours pour faire de
l'eau. Comme, au départ des deux navires, le rendez-vous avait été donné en cas de
séparation accidentelle, au cap de Sper de Terre-Neuve, où l'on devait s'attendre
mutuellement durant six semaines, Rut gouverna au sud pour s'y rendre, & vint mouiller
le 3 août dans la baye de Saint-Jean, où il trouva onze navires de pêche normands, un
breton & deux portugais; de là il écrivit au roi pour lui rendre compte des évènements,
pendant que le mathématicien de l'expédition, Albert de Prato, chanoine de Saint-Paul de
Londres, écrivait de son côté,
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