l'ait improvis�� po��te ad hoc au frottement d'Aristophane, et c'est cette rare qualit��, sacr��e aux yeux de Leconte de Lisle, qui dut inspirer �� leurs deux plumes de traducteurs la confraternelle alliance demeur��e �� l'��tat de fian?ailles intellectuelles.
La part d��licate, ind��finissable, r��serv��e au sens de l'artiste dans toute traduction d'ouvrage litt��raire, ��clate en celle de M. Talbot. Excellent humaniste, pour atteindre �� l'exactitude esth��tique, il lui a fallu plus que la connaissance approfondie de la langue grecque. La lutte partielle et trop in��gale que j'ai tent��e dans ma jeunesse avec un antique et formidable athl��te suffit pour me permettre d'appr��cier, en connaissance de cause, le m��rite d'art qui recommande son oeuvre. J'avais, il est vrai, affaire �� un po��te latin, mais, au point de vue o�� je me place, j'ai eu �� combattre des difficult��s de m��me ordre que celles dont il a si heureusement triomph��.
Tout traducteur d��bute spontan��ment par une pr��paration mentale qui est le mot �� mot. Il s'agit pour lui d'abord de d��terminer le sens relatif de chacun des mots, c'est-��-dire l'acception dans laquelle son rapport aux autres et la nature du sujet trait�� induisent �� le prendre, et, du m��me coup, de d��gager de l'arrangement syntaxique le sens litt��ral de la phrase. Le travail, jusque-l��, ne rel��ve que de la grammaire au service de l'intelligence; il ne vise que la signification purement conventionnelle (unique ou multiple) de chacun des mots et celle qui ressort de leur relation logique, sans rechercher encore la signification non conventionnelle, naturelle du texte, �� savoir tout ce qu'ajoutent �� la premi��re le mouvement de la phrase, son geste en quelque sorte, et les qualit��s acoustiques des mots qui la composent, bref sa musique, c'est-��-dire ce qui en constitue, dans la po��sie surtout, la plus intime expression. Au premier stade la traduction est donc seulement une ��bauche, la mati��re d��grossie o�� devra s'accomplir la forme achev��e, le sens complet du discours. Il va sans dire que M. Talbot, par le long exercice de sa profession m��me, excelle dans cette pr��paration initiale, oeuvre de grammairien et de lexicographe; mais il faut lui reconna?tre, en outre, un talent bien sup��rieur �� celui-l��.
Le mot �� mot, ai-je dit, n'est qu'une sorte de canevas, et il ne donne m��me pas int��gralement ce qu'il semble promettre. Il risque toujours d'��tre, en partie, inexact, si fort que soit le traducteur, car tout vocable et toute locution d'une langue ne trouvent pas n��cessairement leurs repr��sentants ad��quats dans une autre. Cette rencontre est d'autant plus rare que le g��nie et l'age des deux langues les diff��rencient davantage, comme se distinguent par l'esprit et l'anciennet�� les deux nations qui les ont ��labor��es. Ainsi la traduction litt��rale est le plus souvent d��fectueuse dans son propre domaine insuffisant d��j��, et, en outre, elle laisse hors de ses limites restreintes une lacune consid��rable �� remplir pour la compl��te interpr��tation du texte original. C'est ici que l'art entre en jeu et que M. Talbot a fait preuve d'une souplesse de plume et d'une ing��niosit�� remarquables. Combien ces qualit��s sont requises pour une pareille tache! Alors, en effet, se pose un probl��me tout nouveau. Il s'agit d'abord d'��crire en fran?ais, et, par suite, de substituer aux idiotismes, o�� s'accuse l'irr��ductible originalit�� du langage grec, des ��quivalents fran?ais aussi approximatifs que possible. Ce sont des tours de force �� accomplir. M. Talbot s'en est tir�� si habilement qu'il a su rendre ces formules par des idiotismes fran?ais, ou du moins par des trouvailles qu'il a faites dans des formules consacr��es du parler populaire. Mais ces spirituelles r��ussites ne sont pas encore ce qui importe le plus, ce qui exige le plus de sens litt��raire; le tact et le go?t y ont moins de part que l'adresse. Il y a des idiotismes d'un autre ordre qui affectent, non pas seulement tel passage du texte, mais le texte entier, parce qu'ils expriment et d��finissent le caract��re propre de l'��crivain, sa d��marche, en un mot son style, son g��nie m��me, qui suppose pour fondement celui de sa race. On ne comprend Aristophane qu'�� la condition de se faire Hell��ne, Ath��nien, enfin Aristophane lui-m��me. Pour reproduire, au degr�� sup��rieur atteint par M. Talbot, sa verve satirique, le tour et l'accent comiques de son vers, il faut ��tre capable de se les approprier, et la science n'y suffit pas. Une aptitude sp��ciale est n��cessaire qui est le caract��re m��me, le temp��rament moral du traducteur. Il doit se sentir dans le monde grec comme dans le sien, dans l'oeuvre d'Aristophane comme chez soi. Une traduction, pour ��tre bonne, ne se commande pas; c'est un t��moignage de sympathie autant qu'un hommage �� l'original. On ne peut communiquer que ce qu'on poss��de ou qu'on a pu faire sien; comment communiquera-t-on sans trace d'effort �� la phrase fran?aise la vivacit��, l'animation qui est le style m��me
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