Poésies Allemandes | Page 4

Friedrich Gottlieb Klopstock
mien l'est à l'instant
suprême. Dis-leur que ma mort a été douce, et que je m'entretenais
d'elle, que tu as entendu de ma bouche et lu dans mes yeux presque
éteints ces dernières pensées de mon coeur:
«Adieu, soeur d'un frère chéri; fille céleste, adieu! Combien je t'aime!
comme ma vie s'est écoulée dans la retraite, loin du vulgaire et toute
pleine de toi!
» Ton ami mourant te bénit; nulle bénédiction ne s'élèvera pour toi d'un
coeur aussi sincère!
» Puisse celui qui récompense, répandre autour de toi la paix de la vertu
et le bonheur de l'innocence.

» Que rien ne manque à l'heureuse destinée qu'annonçait ton visage
riant en sortant des mains du Créateurs, qui t'était encore inconnu,
lorsqu'il nous réservait à tous deux un avenir si diffé- rent... À toi les
plaisirs de la vie, et à moi les larmes.
» Mais, au milieu de toutes tes joies, compatis aux douleurs des autres
et ne désapprends pas de pleurer;
» Daigne accorder un souvenir à cet homme qui avait une âme élevée,
et qui, si souvent par une douleur silencieuse, osa t'avertir humblement
que le ciel t'avait faite pour lui.
» Bientôt emporté au pied du trône de Dieu, et tout ébloui de sa gloire,
j'étendrai mes bras suppliants, en lui adressant des voeux pour toi.
» Et alors un pressentiment de la vie future, un souffle de l'esprit divin
descendra sur toi, et t'inondera de délices...
» Tu lèveras la tête avec surprise, et tes yeux souriants se fixeront au
ciel... Oh! viens... viens m'y joindre, revêtue du voile blanc des vierges,
et couronnée de rayons divins!»
PSAUME
Les lunes roulent autour des terres, les terres autour des soleils et des
milliers de soleils autour du plus grand de tous: Notre père qui êtes aux
cieux!
Tous ces mondes qui reçoivent et donnent la lumière, sont peuplés
d'esprits plus ou moins forts, plus ou moins forts, plus ou moins grands;
mais tous croient en Dieu, tous mettent en lui leur espé- rance: Que
votre nom soit sanctifié!
C'est lui! c'est l'Éternel, seul capable de se comprendre tout entier et de
se complaire en lui-même, c'est lui qui plaça au fond du coeur de toutes
ses créatures le germe du bonheur éternel: Que votre règne arrive!
Heureuses créatures, lui seul s'est chargé d'ordonner leur présent et leur

avenir; qu'elles sont heureuses! que nous le sommes tous! Que votre
volonté soit faite sur la terre comme au ciel!
Il fait croître et grandir la tige de l'épi, il dore la pomme et le raisin
avec les rayons du soleil; il nourrit l'agneau sur la colline et dans la
forêt le chevreuil: mais il tient aussi le tonnerre, et la grêle n'épargne ni
la tige ni la branche, ni l'animal de la colline, ni celui de la forêt:
Donnez-nous
aujourd'hui notre pain quotidien!
Au-dessus du tonnerre et de la tempête, y a t il aussi des
pécheurs et
des mortels?... Là haut aussi, l'ami devient-il ennemi, la mort
sépare-t-elle ceux qui s'aiment? Pardonnez-nous nos offenses comme
nous les pardonnons à ceux qui nous ont
offensés!
On ne monte au ciel, but sublime, que par des chemins difficiles:
quelques-uns serpentent dans d'affreux déserts; mais là aussi de temps
en temps le plaisir a semé quelques fruits pour rafraîchir le voyageur...
Ne nous induisez pas en tentation, mais délivreznous du mal!
Adorons Dieu! adorons celui qui fait rouler autour du soleil d'autres
soleils, des terres et des lunes; qui a créé les esprits et préparé leur
bonheur; qui sème l'épi, commande à la mort et soulage le voyageur du
désert tout en le conduisant au but sublime. Oui, seigneur, nous vous
adorons, car à vous est l'empire,
la puissance et la gloire. Amen.
MON ERREUR
J'ai voulu long-temps les juger sur des faits et non sur des paroles, et
feuilletant les pages de l'histoire, j'y suivais attentivement les Français.
Ô toi qui venges l'humanité des peuples et des rois qui
l'outragent,
véridique histoire, tu m'avais fait quelquefois de ce peuple une peinture
bien effrayante.
Cependant je croyais, et cette pensée m'était douce comme ces rêves
dorés que l'on fait par une belle matinée, comme une espé- rance
d'amour et de délices;

Je croyais, ô liberté! mère de tous les biens, que tu serais pour ce
peuple une nouvelle providence, et que tu étais envoyée vers lui pour le
régénérer.
N'es-tu plus une puissance créatrice? ou si c'est que tu n'as pu parvenir
à changer ces hommes? leur coeur est-il de pierre et leurs yeux sont-ils
assez aveuglés pour te méconnaître?
Ton âme, c'est l'ordre; mais eux dont le coeur est de feu,
s'animent et
se précipitent au premier signe de la licence.
Oh! ils ne connaissent qu'elle, ils la chérissent... et pourtant ils ne
parlent que de toi, quand leur fer tombe sur la tête des innocents: oh!
ton
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