Une Page dAmour | Page 4

Emile Zola
fixe, son corps se renversa en arri��re, les membres ��tendus et raidis. Elle ��tait tr��s rouge. Tout d'un coup elle bl��mit, d'une paleur livide, et les convulsions se d��clar��rent.
--Ne la lachez pas, reprit le docteur. Prenez-lui l'autre main.
Il courut au gu��ridon, sur lequel, en entrant, il avait pos�� une petite pharmacie. Il revint avec un flacon, qu'il fit respirer �� l'enfant. Mais ce fut comme un terrible coup de fouet, Jeanne donna une telle secousse, qu'elle ��chappa des mains de sa m��re.
--Non, non, pas d'��ther! cria celle-ci, avertie par l'odeur. L'��ther la rend folle.
Tous deux suffirent �� peine �� la maintenir. Elle avait de violentes contractions, soulev��e sur les talons et sur la nuque, comme pli��e en deux. Puis, elle retombait, elle s'agitait dans un balancement qui la jetait aux deux bords du lit. Ses poings ��taient serr��s, le pouce fl��chi vers la paume; par moments, elle les ouvrait, et, les doigts ��cart��s, elle cherchait �� saisir des objets dans le vide pour les tordre. Elle rencontra le chale de sa m��re, elle s'y cramponna. Mais ce qui surtout torturait celle-ci, c'��tait, comme elle le disait, de ne plus reconna?tre sa fille. Son pauvre ange, au visage si doux, avait les traits renvers��s, les yeux perdus dans leurs orbites, montrant leur nacre bleuatre.
--Faites quelque chose, je vous en supplie, murmura-t-elle. Je ne me sens plus la force, monsieur. Elle venait de se rappeler que la fille d'une de ses voisines, �� Marseille, ��tait morte ��touff��e dans une crise semblable. Peut-��tre le m��decin la trompait-il pour l'��pargner. Elle croyait, �� chaque seconde, recevoir au visage le dernier souffle de Jeanne, dont la respiration entrecoup��e s'arr��tait. Alors, navr��e, boulevers��e de piti�� et de terreur, elle pleura. Ses larmes tombaient sur la nudit�� innocente de l'enfant, qui avait rejet�� les couvertures.
La docteur cependant, de ses longs doigts souples, op��rait des pressions l��g��res au bas du col. L'intensit�� de l'acc��s diminua. Jeanne, apr��s quelques mouvements ralenti, resta inerte. Elle ��tait retomb��e au milieu du lit, le corps allong��, les bras ��tendus, la t��te soutenue par l'oreiller et pench��e sur la poitrine. On aurait dit un Christ enfant. H��l��ne se courba et la baisa longuement au front.
--Est-ce fini? dit-elle �� demi-voix. Croyez-vous �� d'autres acc��s?
Il fit un geste ��vasif. Puis, il r��pondit:
--En tous cas, les autres seront moins violents.
Il avait demand�� �� Rosalie un verre et une carafe. Il emplit le verre �� moiti��, prit deux nouveaux flacons, compta des gouttes, et, avec l'aide d'H��l��ne, qui soulevait la t��te de l'enfant, il introduisit entre les dents serr��es une cuiller��e de cette potion. La lampe br?lait tr��s-haute, avec sa flamme blanche, ��clairant le d��sordre de la chambre, o�� les meubles ��taient culbut��s. Les v��tements qu'H��l��ne jetait sur le dossier d'un fauteuil en se couchant, avaient gliss�� �� terre et barraient le tapis. Le docteur, ayant march�� sur un corset, le ramassa pour ne plus le rencontrer sous ses pieds. Une odeur de verveine montait du lit d��fait et de ces linges ��pars. C'��tait toute l'intimit�� d'une femme violemment ��tal��e. Le docteur alla lui-m��me chercher la cuvette, trempa un linge, l'appliqua sur les tempes de Jeanne.
--Madame, vous allez prendre froid, dit Rosalie qui grelottait. On pourrait peut-��tre fermer la fen��tre.... L'air est trop vif.
--Non, non, cria H��l��ne, laissez la fen��tre ouverte.... N'est-ce pas, monsieur?
De petits souffles de vent entraient, soulevant les rideaux. Ella ne les sentait pas. Pourtant le chale ��tait compl��tement tomba de ses ��paules, d��couvrant la naissance de la gorge. Par derri��re, son chignon d��nou�� laissait pendre des m��ches folles jusqu'�� ses reins. Elle avait d��gag�� ses bras nus, pour ��tre plus prompte, oublieuse de tout, n'ayant plus que la passion de son enfant. Et, devant elle, affair��, le m��decin ne songeait pas davantage �� son veston ouvert, �� son col de chemise que Jeanne venait d'arracher.
--Soulevez-la un peu, dit-il. Non, pas ainsi.... Donnez-moi votre main.
Il lui prit la main, la posa lui-m��me sous la t��te de l'enfant, �� laquelle il voulait faire reprendra une cuiller��e de potion. Puis, il l'appela pr��s de lui. Il se servait d'elle comme d'un aide, et elle ��tait d'une ob��issance religieuse, en voyant que sa fille semblait plus calme.
--Venez.... Vous allez lui appuyer la t��te sur votre ��paule, pendant que j'��couterai.
H��l��ne fit ce qu'il ordonnait. Alors, lui, se pencha au-dessus d'elle, pour poser son oreille sur la poitrine de Jeanne. Il avait effleur�� de la joue son ��paule nue, et en ��coutant le coeur de l'enfant, il aurait pu entendre battre le coeur de la m��re. Quand il se releva, son souffle rencontra le souffle d'H��l��ne.
--Il n'y a rien de ce c?t��-l��, dit-il tranquillement, pendant qu'elle se r��jouissait. Recouchez-la, il ne faut pas la tourmenter davantage.
Mais un nouvel acc��s se produisit. Il fut beaucoup moins grave. Jeanne laissa ��chapper quelques paroles entrecoup��es. Deux autres acc��s avort��rent, �� de courts
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