affirmait qu'il était porteur
d'environ mille livres sterling extorquées de différents seigneurs ou
gentilshommes sous prétexte de leur acheter des vaches dans les
Hautes-Terres. Cette sommation parut en juin 1712 et fut plusieurs fois
répétée. Elle fixe l'époque où Rob-Roy changea ses spéculations
commerciales pour d'autres d'une nature très différente.
Il paraît que vers ce temps il quitta sa résidence ordinaire pour
Inversnaid, à dix ou douze milles d'Écosse (le double en milles anglais)
plus loin dans les montagnes et commença cette vie aventureuse qu'il
continua jusqu'à sa mort. Le duc de Montrose qui se croyait trompé et
joué employa tous les moyens en son pouvoir pour recouvrer son
argent. Rob-Roy fut exproprié de ses terres, ses bestiaux et ses meubles
furent saisis et vendus.
On dit que cette opération fut poursuivie avec la plus grande sévérité et
que les suppôts de la loi qui ne sont pas ordinairement les personnes les
plus polies insultèrent la femme de Mac-Gregor d'une manière qui
aurait pu éveiller des sentiments de vengeance dans le coeur d'un
homme plus patient. C'était une femme d'un caractère fier et hautain et
il est assez probable qu'en voulant les troubler dans l'exercice de leurs
fonctions elle aura excité leur colère bien que, pour l'honneur de
l'humanité, on doive espérer que l'histoire qu'on rapporte est une
exagération populaire. Quoi qu'il en puisse être, la douleur extrême
qu'elle ressentit en se voyant expulsée des rives du loch Lomond se
donna carrière dans un morceau de musique pour la cornemuse, bien
connu encore aujourd'hui sous le nom de la _Complainte de Rob-Roy._
On croit que le fugitif trouva un premier asile dans Glen-Dochart, sous
la protection du comte de Breadalbane, car bien que, dans les temps les
plus reculés, cette famille eût activement concouru à détruire les
Mac-Gregors, elle donna souvent par la suite un abri à beaucoup d'entre
eux. Le duc d'Argyle était aussi un des protecteurs de Rob-Roy,
c'est-à-dire qu'il lui accordait le bois et l'eau, suivant l'expression des
montagnards, -- l'abri des forêts et l'eau des lacs d'un pays inaccessible.
Ambitieux de conserver ce qu'ils appelaient leurs _suivants _(gens
engagés à leur service militaire), les gentilshommes des Highlands ne
désiraient pas moins d'avoir à leur disposition des hommes d'un
caractère résolu, en guerre avec le monde et avec les lois, et qui
n'hésiteraient pas en temps et lieu à ravager les terres, à attaquer les
fermiers d'un ennemi féodal, sans attirer la responsabilité sur leurs
patrons. Les querelles entre les Grahames et les Campbells, pendant les
guerres civiles du dix-septième siècle, avaient porté l'empreinte de
l'inimitié la plus invétérée; la mort du grand marquis de Montrose d'un
côté, la défaite d'Inverlochy et l'affreux pillage de Lorn de l'autre
étaient des injures réciproques qui ne se pardonnent pas facilement:
Rob-Roy était donc certain de trouver un refuge dans le pays des
Campbells, d'abord parce qu'il avait pris leur nom comme lié par sa
mère à la famille de Glenfalloch et comme ennemi de la maison rivale
de Montrose. L'étendue des possessions d'Argyle et la facilité de s'y
retirer en cas de danger favorisaient singulièrement son audacieux plan
de vengeance, plan qui n'était rien moins qu'une guerre de pillage
contre le duc de Montrose, qu'il regardait comme un des auteurs de son
exclusion de la société, de la sentence de proscription prononcée contre
lui, de la saisie de ses meubles, de l'adjudication de sa terre.
Il se disposa donc à employer tous les moyens en son pouvoir pour
nuire au duc, à ses fermiers, à ses parents et à ses amis et, bien que ce
cercle fût suffisamment étendu pour un pillage actif, Rob- Roy, qui
s'était déclaré jacobite, prit la liberté d'envelopper dans sa sphère
d'opération quiconque il lui plaisait de considérer comme partisan du
gouvernement révolutionnaire ou de l'union des royaumes. Sous l'un ou
l'autre de ces prétextes, tous ses voisins des Basses-Terres qui avaient
quelque chose à perdre ou qui refusaient d'acheter sa protection par le
paiement d'un tribut annuel étaient exposés à ses attaques. [...]
Les habitudes et les opinions de ceux qui résidaient dans le voisinage
des Hautes-Terres prêtaient aussi aux desseins de Rob- Roy un grand
appui. La plupart, issus du clan de Mac-Gregor, réclamaient la
propriété de Balquhidder et autres districts des Hautes-Terres, comme
ayant fait partie autrefois des possessions de leur tribu, bien que des
lois spoliatrices en eussent assuré la propriété à d'autres familles. Les
guerres civiles du dix-septième siècle avaient familiarisé avec l'emploi
des armes ces hommes naturellement braves et exaspérés par le
souvenir de leurs souffrances. Le voisinage d'un district des
Basses-Terres, riche en comparaison du leur, les poussait presque
irrésistiblement à y faire des incursions et un assez grand nombre
d'individus appartenant à d'autres clans, habitués à mépriser le travail et
à braver le danger, se dirigèrent vers une

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