Sans-peur le corsaire | Page 8

Gabriel de la Landelle
�� la jeune fille, qui sauta l��g��rement �� cheval; lui-m��me fut aussit?t en selle. Le Galicien de la falaise, ��cuyer improvis��, se tenait pr��t �� les suivre.

V
BRANLE-BAS DE COMBAT.
La crique de Garba n'est d��fendue par aucun fort.--Soit n��gligence de la part du gouvernement espagnol, soit confiance dans les bancs de r��cifs qui en rendent l'entr��e presque inabordable, soit enfin parce qu'il n'existe aux alentours aucune place de quelque importance, elle est ouverte �� tout navire audacieux qui, comme le Lion, ose se risquer parmi les brisants.
Sans-Peur ��tait trop habile marin pour qu'une savante prudence ne temp��rat point sa t��m��rit��. Il jouait sa vie avec un sang-froid merveilleux; il n'exposait pas niaisement son navire aux probabilit��s du naufrage. Aussi, n'avait-il rien moins fallu qu'un triple int��r��t d'amiti�� reconnaissante, d'ambition et d'union conjugale, pour que le capitaine du Lion chois?t un tel abri, pendant la saison d'hiver, quand les coups de vent des A?ores mettent �� chaque instant en fureur les eaux dangereuses de ces parages.
Il avait fallu plus encore pour que l'effrayante manoeuvre de la matin��e e?t ��t�� combin��e et ex��cut��e par un tel marin.
Mais surpasser en audace Isabelle l'amazone, et cela pour lui sauver la vie, c'��tait assurer d'un coup le triple but qu'il se proposait,--non depuis quelques jours, mais depuis de longues ann��es, et surtout depuis le moment o��,--d��guis�� en simple mineur p��ruvien,--il avait revu la jeune fille passant au bras du marquis son p��re, et s'embarquant pour l'Espagne.
Et tout l'��difice de son avenir s'��croulait, s'il la laissait mis��rablement p��rir.--Il risqua tout; il r��ussit.
Le succ��s justifia sa tentative presque insens��e, qui ravit d'admiration les corsaires, en imprimant aux Galiciens du canton une terreur superstitieuse.
Il avait su ��tre plus que t��m��raire, on le prit pour un d��mon.
Il sut ��tre magnifique en semant l'or �� pleines mains.
Il fut adroit en ordonnant des pri��res �� Notre-Dame-du-Salut;--mais au demeurant, cette adresse ne f?t point hypocrite: il avait la foi d'un matelot, tout gentilhomme et tout r��publicain qu'il ��tait. Le comte L��on de Roqueforte n'��tait pas un freluquet de cour trouvant mati��re �� railleries dans les myst��res de la religion chr��tienne; le corsaire r��publicain Sans-Peur n'��tait pas un sans-culotte voulant �� la Diderot ?des boyaux du dernier pr��tre, serrer le cou du dernier roi.?
Du reste, il ��tait roi lui-m��me,--il ��tait roi, comme on le verra,--et ne souhaitait aucunement de finir par la corde, f?t-elle de boyaux.
--S'il veut qu'on prie la sainte Vierge, il n'est ni le diable de l'enfer, ni un supp?t de Satan, disaient les femmes ��merveill��es de la beaut�� virile du corsaire aux cheveux d'or.
En Galice, les montagnards ont cela de commun avec les Basques leurs voisins, qu'ils se piquent d'��tre alertes et habiles �� l'exercice du saut. Le bond du capitaine corsaire, de l'extr��mit�� d'une vergue mobile sur la pointe aigu? et glissante du roc, son agilit�� �� le gravir devaient pr��disposer en sa faveur un certain nombre de jeunes gens.
A la posada des Rois mages, il avait pay�� sans compter et lib��ralement fait l'aum?ne aux curieux attroup��s sur son passage.
Son courage, son d��vouement, sa belle mine, sa r��cente victoire, le succ��s de sa manoeuvre dans les r��cifs de la passe, et enfin sa conduite envers la fille du marquis de Garba, transformaient presque en sympathie les pr��ventions des riverains. Les plus timides voyaient �� sa ceinture une paire de pistolets ��tincelants. Les plus hostiles songeaient aux cent vingt hommes d'��quipage et aux dix-sept canons du brig, dont la pi��ce de bronze �� pivot ��tait,--au dire des bavards,--un prodige d'artillerie.
Du milieu de la foule partit un souhait qui plut �� L��on et �� Isabelle:
--Bonheur aux futurs ��poux.
--Pour boire �� leur mariage, qui sera c��l��br�� ce soir dans la chapelle du chateau! r��pondit L��on en jetant une derni��re bourse d'or �� l'h?telier des Rois mages.
Et les fianc��s partirent au galop.
* * * * *
D��j�� depuis pr��s d'une heure le Lion avait repris son mouillage sous le chateau de Garba.
Ma?tre Taillevent, perch�� sur l'aff?t de la longue pi��ce �� pivot, dirigeait les travaux du bord, surveillait la r��paration des avaries, et attendait impatiemment que son capitaine repar?t.
--Tiens! il est �� cheval! s'��cria Camuset le novice, revenu de l'infirmerie o�� les pansements ��taient enfin achev��s.
--Tu vois donc bien, failli mousse, que ?a le conna?t, les chevaux. Ah! si tu avais vu ce que j'ai vu, moi...
--Et qu'avez-vous donc vu, ma?tre Taillevent? demanda fort avidement le novice, qui eut le tort, cette fois, de se rapprocher si bien qu'une taloche magistrale le renseigna au mieux sur les dangers de l'indiscr��tion.
Un ��clat de rire bruyant fut le seul t��moignage de compassion donn�� par les matelots corsaires �� l'int��ressant Camuset.
--Ils vont comme la brise de nordet, le capitaine, la dame et un sauvage de l'endroit.
A peine en vue du brig, L��on agita son chapeau.
--Lieutenant, dit le ma?tre, ordre du capitaine de mettre toutes les embarcations �� la
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