Rob-Roy | Page 6

Sir Walter Scott
leur amitié était nécessaire à
la paix du voisinage, et leur assistance non moins désirable pendant la
guerre.
Rob-Roy Mac-Gregor Campbell (il portait ce dernier nom en
conséquence des actes du Parlement qui avaient aboli le sien) était le
plus jeune fils de Donald Mac-Gregor de Glengyle; il avait été
lieutenant-colonel (probablement au service de Jacques II), suivant
l'assertion de sa femme, fille de Campbell de Glenfalloch. Sa
qualification propre était d'Inversnaid mais il paraît qu'il avait quelques
droits à la propriété de Craig- Royston, domaine de rochers et de bois
situé à l'est du loch Lomond où ce lac magnifique se perd dans les
sombres montagnes de Glenfalloch.
L'époque de sa naissance est incertaine mais on assure qu'il joua un rôle
actif dans les scènes de guerre et de pillage qui succédèrent à la
Révolution: la tradition affirme qu'il fut le chef d'une excursion illégale
dans la paroisse de Kippen, située dans le Lennox et qui eut lieu dans
l'année 1691. Peu sanglante puisque une seule personne y perdit la vie,
les déprédations qui s'y commirent ne l'en firent pas moins désigner par
le nom du _hers'ship _ou dévastation de Kippen. L'époque de sa mort
est également inconnue mais comme on a dit qu'il a survécu à l'année

1733 et qu'il mourut fort avancé en âge, on peut supposer qu'il avait
environ vingt-cinq ans à l'époque où la dévastation de Kippen eut lieu;
ce qui mettrait sa naissance au milieu du dix- septième siècle.
Pendant les temps les plus paisibles qui succédèrent à la Révolution,
Rob-Roy, ou Red-Robert, semble avoir exercé ses talents actifs qui
n'avaient rien de médiocre comme conducteur ou marchand de bestiaux.
On peut croire qu'à cette époque aucun habitant des Basses-Terres et à
plus forte raison aucun marchand anglais ne s'avisait de conduire les
siens dans les montagnes. Ces animaux donnaient lieu à un commerce
très important et ils étaient escortés aux foires, sur les frontières des
Basses-Terres, par les montagnards armés qui se conduisaient avec
honneur et bonne foi envers leurs acheteurs du sud. Une querelle
s'élevait-elle, les habitants des frontières qui avaient l'habitude
d'approvisionner les marchés anglais trempaient leurs bonnets dans le
plus prochain ruisseau et, l'entortillant autour de leurs mains opposaient
leurs gourdins aux larges épées nues de leurs adversaires lesquels
n'avaient pas toujours la supériorité. J'ai entendu dire à des personnes
âgées qui avaient pris part à ces querelles que les montagnards y
mettaient beaucoup de circonspection, ne se servant jamais de la pointe
de leur épée, et moins encore de leurs pistolets ou de leurs poignards.
Une écorchure ou un coup à la tête étaient promptement guéris; et
comme le commerce était avantageux aux deux parties, ces légères
escarmouches n'apportaient aucune interruption à la bonne harmonie. Il
était surtout du plus haut intérêt pour les montagnards, dont les revenus
territoriaux dépendaient entièrement de la vente des bestiaux noirs (les
boeufs), et un marchand adroit et expérimenté non seulement retirait de
grands profits de ses spéculations, mais encore en procurait à ses amis
et à ses voisins.
Rob-Roy eut pendant plusieurs années beaucoup de succès dans cette
branche de commerce et en s'attirant une confiance générale il se fit
estimer dans le pays. Son importance augmenta par la mort de son père
qui lui laissa, outre la tutelle de son neveu Gregor Mac- Gregor, la
surveillance de sa propriété de Glengyle, double circonstance qui lui
donna parmi le clan l'influence que devait avoir le représentant de
Dougal Ciar. Or, une telle influence était d'autant plus grande que cette

branche des Mac-Gregors semble avoir refusé l'obéissance à
Mac-Gregor de Glencarnock, l'ancêtre du sir Evan Mac-Gregor actuel,
et prétendu avec succès à une espèce d'indépendance.
Vers la même époque Rob-Roy acquit une nouvelle importance en
achetant ou en affermant la propriété de Craig-Royston que nous avons
déjà mentionnée. Dans ces jours prospères de son existence il était en
grande faveur auprès de son plus proche et plus puissant voisin James,
premier duc de Montrose, dont il reçut beaucoup de marques d'égards.
Sa Grâce consentit à lui donner, ainsi qu'à son neveu, un droit de
propriété sur les domaines de Glengyle et d'Inversnaid, qu'ils n'avaient
jusqu'alors exploités qu'en qualité de tenanciers. Enfin le duc, dans
l'intérêt du pays et de ses propres terres, soutint notre aventurier en lui
prêtant une somme considérable afin de l'aider dans ses spéculations
relatives au commerce des bestiaux.
Malheureusement ce commerce était sujet, comme il l'est encore, à de
subites fluctuations et Rob-Roy, par suite d'une baisse soudaine et,
comme l'ajoute une tradition favorable, par la mauvaise foi d'un associé
appelé Macdonald auquel il avait imprudemment donné sa confiance et
fait de fortes avances; Rob- Roy, disons-nous, devint insolvable. Il se
cacha mais non pas les mains vides, si l'on en croit une sommation à
comparaître lancée contre lui, et qui
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