sur vélin
renferme en tête une grisaille à la plume légèrement teintée qui
représente Christine agenouillée offrant son oeuvre au duc d'Orléans.
Un autre ms. existe à la Bibl. Nat. sous le n° 1740 du fonds français, il
porte les cotes annciennes 1023 (Fontainebleau), 980 (inventaire de
1645, Dupuy), et 7692 du catalogue de 1682. Cette copie sur vélin et
reliée actuellement en maroquin jaune au chiffre de Louis XIV contient
32 feuillets et une grisaille assez médiocre.
Ces deux mss., absolument identiques pour le texte, constituent une
nouvelle famille C qui vient ainsi prendre sa place dans la généalogie
précédemment dressée des familles A et B:
A
A1 A2 [B] [C] /--------\ /-----\ B1 B2 B3 C1 C2
IV.--LE LIVRE DES TROIS JUGEMENTS
Cet ouvrage, dédié au célèbre et vaillant sénéchal de Hainaut, contient
l'exposé de trois cas d'amours.
Le premier récit nous montre une dame, remarquable par ses vertus et
sa beauté, qui ayant été délaissée par son premier amant se reprend à
donner son amour à un second plus sincère. Est-elle pour cela parjure?
Telle est la question que pose Christine.
Le second offre une situation analogue. Un chevalier qui a perdu tout
espoir de revoir sa dame, durement retenue en prison par un mari jaloux,
peut-il au bout d'un certain temps se livrer à un nouvel amour?
Enfin le troisième cas renferme a la fois une question et un
enseignement moral. Une demoiselle, abandonnée par un noble
chevalier qui s'adresse à une puissante dame et qui repoussé revient
implorer sa grâce, doit-elle acorder son pardon ou le refuser
impitoyablement?
Ces trois controverses délicates sont soumises par Christine à la sagace
appréciation du bon sénéchal.
V.--LE LIVRE DU DIT DE POISSY
Ce gracieux poème, un des plus intéressants qui soient sortis de la
plume de Christine, comprend deux parties bien distinctes. Dans la
première Christine nous raconte avec une simplicité charmante le petit
voyage qu'elle fit en avril 1400 pour aller rendre visite à sa fille,
religieuse au couvent de Poissy; elle partit en compagnie d'une brillante
et joyeuse société de dames et gentilhommes qui égayaient la route de
leurs chants et de leurs devis amoureux. Les beautés du chemin que
suivit la joyeuse chevauchée servent de thème à une description
complète des charmes de la campagne par une délicieuse matinée de
printemps; les brillantes parures de la nature, les chants harmonieux des
oiseaux, les divertissements des pastoures, le doux «bruire» de la
rivière, l'aspect sévère des grands bois de Saint-Germain fournissent les
éléments d'un tableau gracieux et vrai où Christine fait preuve d'un
remarquable talent de description.
Arrivée au but de son excursion, Christine nous conduit à travers la
célèbre abbaye et nous décrit exactement la façon de vivre des
religieuses, leur habitation avec toutes ses dépendances, leurs privilèges,
les ressources qu'elles possèdent, les richesses de leur superbe église,
enfin mille détails intéressants. La journée s'écoule rapidement au cours
de cette visite, et, le soir arrivé, l'aimable société se retire dans un hôtel
de Poissy pour y passer la nuit. Le lendemain de grand matin on entend
la messe et l'on vient prendre congé des religieuses et les remercier de
leur accueil empressé, puis on reprend le chemin de Paris.
C'est ici que s'ouvre la seconde partie du poème entièrement consacrée
au débat amoureux. A peine le joyeux cortège a-t-il pénétré dans la
forêt qu'une jeune dame «la plus belle de toutes» s'écarte et affecte de
se tenir à distance, laissant deviner quelque triste préoccupation.
Christine s'en aperçoit la première et, entraînant avec elle un bel écuyer
qui semblait également affligé, se rapproche de la jeune dame pensive
et la supplie de lui faire connaître le motif de sa tristesse. Alors
commence la controverse: chacune des parties, la dame et l'écuyer, se
prétendant tour à tour la plus mal partagée et la plus digne de
compassion. La dame nous expose d'abord la vive douleur qu'elle
ressent de la captivité de son amant, retenu prisonnier de Bajazet depuis
la défaite de Nicopolis, et pour accentuer encore ses regrets, énumère
minutieusement les charmes physiques du chevalier qu'elle a perdu.
L'écuyer nous raconte ensuite son aventure: c'est celle d'un amant
éconduit par une dame qu'il ne peut oublier et à laquelle il reste
fermement attaché, malgré tout son dépit. Dans sa douleur il nous
retrace à son tour les avantages physiques de sa bien aimée.
Ces deux portraits sont fort intéressants, et réalisent en quelque sorte le
type des conditions qui constituaient alors l'idéal de la beauté.
Comme toujours, Christine n'ose se prononcer sur la question délicate
qui lui est soumise et remet le jugement de cette controverse à
l'appréciation du vaillant sénéchal de Hainaut, pour lequel d'ailleurs elle
a vraisemblablement composé tout son poème (voy. note p. 311).
Le texte du Dit de Poissy a été établi d'après
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