que c'est que la chose que tu appelles religion?; mais je ne puis qu'en penser mal, puisqu'elle t'empêche de go?ter un plaisir innocent, auquel nature, la souveraine ma?tresse, nous invite tous?; de donner l'existence à un de tes semblables?; de rendre un service que le père, la mère et les enfants te demandent?; de t'acquitter envers un h?te qui t'a fait un bon accueil, et d'enrichir une nation, en l'accroissant d'un sujet de plus. Je ne sais ce que c'est que la chose que tu appelles état?; mais ton premier devoir est d'être homme et d'être reconnaissant. Je ne te propose pas de porter dans ton pays les moeurs d'Orou?; mais Orou, ton h?te et ton ami, te supplie de te prêter aux moeurs de Tahiti. Les moeurs de Tahiti sont-elles meilleures ou plus mauvaises que les v?tres?? c'est une question facile à décider. La terre où tu es né a-t-elle plus d'hommes qu'elle n'en peut nourrir?? en ce cas tes moeurs ne sont ni pires, ni meilleures que les n?tres. En peut-elle nourrir plus qu'elle n'en a?? nos moeurs sont meilleures que les tiennes. Quant à l'honnêteté que tu m'objectes, je te comprends?; j'avoue que j'ai tort?; et je t'en demande pardon. Je n'exige pas que tu nuises à ta santé?; si tu es fatigué, il faut que tu te reposes?; mais j'espère que tu ne continueras pas à nous contrister. Vois le souci que tu as répandu sur tous ces visages?: elles craignent que tu n'aies remarqué en elles quelques défauts qui leur attirent ton dédain. Mais quand cela serait, le plaisir d'honorer une de mes filles, entre ses compagnes et ses soeurs, et de faire une bonne action, ne te suffirait-il pas?? Sois généreux?!
L'AUM?NIER. Ce n'est pas cela?: elles sont toutes quatre également belles?; mais ma religion?! mais mon état?!
OROU. Elles m'appartiennent, et je te les offre. Elles sont à elles, et elles se donnent à toi. Quelle que soit la pureté de conscience que la chose religion et la chose état te prescrivent, tu peux les accepter sans scrupule. Je n'abuse point de mon autorité?; et sois s?r que je connais et que je respecte les droits des personnes.
Ici, le véridique aum?nier convient que jamais la providence ne l'avait exposé à une aussi pressante tentation. Il était jeune?; il s'agitait, il se tourmentait?; il détournait ses regards des aimables suppliantes?; il les ramenait sur elles?; il levait ses yeux et ses mains au ciel. Thia, la plus jeune, embrassait ses genoux et lui disait?: étranger, n'afflige pas mon père, n'afflige pas ma mère, ne m'afflige pas?! Honore-moi dans la cabane et parmi les miens?; élève-moi au rang de mes soeurs qui se moquent de moi. Ast? l'a?née a déjà trois enfants?; Palli, la seconde, en a deux, et Thia n'en a point?! étranger, honnête étranger, ne me rebute pas?! rends-moi mère?; fais-moi un enfant que je puisse un jour promener par la main, à c?té de moi, dans Tahiti?; qu'on voie dans neuf mois attaché à mon sein?; dont je sois fière, et qui fasse une partie de ma dot, lorsque je passerai de la cabane de mon père dans une autre. Je serai peut-être plus chanceuse avec toi qu'avec nos jeunes Tahitiens. Si tu m'accordes cette faveur, je ne t'oublierai plus?; je te bénirai toute ma vie?; j'écrirai ton nom sur mon bras et sur celui de ton fils?; nous le prononcerons sans cesse avec joie?; et lorsque tu quitteras ce rivage, mes souhaits t'accompagneront sur les mers jusqu'à ce que tu sois arrivé dans ton pays.
Le na?f aum?nier dit qu'elle lui serrait les mains, qu'elle attachait sur ses yeux des regards si expressifs et si touchants?; qu'elle pleurait?; que son père, sa mère et ses soeurs s'éloignèrent?; qu'il resta seul avec elle, et qu'en disant?: Mais ma religion, mais mon état, il se trouva le lendemain couché à c?té de cette jeune fille, qui l'accablait de caresses, et qui invitait son père, sa mère et ses soeurs, lorsqu'ils s'approchèrent de leur lit le matin, à joindre leur reconnaissance à la sienne. Asto et Palli, qui s'étaient éloignées, rentrèrent avec les mets du pays, des boissons et des fruits, elles embrassaient leur soeur et faisaient des voeux sur elle. Ils déjeunèrent tous ensemble?; ensuite Orou, demeuré seul avec l'aum?nier, lui dit?: Je vois que ma fille est contente de toi?; et je te remercie. Mais pourrais-tu m'apprendre ce que c'est que le mot religion, que tu as prononcé tant de fois, et avec tant de douleur??
L'aum?nier, après avoir rêvé un moment, répondit?: Qui est-ce qui a fait ta cabane et les ustensiles qui la meublent??
OROU. C'est moi.
L'AUMONIER. Eh bien?! nous croyons que ce monde et ce qu'il renferme est l'ouvrage d'un ouvrier.
OROU. Il a donc des pieds, des mains, une tête??
L'AUMONIER. Non.
OROU. Où fait-il sa
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