Peire Raimon en Italie.
Il est probable que ses premières poésies sont antérieures à 1196, mais de combien? Nous n'avons aucun moyen de fixer ce point. Diez donne comme dates de son activité poétique 1170-1200[21], mais ce sont des dates erronées; Chabaneau[22] donne les mêmes dates, mais en marquant, entre parenthèses, qu'il les emprunte à Diez. Il me semble qu'en faisant remonter les premières compositions de Peire Raimon aux environs de 1190 et en pla?ant les dernières aux environs de 1121-1222 nous ne serons pas trop éloignés de la vérité. Peire Raimon aurait pu, entre cinquante et soixante ans, revenir dans le Midi et prendre femme à Pamiers.
Peire Raimon emploie deux fois le senhal_ d'_Ereubut.?Ereubut_ se trouve dans les chansons: Enquera·m vai?recalivan_ et Non puese suffrir. D'après l'envoi de la?première, il semble que nous ayons affaire à un jongleur; mais, d'après la seconde, il semble qu'il s'agisse d'une dame; dans la première des deux chansons elle est chargée de présenter la composition du poète à la ?noble comtesse?, qui pourrait être la comtesse de Toulouse; dans la seconde pièce, c'est, au contraire, le poète qui a re?u ?des prières et une demande? de faire une chanson. Nous ne savons si ce senhal désigne une des épouses de Raimon VI ou une de celles de Raimon V.
Bartsch attribue à Peire Raimon vingt compositions; mais celle qui porte le numéro 2, dans sa liste, est une partie du numéro 9, et son numéro 11 correspond à 330, 12, et appartient à Peire Bremon. Nous la donnons en appendice.
Le ms. _a_ attribue à Peire Raimon la pièce _Mas camjat ai de far chanso_ (qui est d'Elias de Barjols; Bartsch, 132, _8_).
Deux mss., Sc, lui attribuent la pièce Ses alegratge,?qui est de Guilhem Augier (Bartsch, 205, _5_).
Le ms. _N_ lui attribue la pièce unique de Jordan de l'Isla de Venaissi (Bartsch, 276, _1_). De même _T_ lui attribue la?pièce unique de Peire Bremon lo Tort (Bartsch, 331, _1_).
Enfin le ms. _M_ lui attribue la célèbre chanson de R. de?Barbezieux, Tuit demandon qu'es devengud' Amors.
Nostredame attribue à notre troubadour la chanson _Non es savis ni gaire ben apres_, qui est donnée à P. Vidal par le ms. _c_?et à Giraut de Borneil par le ms. _P_, ainsi qu'une chanson qui aurait commencé ainsi:
_Amour, si ton poder es tal,?Ensins que cad'un ho razona_,
et qui para?t être de l'invention de Nostredame.[23]
Peire Raimon mérite une bonne place à c?té des grands noms de la poésie méridionale. Moins original que Peire Vidal, et moins varié, au moins dans l'état actuel de son oeuvre, qu' Aimeric de Pégulhan, il peut aller cependant de pair avec ses deux compatriotes. Il a, comme la plupart des troubadours, le culte de la forme et il nous laisse voir, à plusieurs reprises, quelle est sa conception de l'art poétique; mais il ne tombe pas dans un excès ridicule et puéril, comme d'autres troubadours. Il a de la grace et de l'élégance, et plus d'une fois laisse percer sa sensibilité. Ses descriptions du printemps, quoique conventionnelles, sont fra?ches et pittoresques. Son oeuvre est, dans l'ensemble, remarquable par la finesse de la pensée et la grace du style. Et c'était un vrai poète celui qui savait si bien dire comment le coeur des poètes se consume en chantant (_Atressi com la candela_) et si bien exprimer comment na?t la poésie, non des aspects les plus variés de la nature, mais de la sincérité du coeur (S'ieu fos aventuratz); par là il se rapproche de celui qui reste pour nous le ma?tre de la poésie méridionale, de Bernard de Ventadour.[24]
Notes:
[3]ABIKN(2); Chabaneau, _Hist. Gén. Lang_., X, 271.
[4] Guilhem VIII, 1172-1202.
[5] Cf. Ch. Brun, _Les troubadours à la cour des seigneurs de Montpellier_. (Extr. du _Félibrige latin_, Montpellier, 1893.)
[6] _N_(2): tolc moiller a paruias...
[7] éléonore a été nommée par les troubadours suivants: Guilhem de Berguedan, Raimon de Miraval, Cadenet, Gaubert de Puycibot, Elias de Barjols, Arnaut Catalan, Aimeric de Belenoi, Aimeric de Pegulhan; peut-être aussi est-ce éléonore qui est désignée par reina dans la pièce de Guilhem de Baux, Gr., 209, 2. Cf. sur tout ceci: F. Bergert, Die von den Trobadors gefeierten Damen, p. 26.
[8] A B N(2); les autres mss. contenant la biographie sont I_ et _K, qui proviennent de la même source. La?biographie de N(2) est publiée dans _l'Archiv. f. d. Studium d. n. Sprachen_, t. CII (1899), p. 204.
[9] ?Il para?t difficile que toutes les pièces qui portent ce nom aient été composées par la même personne.? _Hist. Gén. Lang_., X, 373, n. 2. La difficulté dispara?t, en ne faisant pas commencer trop t?t--et il n'y a aucune raison pour le faire--la carrière poétique de Peire Raimon.
[10] Trovatori d'Italia, p. 14.
[11] Vies, éd. Chabaneau-Anglade, p. 48. Le ms. _D_, dans la suscription de la chanson _Encara·m vai recalivan_, appelle Peire Raimon lo Gros_; Bertoni, _Trovatori d'Italia,
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