Quelques recherches sur le tombeau de Virgile au mont Pausilipe | Page 5

Gabriel Peignot
dont Voltaire, soit dit entre nous, remontait quelquefois les cordes, pour en rendre les accords plus parfaits.
On trouve dans le Magasin encyclop��dique, 1795, tome I, p. 271, une ��p?tre en 46 vers, adress��e �� l'abb�� Delille, par un anonyme qui, comme tant d'autres, ��tait all�� faire pr��s de Naples, sa petite r��colte au mont sacr��. Cette ��p��tre a pour titre: ?�� Virgile-Delille, en lui envoyant un morceau de laurier coup�� sur le tombeau de Virgile.? Nous allons rapporter quelques vers de cette pi��ce, parce que l'auteur y peint l'��tat actuel du monument: il parle d'abord du lieu, ainsi que de Virgile, et dit:
?Je croyais retrouver de sa gloire embellis Ces bois qu'il enchantait du nom d'Amaryllis, Tandis que sous l'ormeau, de jeunes tourterelles Y roucoulaient d'amour leurs plaintes mutuelles; Le charme a disparu; rien ne s'offre en ce lieu Qu'un triste souvenir et du temple et du dieu. De ronces, de cailloux cette terre sem��e Est par un patre obscur sans respect afferm��e. Pour y gravir l'oeil cherche un p��nible sentier; Plus d'ombrage �� l'entour, plus d'oiseaux; ce laurier Qui, fier de ses mille ans, s'��levait si superbe, Coup�� dans sa racine, est ignor�� dans l'herbe; Un mercenaire avide et prompt �� l'outrager Trafique de sa gloire et l'offre �� l'��tranger...?
Puis s'adressant �� l'abb�� Delille:
?Cet arbre t'appartient; ton nom sut m'enhardir A saisir ce d��bris pour un talent que j'aime; Je l'ai pris �� Virgile et le rends �� lui-m��me.?
Ces vers ne sont pas du premier m��rite, mais l'��-propos est bien; il est certain que personne n'��tait plus digne d'un tel pr��sent que le traducteur des G��orgiques.
M. De Chateaubriand est aussi l'un de ces curieux amateurs qui ont moissonn�� dans le champ sacr�� du Pausilipe. Sa belle lettre sur la ville ��ternelle (Rome), adress��e �� M. de Fontanes, le 10 janvier 1804, en fait foi. Elle commence ainsi: ?J'arrive de Naples, mon cher ami, et je vous porte des fruits de mon voyage sur lesquels vous avez des droits. _Tenet nunc Parthenope_ ...? L'illustre ��crivain n'en dit pas davantage.
Nous ne prolongerons pas cette liste des personnages connus, qui eux-m��mes ont parl�� de leur p��lerinage au mausol��e du grand po��te; mais combien d'autres amateurs, tant nationaux qu'��trangers, ont fait la m��me excursion, et conservent silencieusement dans leur cabinet la feuille dont ils ont d��pouill�� l'arbre sacr��!
On avouera que ces p��lerinages multipli��s presqu'autant que les feuilles du fameux laurier si souvent renouvel��, sont la plus grande preuve de l'enthousiasme qu'ont excit�� dans tous les temps et les chants m��lodieux du cygne de Mantoue et ses qualit��s personnelles. Il avait une si belle ame! non seulement on l'admire, mais on l'aime; et d��s son vivant, il avait inspir�� ces nobles sentiments �� ses contemporains, surtout aux plus illustres, entre autres, Auguste, M��c��ne, Horace, Varus, Gallus, Pollion, etc., qui le ch��rirent tendrement. Chez les Modernes comme chez les Anciens, il a ��t�� l'objet de la plus grande v��n��ration; mais quelquefois on a honor�� sa m��moire par des particularit��s assez singuli��res. Par exemple, �� Mantoue, le croira-t-on? on est all�� jusqu'�� regretter hautement et solennellement �� l'��glise que le prince des po��tes latins n'ait pas ��t�� chr��tien, et cela est consign�� dans un hymne que l'on chantait �� l'office le jour de la f��te de saint Paul. Voici ce que nous apprend �� ce sujet l'abb�� Martinelli, dans son _Discours sur l'��tat des lettres et des arts �� Mantoue_, 1775, in 4��. L'anecdote est tir��e d'un manuscrit de Jean Piccinardi de Cr��mone:
?Au XVe si��cle, dit l'auteur, on avait coutume �� Mantoue, de chanter �� la messe de saint Paul, un hymne en l'honneur de Virgile. On y supposait que l'ap?tre des nations, arrivant �� Naples, tourna ses regards vers le mont Pausilipe o�� reposent les cendres de ce grand po��te, et qu'il regretta de n'avoir pu ni le conna?tre, ni le convertir; c'est ce qu'exprime la strophe suivante tir��e de cet hymne et o�� l'on parle de saint Paul en ces termes:
Ad Maronis mausoleum Ductus, fudit super eum Pi? rorem lacrym?: Quem te, inquit, reddidissem, Si te vivum invenissem, Poctarum maxime!
On peut dire que cet hommage, quoique bizarre, prouve plus que tout autre, le cas que l'on faisait du po��te dans un si��cle tout de foi, mais o�� le go?t ��tait encore loin d'��tre ��pur��[9].
L'��pitaphe suivante, quoique bien post��rieure �� la strophe que nous venons de rapporter, peut rivaliser avec elle par son ridicule et par sa niaise simplicit��:
Cy dessous gist monsieur Virgile Fort honneste homme et fort habile; Sur sa tombe un laurier est n��; Priez Dieu pour le trespass��.
Ce rimailleur ne se bornait pas, comme saint Paul, �� d��sirer que Virgile f?t chr��tien; il le traitait comme tel.
Le cardinal Bembo [10] a r��ussi bien autrement dans l'��pitaphe qu'il a consacr��e au c��l��bre po��te Sannazar, qui est enterr�� pr��s du mausol��e de Virgile.
Cette ��pitaphe
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