Paula Monti, Tome I | Page 4

Eugène Süe
lorsque le fid��le est aussi recherch�� que l'est Morville....
--Quant �� moi, je n'ai jamais pu souffrir M. de Morville--dit M. de Br��vannes.--J'ai toujours ��vit�� de le rencontrer.
--Je vous assure, mon cher--dit M. de Fierval--qu'il est le meilleur gar?on du monde....
--Cela se peut, mais il a l'air si vain de sa jolie figure!
--Lui?... allons donc!...
--Heureusement que cet Adonis est aussi b��te qu'il est beau--dit le domino.
--Beau masque, prenez garde--dit un nouvel arrivant qui s'��tait fait jour jusqu'au premier rang des auditeurs;--en vous entendant parler ainsi de L��on de Morville, on pourrait croire que vos s��ductions ont ��chou�� contre sa fid��lit�� �� lady Melford.... vous dites trop de mal de lui pour ne pas lui avoir voulu... trop de bien.
--Vraiment, Gercourt--reprit gaiement le domino--tu me parais tr��s bienveillant aujourd'hui.... Est-ce qu'on joue ta com��die demain?
--Comment, beau masque! vous me croyez int��ress�� �� ce point?
--Sans doute... un homme du monde comme toi... �� la mode comme toi... d'esprit comme toi... qui ose se permettre d'avoir plus d'esprit que les autres... hommes d'esprit, bien, entendu, est condamn�� �� toutes sortes de facheux m��nagements.... Malgr�� cela, si ta com��die tombe... n'en accuse que tes amis.
--Je ne serai pas si injuste, beau masque, si ma com��die tombe, je n'accuserai que moi.... Quand on a des amis comme L��on de Morville, dont vous dites un mal si flatteur, on croit �� l'amiti��.
--Tu vas recommencer notre querelle?
--Sans doute.
--Soutenir que L��on de Morville a de l'esprit?
--Malheureusement pour lui, il est tr��s beau; aussi les envieux aiment-ils �� supposer qu'il est tr��s b��te.... S'il ��tait louche, b��gue ou bossu... peste!... on ne s'aviserait pas de contester son esprit. De nos jours il est inou? combien la laideur a d'avantages.
--Tu dis cela pour la plupart de nos hommes d'��tat?--reprit le domino.--Le fait est qu'on pourrait dire maintenant: Laid comme un ministre.
--Et puis, dans ce si��cle s��rieux, rien n'est plus s��rieux que la laideur.
--Sans compter--reprit le domino--qu'une figure patibulaire est toujours une sorte d'introduction, de pr��paration �� une vilenie: sous ce rapport, il est tr��s adroit �� certains hommes d'��tat d'��tre hideux.
--Pour en revenir �� M. de Morville, je n'ai jamais entendu vanter son esprit--dit s��chement M. de Br��vannes.
--Tant mieux pour lui--reprit M. de Gercourt--je me d��fie des gens dont on cite les bons mots.... Je douterais de M. de Talleyrand si je ne l'avais pas entendu causer.... Avouez du moins, mon cher Br��vannes, que Morville n'a pas un ennemi, malgr�� l'envie que ses succ��s devraient exciter.
--Parce qu'il est niais--reprit opiniatr��ment le domino;--les gens vraiment sup��rieurs ont toujours des ennemis.
--Il me semble alors, beau masque--reprit M. de Gercourt--que votre hostilit�� acharn��e constate fort la sup��riorit�� de L��on de Morville.
--Bah! bah!--reprit le domino sans r��pondre �� cette attaque--la preuve que M. de Morville est un pauvre sire... c'est qu'il cherche toujours �� produire de l'effet, �� se faire remarquer.... Ridicule ou non, peu lui importe le moyen.
--Comment cela?--dit M. de Gercourt.
--Nous parlions tout �� l'heure de l'admiration g��n��rale qu'inspirait la princesse de Hansfeld--dit le domino.--Eh bien! M. de Morville affecte de faire le contraire de tout le monde. Qu'il soit indiff��rent �� la beaut�� de madame de Hansfeld, soit; mais de l'indiff��rence �� la version, il y a loin....
--A l'aversion! Que voulez-vous dire?--demanda M. de Br��vannes.
--Voil�� un nouveau crime dont mon pauvre Morville est bien innocent, j'en suis s?r--dit M. de Gercourt.
--Tout le monde sait--repartit le domino--qu'il feint l'aversion la plus prononc��e pour madame de Hansfeld.
--Morville?
--Certainement, quoiqu'il aille assez peu dans le monde, maintenant il affecte de fuir les endroits o�� il peut rencontrer la princesse. C'est �� ce point, qu'on ne le voit plus que tr��s rarement chez sa tante, madame de Lormoy, sans doute par crainte d'y trouver madame de Hansfeld. Voyons, Fierval, vous qui connaissez madame de Lormoy, est-ce vrai?
--Le fait est que je rencontre maintenant rarement Morville chez elle.
--Tu l'entends?--dit le domino triomphant en s'adressant �� M. de Gercourt.--L'antipathie de Morville pour la princesse se remarque; on en jase... on s'en ��tonne.... Voil�� tout ce que voulait cet Apollon sans cervelle.
--Cela est impossible--dit M. de Gercourt; personne n'est moins affect�� que Morville; c'est un des hommes les plus aimables, les plus naturellement aimables que je connaisse; de sa vie, je crois, il n'a jamais ha?, feint ou menti; il pousse m��me le respect de la foi jur��e jusqu'�� l'exag��ration.
Je suis de l'avis de Gercourt--dit M. de Fierval.--Seulement depuis longtemps de Morville, profond��ment triste, va fort peu dans le monde.
--Cela s'explique--dit un des auditeurs de cet entretien.--Depuis dix-huit mois que lady Melford est partie, il ne cesse de la regretter.
--Et puis--dit un autre--la m��re de M. de Morville est dans un ��tat tr��s alarmant, et personne n'ignore combien il adore sa m��re.
--Son attachement pour sa m��re ne fait rien �� l'affaire--r��pondit le domino.--Quant �� sa fid��lit�� au souvenir de lady Melford... il a chang�� de ridicule et d'exag��ration; c'est g��n��reux
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