beaux que soient ses yeux, on dirait des yeux... diaboliques.
--Peste! cela devient int��ressant--s'��cria M. de Br��vannes;--la princesse est une v��ritable h��ro?ne de roman moderne. Apr��s tout ce que je viens d'entendre dire sur sa figure, je n'ose vous parler de son esprit. Ordinairement on n'exulte certaines miraculeuses perfections qu'aux d��pens des imperfections les plus prononc��es.
--Tu te trompes--dit le domino.--Ceux qui ont entendu parler madame de Hansfeld, et ceux-l�� sont rares, la disent aussi spirituelle que belle.
--C'est vrai--reprit Fierval;--on peut seulement lui reprocher sa sauvagerie, qui s'effarouche des plaisanteries les plus innocentes.
--Il faut que la princesse y prenne garde--dit le domino.--Si ses affections de pruderie durent encore quelque temps, elle se verra aussi abandonn��e des hommes que recherch��e des femmes, qui �� cette heure la redoutent encore, ne sachant pas si son rigorisme est r��el ou affect��.
--Mais--dit M. de Br��vannes--qui peut faire supposer la princesse capable d'hypocrisie?
--Rien. Elle est tr��s pieuse--reprit M. de Fierval.
--Dis donc d��vote--reprit le domino--?a n'est pas la m��me chose.
--Quand on aime si passionn��ment l'��glise--dit un autre--on aime moins les salons et on donne moins de soin �� sa toilette.
--Voil�� qui est injuste--dit M. de Fierval en souriant.--La princesse s'habille toujours de la m��me mani��re et avec la plus grande simplicit��: le soir une robe de velours noir ou grenat fonc�� avec ses cheveux en bandeaux.
--Oui; mais ces robes, admirablement coup��es, laissent admirer des ��paules ravissantes, des bras d'une perfection rare, une taille de cr��ole, un pied de Cendrillon, et quel luxe de pierreries!
--Autre injustice!--s'��cria M. de Fierval,--elle ne porte qu'un simple ruban de velours noir ou grenat autour du cou, assorti �� la couleur de sa robe....
--Oui--reprit le domino--et ce pauvre petit ruban est attach�� par un modeste fermoir compos�� d'une seule pierre.... Il est vrai que c'est un diamant, un rubis ou un saphir de vingt ou trente mille francs.... La princesse poss��de, entre autres merveilles, une ��meraude grosse comme une noix.
--?a n'est toujours que l'accessoire du ruban de velours--dit gaiement M. de Fierval.
--Mais le prince, le prince m'inqui��te... moi--reprit M. de Br��vannes.--S��rieusement, est-il aussi myst��rieux qu'on le dit?
--S��rieusement, reprit M. de Fierval.--Apr��s avoir demeur�� quelque temps rue Saint-Guillaume, il est all�� se loger sur le quai d'Anjou, au Diable-Vert, dans cet ancien et immense h?tel Lambert. Une femme de ma connaissance, madame de Lormoy, est all��e rendre visite �� la princesse; elle n'a pas vu le prince, on l'a dit souffrant. Il para?t que rien n'est plus triste que ce palais ��norme, o�� l'on est comme perdu, o�� l'on n'entend pas plus de bruit qu'au milieu d'une plaine, tant ces rues et ces quais sont d��serts.
Puisque vous connaissez des personnes qui ont p��n��tr�� dans cette habitation myst��rieuse, mon cher Fierval--dit un autre--est-il vrai que la princesse a toujours �� c?t�� d'elle une esp��ce de nain ou de naine, n��gre ou n��gresse, mais difforme?
--Quelle exag��ration! dit M. de Fierval en riant.
Et voil�� justement comme on ��crit l'histoire!
--Le nain ou la naine n'existe pas.
--Je suis d��sol��, messieurs, de d��truire vos illusions. Madame de Lormoy, qui, je vous le r��p��te, va souvent �� l'h?tel Lambert, a seulement remarqu�� la fille de compagnie de madame de Hansfeld; c'est une tr��s jeune personne qui n'est pas n��gresse, mais dont le teint est cuivr��, et dont les traits ont le caract��re arabe.
Voil�� n��cessairement la source d'o�� est sortie la naine noire et difforme.
--C'est dommage, je regrette le nain n��gre et hideux; c'��tait furieusement moyen-age! dit M. de Br��vannes.
* * * * *
CHAPITRE II.
UNE INTRIGUE.
Un assez grand attroupement de curieux, form�� autour du coffre o�� tr?nait le domino dont nous avons parl��, ��coutait avidement les bizarres versions qui circulaient sur la vie myst��rieuse du prince et de la princesse de Hansfeld.
Heureusement pour les curieux, ces r��cits n'��taient pas �� leur fin.
--Il est �� remarquer--reprit M. de Fierval--que madame de Lormoy, la seule personne qui voie assez intimement madame de Hansfeld, en dit un bien infini.
--C'est tout simple--reprit M. de Br��vannes--le moindre petit rocher est toujours une Am��rique pour les modernes Colomb.... Madame de Lormoy a d��couvert l'h?tel Lambert, elle doit raconter des merveilles de la princesse.... Mais, �� propos de madame de Lormoy, que devient son neveu, le beau des beaux, L��on de Morville? Quelle heureuse femme adore maintenant sa figure d'archange, depuis qu'il a ��t�� oblig�� de se s��parer de lady Melford?
--Il est toujours fid��le au souvenir de sa belle insulaire--r��pondit M. de Fierval.
--A la grande col��re de plusieurs femmes �� la mode--ajouta le domino--entre autres de la petite marquise de Luceval, qui affecte l'originalit�� comme si elle n'��tait pas assez jolie pour ��tre naturelle; n'ayant pu enlever L��on de Morville �� sa lady du vivant de cet amour, elle esp��rait au moins en h��riter.
--Une liaison de cinq ans, c'est si rare....
--Ce qui est plus rare encore, c'est qu'on soit fid��le... �� un souvenir.... Je n'en reviens pas--dit M. de Br��vannes.
--Surtout
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