Poésies choisies de André Chénier | Page 7

André Chénier
l'oeuvre de Chénier une poésie nouvelle. Il y trouve même fra?cheur d'idées, même luxe d'images que dans Lamartine.
[Footnote 11: _Littérature et philosophie mêlées_, par Victor Hugo, édition ne varietur_, Hetzel-Quantin, 1882--t. i: Sur André de Chénier_ (1819); _Sur un poète apparu en 1820_--c'est-à-dire Lamartine (1820).]
On voit donc que les premiers critiques d'André Chénier reconnaissent en lui un novateur et que, même, leurs habitudes sont vivement heurtées par ses innovations.
En 1828--après une nouvelle édition[12], augmentée de quelques morceaux inédits, mais qui altère souvent le texte,--c'est encore la nouveauté de l'oeuvre que constate Villemain[13]. Chénier a 'une manière neuve de sentir et de rendre l'antiquité.' Il a fait pour la poésie ce que Bernardin de Saint-Pierre avait fait pour la prose; il lui a rendu le coloris par la simplicité.
[Footnote 12: OEUVRES POSTHUMES D'ANDRé CHéNIER, édition nouvelle publiée par D. Charles Robert, Paris, Guillaume, 1824-26, 2 volumes avec un facsimilé.]
[Footnote 13: _Tableau de la Littérature du XVIIIe siècle_, par Villemain (1828), 3e édition, Didier, 1841 (tome iv, le?ons 58, 59, 60).]
En cette même année Sainte-Beuve, dans son _Tableau de la Poésie fran?aise au XVIe siècle_[14], donne André Chénier, avec les hommes de la Pléiade: Ronsard, Du Bellay, etc., comme ancêtre aux romantiques. André Chénier ouvre une époque[15]. Il a retrempé le vers flasque du XVIIIe siècle. Son alexandrin n'est celui ni de Racine ni de Delille, mais celui de Ronsard, de Ba?f et de Régnier[16]. Sainte-Beuve se passionne pour André Chénier. Il ne cesse plus de s'occuper de lui. Après les fragments inédits donnés par H. de Latouche[17] et sa nouvelle édition[18], Sainte-Beuve lui-même publie de nouveaux fragments[19], insérés dans l'édition clichée de 1839[20]; il entreprend de corriger les éditions de H. de Latouche, se met en rapport avec Gabriel de Chénier (fils de Sauveur Chénier) et publie une importante étude sur André Chénier[21], où, examinant l'_Hermès_ et corrigeant son impression première, il prononce que celui qu'il revendiquait naguère comme un précurseur du romantisme était 'un homme aussi pleinement et chaudement de son siècle à sa manière que pouvait l'être Raynal ou Diderot.'
[Footnote 14: _Tableau de la poésie fran?aise au seizième siècle_, par Sainte-Beuve, 1828.]
[Footnote 15: _Mathurin Régnier et André Chénier_, par Sainte-Beuve (ao?t 1829), dans _Portraits Littéraires_, tome i, pp. 159-75.]
[Footnote 16: _Vie, poésies et pensées de Joseph Delorme_, par Sainte-Beuve, 1829.]
[Footnote 17: FRAGMENTS D'ANDRé CHéNIER, publiés par H. de Latouche dans la Revue de Paris, décembre 1829, mars 1830.]
[Footnote 18: ANDRé CHéNIER, POéSIES POSTHUMES ET INéDITES publiées par H. de Latouche, Paris, Charpentier et Randuel, 1833, 2 vol. _Revue des Deux Mondes_, 15 juin 1838, article de G. Planche.]
[Footnote 19: FRAGMENTS DE CHéNIER, publiés par Sainte-Beuve dans la Revue des Deux Mondes, 1er février 1839, sous le titre _Quelques documents inédits sur André Chénier_.]
[Footnote 20: POéSIES D'ANDRé, précédées d'une notice par M. Henri de Latouche, suivie de notes et fragments, etc. Nouvelle édition. Paris, Charpentier, 1839.]
[Footnote 21: _Portraits littéraires_, par Sainte-Beuve, t. i, pp. 176-208 (1er février 1839). OEUVRES EN PROSE D'ANDRé CHéNIER, _augmentées d'un grand nombre de morceaux inédits et précédées de toutes les relatives à son procès devant le tribunal révolutionnaire_... Paris, Ch. Gosselin, 1840.]
André Chénier, que l'on vient de voir revendiquer un moment comme ancêtre du romantisme, sera plus tard proclamé précurseur de l'école parnassienne. Il est donc curieux d'enregistrer l'appréciation que fit de lui en 1840 le jeune Leconte de Lisle[22]: 'La facture de son vers, la coupe de sa phrase pittoresque et énergique, ont fait de ses poèmes une oeuvre nouvelle et savante d'une mélodie entièrement ignorée, d'un éclat inattendu.'
[Footnote 22: _André Chénier_, par Leconte de Lisle, article publié dans la _Variété_, Rennes, 1840-41.
_Poésies de Fran?ois Malherbe avec un_ COMMENTAIRE _inédit par_ ANDRé CHéNIER, publiées par M. de Latour, Paris, Charpentier, 1842.]
En avan?ant dans cette revue de la critique qu'a provoquée l'oeuvre d'André Chénier, il semble qu'on s'enfonce dans un fourré d'opinions contradictoires. Voici Saint-Marc Girardin[23] pour qui rien, chez André Chénier, ne laisse prévoir le romantisme, et qui, tout en déclarant, avec une apparente contradiction, que sa poésie annonce Lamartine, lui attribue une mélancolie uniquement littéraire. Voici Nisard[24] pour qui André Chénier ne fut point de son temps et a égalé ses ma?tres antiques.
[Footnote 23: _Cours de littérature dramatique_, par Saint-Marc Girardin, Paris, Charpentier, 1843, 5 volumes in-12°(t. IV, ch. liv).]
[Footnote 24: _Histoire de la littérature fran?aise_, par D. Nisard, Paris, Firmin Didot, 1844. 4 vol. _La Vérité sur la famille de Chénier_, par L.J.G, de Chénier, Avocat, Paris, Dumaine, 1844.]
Voici un autre critique[25] qui accuse André Chénier d'avoir, en les traduisant et en les imitant, communiqué aux poètes grecs l'affectation et le faux go?t du XVIIIe siècle, prétention que combat Sainte-Beuve[26] par une analyse du poème de L'Aveugle.
[Footnote 25: _André Chénier et les poètes grecs_, par Arnould Frémy, dans la _Revue indépendante_ du 10 mai 1844.]
[Footnote 26: Portraits contemporains, par Sainte-Beuve (t. v:
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