jusqu'�� Pigault-Lebrun et l'auteur des romans ��cossais, quoiqu'il conv?nt qu'il les lisait pour passer le temps; cependant, comme Pistol mangeant son poireau[14], il ne d��vorait l'histoire qu'en ex��crant la tendance de l'ouvrage qui l'occupait. Cette observation me fit reculer le franc aveu que ma vanit�� avait projet�� de faire, et j'amenai le marquis �� de nouvelles remarques sur le chateau de ses anc��tres.--Ici, me dit-il, ��tait le th��atre sur lequel mon p��re obtint plus d'une fois un ordre pour faire para?tre quelques-uns des principaux acteurs de la Com��die-Fran?aise, quand le roi et madame de Pompadour venaient l'y voir, ce qui lui arriva plus d'une fois. L��-bas, plus au centre, ��tait la salle baronniale, o�� le seigneur exer?ait sa juridiction f��odale, quand son bailli avait quelque criminel �� juger, car nous avions, comme vos anciens nobles ��cossais, le droit de haute et basse justice, fossa cum furca, comme le disent les juristes. En dessous est la chambre de la question, c'est-��-dire o�� l'on donnait la torture; et v��ritablement je suis fach�� qu'un droit si sujet �� abus ait jamais ��t�� accord�� �� personne. Mais, ajouta-t-il avec un air de dignit�� que semblait m��me augmenter le souvenir des atrocit��s que ses anc��tres avaient commises dans le souterrain dont il me montrait les soupiraux grill��s,--tel est l'effet de la superstition, que m��me encore aujourd'hui, les paysans n'osent approcher de ces cachots dans lesquels on dit que le courroux de mes a?eux commit plus d'un acte de cruaut��.
Comme nous approchions de la fen��tre, et que je montrais quelque curiosit�� de voir ce s��jour de terreur, nous entend?mes sortir des ��clats de rire de cet ab?me souterrain, et nous d��couvr?mes ais��ment qu'ils partaient d'un groupe d'enfans qui s'��taient empar��s de ce caveau abandonn��, pour y jouer �� Colin-Maillard.
Le marquis fut un peu d��concert��, et il eut recours �� sa tabati��re; mais il se remit sur-le-champ.--Ce sont les enfans de Madelon, dit-il, et ils se sont familiaris��s avec ces vo?tes qui inspirent la terreur au reste des habitans. D'ailleurs, pour vous dire la v��rit��, ces pauvres enfans sont n��s depuis l'��poque des pr��tendues lumi��res qui ont banni la superstition et la religion en m��me temps; cela me fait penser �� vous dire que c'est aujourd'hui un jour maigre. Je n'ai d'autres convives que vous et le cur�� de ma paroisse, et je ne blesserais pas volontiers ses opinions. D'ailleurs, ajouta-t-il d'un ton plus ferme et perdant toute contrainte: l'adversit�� m'a donn�� sur ce sujet d'autres id��es que celles qu'inspire la prosp��rit��; et je remercie le ciel de ne pas rougir en vous avouant que je suis les commandemens de mon ��glise.
Je me hatai de lui r��pondre que, quoiqu'ils pussent diff��rer de ceux de la mienne, j'avais tout le respect convenable pour les r��glemens religieux de chaque communion chr��tienne, sachant que nous nous adressions au m��me Dieu, ador�� d'apr��s le m��me principe de la r��demption, quoique sous des formes diff��rentes; et que, s'il avait plu au Tout-Puissant de ne pas permettre cette vari��t�� de cultes, nos devoirs nous auraient ��t�� prescrits aussi distinctement qu'ils l'��taient sous la loi de Mo?se.
Le marquis n'avait pas l'habitude de secouer la main[15], mais en cette occasion il saisit la mienne et la secoua cordialement. C'��tait peut-��tre la seule mani��re qu'un z��l�� catholique p?t ou d?t employer pour me faire sentir qu'il acquies?ait �� mes sentimens.
Ces explications, ces remarques et celles auxquelles donn��rent encore lieu les ruines ��tendues du chateau, nous occup��rent pendant deux ou trois tours que nous f?mes sur la longue terrasse, et pendant un quart d'heure que nous restames dans un petit pavillon, dont le toit en vo?te ��tait encore en assez bon ��tat, quoique le ciment f?t d��tach�� sur les c?t��s.
--C'est ici, dit-il en reprenant le ton de la premi��re partie de notre entretien, que j'aime �� venir m'asseoir �� midi pour y trouver un abri contre la chaleur, ou le soir pour voir les rayons du soleil couchant s'��teindre dans les belles eaux de la Loire. C'est ici que, comme le dit votre grand po��te, avec lequel, quoique Fran?ais, je suis plus familier que bien des Anglais, j'aime �� m'asseoir,
Montrant le code d'une imagination douce et am��re[16].
J'eus grand soin de ne pas protester contre cette variante d'un passage bien connu de Shakspeare, car je pr��sume que notre grand po��te aurait perdu quelque chose dans l'opinion d'un juge aussi d��licat que le marquis, si je lui avais prouv�� que, suivant toutes les autres autorit��s, il a ��crit:
Ruminant les pens��es d'une imagination douce et am��re[17].
D'ailleurs notre premi��re discussion litt��raire me suffisait, ��tant convaincu depuis long-temps (quoique je ne l'aie ��t�� que dix ans apr��s ��tre sorti du coll��ge d'��dimbourg) que l'art de la conversation ne consiste pas �� montrer des connaissances sup��rieures dans des objets de peu d'importance, mais �� augmenter, �� corriger, �� perfectionner ce qu'on peut savoir,
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