Paula Monti, Tome I | Page 5

Eugène Süe
�� lui, il varie nos plaisirs... il a reconnu le ridicule de cette exag��ration....
--Comment cela?
--Je ne suis pas dupe de son affectation �� fuir madame de Hansfeld. Je parie qu'il est ��pris d'elle, et qu'il veut attirer son attention par cette originalit�� calcul��e....
--C'est impossible--dit Fierval.
--Ce moyen est trop vulgaire--dit Gercourt.
--C'est justement pour cela que M. de Morville l'emploie. Il est trop sot pour en inventer un autre....
--Comment!... il aurait attendu l'arriv��e de madame de Hansfeld pour ��tre infid��le... lorsque depuis pr��s de deux ans... il n'aurait eu qu'�� choisir parmi les plus charmantes consolatrices?
--Rien de plus simple--dit le domino.--La difficult�� l'aura tent��... Personne n'a r��ussi aupr��s de madame de Hansfeld, et il serait jaloux de ce succ��s.... Parce que de Morville est b��te, il ne s'ensuit pas qu'il ne soit pas vaniteux....
--Et parce que vous avez de l'esprit, beau masque--dit M. de Br��vannes--il ne s'ensuit pas que vous soyez ��quitable....
Un domino prit M. de Gercourt par le bras et mit fin �� cette discussion sur M. de Morville, qui perdit ainsi son plus vaillant d��fenseur.
--Et depuis quand cette princesse enchanteresse est-elle �� Paris?--demanda M. de Br��vannes.
--Depuis trois ou quatre mois environ--. dit M. de Fierval.
--Et qui l'a pr��sent��e dans le monde?
--La femme du ministre de Saxe; mais en v��rit�� le prince est Saxon.
--Prince!--reprit M. de Br��vannes--il est impossible qu'on ne sache rien de plus sur ce secret myst��rieux?
--Je puis vous dire, moi--reprit M. de Fierval--que, curieux comme tout le monde de p��n��trer un coin de ce myst��re, j'ai interrog�� le ministre de Saxe.
--Eh bien?
--Il m'a r��pondu d'une mani��re ��vasive. Le prince, d'une sant�� fort d��licate, vivait dans une retraite absolue... on lui imposait les plus grands m��nagements... son voyage l'avait beaucoup fatigu��... enfin, je vis que mes questions embarrassaient visiblement le ministre, je rompis la conversation; depuis, je me suis abstenu de lui reparler de M. de Hansfeld.
--C'est tr��s bizarre, en effet, dit M. de Br��vannes, et personne parmi les ��trangers ne conna?t ce prince?
--Tout ce que j'ai pu savoir, c'est qu'il s'est mari�� en Italie... et qu'apr��s un voyage en Angleterre, il est venu s'��tablir ici.
--Autant qu'on peut avoir une opinion sur des choses si obscures, dit un autre, je croirais d��cid��ment que le prince est imb��cile, ou quelque chose d'approchant.
--Au fait, dit le domino, le soin qu'on met �� le cacher �� tous les yeux....
--L'embarras du ministre de Saxe �� vous r��pondre, dit M. de Br��vannes �� M. de Fierval.
--L'air sombre et m��lancolique de la princesse.
--Mais alors--reprit Br��vannes--pourquoi cette belle m��lancolique va-t-elle dans le monde?
--Ne voulez vous pas qu'elle s'enterre avec son idiot... si idiot il y a?
--Mais si elle a toujours l'air m��lancolique et m��me sinistre dont vous parlez, quel plaisir trouve-t-elle dans le monde?
--Ma foi, je n'en sais rien, dit M. de Fierval; c'est justement cette esp��ce de myst��re qui, joint �� la beaut�� de madame de Hansfeld, la met si �� la mode.
--Elle n'a pas d'amie intime qui puisse en raconter quelque chose? demanda M. de Br��vannes.
--J'ai entendu dire �� madame de Lormoy qu'��tant all��e un matin voir madame de Hansfeld �� l'h?tel Lambert, elle avait tout �� coup entendu, assez pr��s de l'appartement o�� elle se trouvait, une phrase musicale d'une ravissante harmonie jou��e sur un buffet d'orgue avec un rare talent.... La princesse ne put r��primer un l��ger mouvement d'impatience. Elle fit un signe �� sa fille de compagnie au visage cuivr��. Celle-ci sortit sur-le-champ. Peu d'instants apr��s... les chants avaient cess��!!
--Et madame de Lormoy ne lui demanda pas d'o�� venait le son de cet orgue.
--Si fait.
--Et que r��pondit la princesse?
--Qu'elle n'en savait rien... que c'��tait sans doute dans le voisinage que l'on touchait de cet instrument, dont le son lui aga?ait horriblement les nerfs.... Madame de Lormoy lui lit observer que, l'h?tel Lambert ��tant parfaitement isol��, l'orgue dont on jouait devait ��tre dans la maison.... Madame de Hansfeld parla d'autres choses.
--D'o�� il faut conclure--reprit le domino--que personne ne saura le mot de cette ��nigme.... Ah! si j'��tais homme... demain je le saurais, moi!
Cette conversation fut interrompue par ces mots de M. de Fierval, qui absorb��rent l'attention:
--Quel est ce grand domino ��videmment masculin qui cherche aventure? Ce noeud de rubans jaune et bleu �� son camail lui sert sans doute de signe de ralliement et de reconnaissance.
--Oh!--dit le domino en descendant du coffre o�� il ��tait assis--c'est quelque grave rendez-vous. Je vais m'amuser �� contrarier cette intrigue en m'attachant aux pas de ce myst��rieux personnage....
Malheureusement pour ce malin d��sir, un flot de foule emporta le domino qui portait un noeud de rubans jaune et bleu, et il disparut.
Quelques moments apr��s, ce m��me domino masculin, qui venait d'��chapper �� la curieuse poursuite du domino du coffre, monta l'escalier qui conduit aux secondes loges, et se promena quelques minutes dans le corridor.
Il fut bient?t rejoint par un domino f��minin, portant aussi un noeud de rubans
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