dit-il. Or, plus je r��siste, plus j'accumule. Mais si je fais pipi tout de suite, je ferai peu, et mes draps auront le temps de s��cher �� la chaleur de mon corps. Je suis s?r, par exp��rience, que maman n'y verra goutte.
Poil de Carotte se soulage, referme ses yeux en toute s��curit�� et commence un bon somme.
II
Brusquement il s'��veille et ��coute son ventre. --Oh! oh! dit-il, ?a se gate!
Tout �� l'heure il se croyait quitte. C'��tait trop de veine. Il a p��ch�� par paresse hier au soir. Sa vraie punition approche.
Il s'assied sur son lit et tache de r��fl��chir. La porte est ferm��e �� clef. La fen��tre a des barreaux. Impossible de sortir.
Pourtant il se l��ve et va tater la porte et les barreaux de la fen��tre. Il rampe par terre et ses mains rament sous le lit �� la recherche d'un pot qu'il sait absent.
Il se couche et se l��ve encore. Il aime mieux remuer, marcher, tr��pigner que dormir et ses deux poings refoulent son ventre qui se dilate.
--Maman! maman! dit-il d'une voix molle, avec la crainte d'��tre entendu, car si madame Lepic surgissait, Poil de Carotte, gu��ri net, aurait l'air de se moquer d'elle. Il ne veut que pouvoir dire demain, sans mentir, qu'il appelait.
Et comment crierait-il? Toutes ses forces s'usent �� retarder le d��sastre. Bient?t une douleur supr��me met Poil de Carotte en danse. Il se cogne au mur et rebondit. Il se cogne au fer du lit. Il se cogne �� la chaise, il se cogne �� la chemin��e dont il l��ve violemment le tablier et il s'abat entre les chenets, tordu, vaincu, heureux d'un bonheur absolu.
Le noir de la chambre s'��paissit.
III
Poil de Carotte ne s'est endormi qu'au petit jour, et il fait la grasse matin��e, quand madame Lepic pousse la porte et grimace, comme si elle reniflait de travers.
--Quelle dr?le d'odeur! dit-elle.
--Bonjour, maman, dit Poil de Carotte.
Madame Lepic arrache les draps, flaire les coins de la chambre et n'est pas longue �� trouver.
--J'��tais malade et il n'y avait pas de pot, se d��p��che de dire Poil de Carotte, qui juge que c'est l�� son meilleur moyen de d��fense.
--Menteur! menteur! dit madame Lepic.
Elle se sauve, rentre avec un pot qu'elle cache et qu'elle glisse prestement sous le lit, flanque Poil de Carotte debout, ameute la famille et s'��crie:
--Qu'est-ce que j'ai donc fait au ciel pour avoir un enfant pareil?
Et tant?t elle apporte des torchons, un seau d'eau, elle inonde la chemin��e comme si elle ��teignait le feu, elle secoue la literie et elle demande de l'air! de l'air! affair��e et plaintive.
Et tant?t elle gesticule au nez de Poil de Carotte:
--Mis��rable! tu perds donc le sens! Te voil�� donc d��natur��! Tu vis donc comme les b��tes! On donnerait un pot �� une b��te, qu'elle saurait s'en servir. Et toi, tu imagines de te vautrer dans les chemin��es. Dieu m'est t��moin que tu me rends imb��cile, et que je mourrai folle, folle, folle!
Poil de Carotte, en chemise et pieds nus, regarde le pot. Cette nuit il n'y avait pas de pot, et maintenant il y a un pot, l��, au pied du lit. Ce pot vide et blanc l'aveugle, et s'il s'obstinait encore �� ne rien voir, il aurait du toupet.
Et, comme sa famille d��sol��e, les voisins goguenards qui d��filent, le facteur qui vient d'arriver, le tarabustent et le pressent de questions:
--Parole d'honneur! r��pond enfin Poil de Carotte, les yeux sur le pot, moi je ne sais plus. Arrangez vous.
Les Lapins
--Il ne reste plus de melon pour toi, dit madame Lepic; d'ailleurs, tu es comme moi, tu ne l'aimes pas.
--?a se trouve bien, se dit Poil de Carotte.
On lui impose ainsi des go?ts et des d��go?ts. En principe, il doit aimer seulement ce qu'aime sa m��re. Quand arrive le fromage:
--Je suis bien s?re, dit madame Lepic, que Poil de Carotte n'en mangera pas.
Et Poil de Carotte pense:
--Puisqu'elle en est s?re, ce n'est pas la peine d'essayer.
En outre, il sait que ce serait dangereux. Et n'a-t-il pas le temps de satisfaire ses plus bizarres caprices dans des endroits connus de lui seul? Au dessert, madame Lepic lui dit:
--Va porter ces tranches de melon �� ces lapins.
Poil de Carotte fait la commission au petit pas, en tenant l'assiette bien horizontale afin de ne rien renverser.
A son entr��e sous leur toit, les lapins, coiff��s en tapageurs, les oreilles sur l'oreille, le nez en l'air, les pattes de devant raides comme s'ils allaient jouer du tambour, s'empressent autour de lui.
--Oh! attendez, dit Poil de Carotte; un moment, s'il vous pla?t, partageons.
S'��tant assis d'abord sur un tas de crottes, de s��ne?on rong�� jusqu'�� la racine, de trognons de choux, de feuilles de mauve, il leur donne les graines de melon et boit le jus lui-m��me: c'est doux comme du vin doux.
Puis il racle avec les dents ce que sa famille a laiss�� aux
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