Vittoria Accoramboni | Page 6

Stendhal
la veuve de ne point contracter de mariage ensemble sans une permission expresse de lui ou de ses successeurs.
Gr?goire XIII vint �� mourir (au commencement de 1585), et les docteurs en droit, consult?s par le prince Paul Orsini, ayant r?pondu qu'ils estimaient que le precetto ?tait annul? par la mort de qui l'avait impos?, il r?solut d'?pouser Vittoria avant l'?lection d'un nouveau pape. Mais le mariage ne put se faire aussit��t que le prince le d?sirait, en partie parce qu'il voulait avoir le consentement des fr?res de Vittoria, et il arriva qu'Octave Accoramboni , ?v?que de Fossombrone, ne voulut jamais donner le sien, et en partie parce qu'on ne croyait pas que l'?lection du successeur de Gr?goire XIII d�Ct avoir lieu aussi promptement. Le fait est que le mariage ne se fit que le jour m?me que fut cr?? pape le cardinal Montalto, si int?ress? dans cette affaire, c'est-��-dire le 24 avril 1585, soit que ce f�Ct l'effet du hasard, soit que le prince f�Ct bien aise de montrer qu'il ne craignait pas plus la corte sous le nouveau pape qu'il n'avait fait sous Gr?goire XIII.
Ce mariage offensa profond?ment l'?me de Sixte Quint (car tel fut le nom choisi par le cardinal Montalto); il avait d?j�� quitt? les fa?ons de penser convenables �� un moine, et mont? son ?me �� la hauteur du grade dans lequel Dieu venait de le placer.
Le pape ne donna pourtant aucun signe de col?re; seulement, le prince Orsini s'?tant pr?sent? ce m?me jour avec la foule des seigneurs romains pour lui baiser le pied, et avec l'intention secr?te de t?cher de lire, dans les traits du Saint-P?re, ce qu'il avait �� attendre ou �� craindre de cet homme jusque-l�� si peu connu, il s'aper?ut qu'il n'?tait plus temps de plaisanter. Le nouveau pape ayant regard? le prince d'une fa?on singuli?re, et n'ayant pas r?pondu un seul mot au compliment qu'il lui adressa, celui-ci prit la r?solution de d?couvrir sur-le-champ quelles ?taient les intentions de Sa Saintet? �� son ?gard.
Par le moyen de Ferdinand, cardinal de M?dicis (fr?re de sa premi?re femme), et de l'ambassadeur catholique, il demanda et obtint du pape une audience dans sa chambre: l�� il adressa �� Sa Saintet? un discours ?tudi?, et, sans faire mention des choses pass?es, il se r?jouit avec elle �� l'occasion de sa nouvelle dignit?, et lui offrit, comme un tr?s fid?le vassal et serviteur, tout son avoir et toutes ses forces.
Le pape* l'?couta avec un s?rieux extraordinaire, et �� la fin lui r?pondit que personne ne d?sirait plus que lui que la vie et les actions de Paolo Giordano Orsini fussent �� l'avenir dignes du sang Orsini et d'un vrai chevalier chr?tien; que, quant �� ce qu'il avait ?t? par le pass? envers le Saint-Si?ge et envers la personne de lui, pape, personne ne pouvait le lui dire mieux que sa propre conscience; que pourtant, lui, prince, pouvait ?tre assur? d'une chose, �� savoir, que tout ainsi qu'il lui pardonnait volontiers ce qu'il avait pu faire contre F?lix Peretti et contre F?lix, cardinal Montalto, jamais il ne lui pardonnerait ce qu'�� l'avenir il pourrait faire contre le pape Sixte; qu'en cons?quence il l'engageait �� aller sur-le-champ expulser de sa maison et de ses Etats tous les brigands (exil?s) et les malfaiteurs auxquels, jusqu'au pr?sent moment, il avait donn? asile. * Sixte Quint, pape en 1585, �� soixante-huit ans, r?gna cinq ans et quatre mois: il a des rapports frappants avec Napol?on.
Sixte Quint avait une efficacit? singuli?re, de quelque ton qu'il voul�Ct se servir en parlant; mais, quand il ?tait irrit? et mena?ant, on e�Ct dit que ses yeux lan?aient la foudre. Ce qu'il y a de certain, c'est que le prince Paul Orsini, accoutum? de tout temps �� ?tre craint des papes, fut port? �� penser si s?rieusement �� ses affaires par cette fa?on de parler du pape, telle qu'il n'avait rien entendu de semblable pendant l'espace de treize ans, qu'�� peine sorti du palais de Sa Saintet? il courut chez le cardinal de M?dicis lui raconter ce qui venait de se passer. Puis il r?solut, par le conseil du cardinal, de cong?dier, sans le moindre d?lai, tous ces hommes repris de justice auxquels il donnait asile dans son palais et dans ses Etats, et il songea au plus vite �� trouver quelque pr?texte honn?te pour sortir imm?diatement des pays soumis au pouvoir de ce pontife si r?solu.
Il faut savoir que le prince Paul Orsini ?tait devenu d'une grosseur extraordinaire; ses jambes ?taient plus grosses que le corps d'un homme ordinaire, et une de ces jambes ?normes ?tait afflig?e du mal nomm? la lupa (la louve), ainsi appel? parce qu'il faut la nourrir avec une grande abondance de viande fra?che qu'on applique sur la partie affect?e; autrement l'humeur violente, ne trouvant pas de chair morte ��
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