poches de mon caban, et je fis feu résolument sur le premier des trois assassins, qui tomba sur le coup. Le second, atteint par une balle de mon arme, lacha son couteau et pronon?a un caramba formidable en fuyant du c?té de la Casa Moralès.
Quant au troisième, il s'avan?ait vers moi et allait se ruer en avant, lorsqu'un nouveau venu l'étreignit fortement par derrière, tandis qu'il me criait de ne pas tirer.
En effet, ce deus ex machina n'était rien autre qu'un colosse américain, appartenant à la maison du général Scott. Morse--tel était le nom de ce géant--était doué d'une force surhumaine. Par les ordres de son ma?tre, il avait enr?lé deux autres camarades de l'armée connus par leur audace et leur amour des aventures, et ils avaient été envoyés sur mes pas, avec mission de ne pas me perdre de vue, de franchir la muraille de la huerta et de se rendre compte de ce qui allait s'y passer.
--Il faut, leur avait dit notre général, que vous preniez vivants le ou les assassins que vous rencontrerez là-bas.
Ils avaient réussi. J'avais échappé comme par miracle à l'attaque des complices de la senora inconnue.
Je reviens à celle-ci.
A peine avais-je compris que le troisième meurtrier était solidement baillonné, que je m'étais retourné pour savoir ce qu'était devenue la belle Mexicaine.
Elle avait disparu. Par quel moyen? Nous ne p?mes le deviner. Cette sirène infernale, qui attirait vers un guet-apens les pauvres officiers de notre armée, devait s'être ménagé une sortie: nous découvr?mes, en effet, vers un angle de la huerta, une sorte de tour au moyen duquel on pouvait--en pressant un ressort--se trouver en un instant porté dans une ruelle déserte, qui aboutissait à la route de Puebla.
Les deux Mexicains et le cadavre de leur complice furent entra?nés au quartier général, et l'on fit prévenir le corrégidor.
Celui-ci arriva en toute hate, mais on remarqua qu'il fit la grimace lorsqu'il vit et comprit pour quelle affaire il avait été mandé.
--Ces deux misérables ont été surpris en flagrant délit de meurtre, lui dit le général Scott; la loi martiale les condamne à mort. Mais avant de les livrer au bourreau, il faut, je le veux, que vous obteniez d'eux l'aveu de leur crime et le nom, l'adresse de leurs complices, les deux femmes disparues.
Le corrégidor inclina la tête et procéda à l'interrogatoire des deux bandits.
Tout d'abord, les scélérats refusèrent de faire le moindre aveu; mais, poussé par le magistrat mexicain, l'un d'eux déclara qu'il allait parler.
Il déclara qu'une conspiration, dont il n'était que le bras, avait été organisée par les soins du président Santa-Anna, et que le chef connu était un nommé Antonio Cespédès. Tous les affiliés--dont le nombre était de deux cents au moins--avaient juré sur le Christ de se dévouer à la sainte cause pour la délivrance de leur pays.
--Quelle est la senora qui sert de sirène à ces rendez-vous meurtriers? demanda le général Scott.
Après de grandes hésitations, le bandit consentit à la nommer:
--Dona Fernandina Capilla, la fille du riche haciendero Capilla de Los Pueblos.
--Je m'en étais douté! murmura le corrégidor à voix basse. Où est-elle?
--Je l'ignore: peut-être à la hacienda de son père.
Le général Scott envoya un escadron de cavalerie à la ferme du senor Capilla, mais le logis était abandonné de la veille: les portes en demeuraient ouvertes, la maison restait vide.
Hieronimo Sanfé, le meurtrier garrotté par Morse, et son complice blessé par moi, nommé Jacomo Ora, furent condamnés au supplice infame du garrotte. Puis on les mit en chapelle pour être exécutés le lendemain matin.
Le garrotte est tout simplement la strangulation primitive. On attache le patient solidement ficelé à un poteau placé au milieu d'une place publique. On le fait asseoir sur un banc adossé au poteau et on lui passe une corde autour du cou. Cette corde est entortillée à une sorte de tourniquet en bois de chêne, et le bourreau vire le chanvre jusqu'à ce que le patient soit bel et bien étranglé.
C'est horrible, mais c'est ainsi. La coutume du Mexique est là.
Le lendemain, à dix heures du matin, les tréteaux avaient été dressés sur la grande place de Mexico, vis-à-vis la cathédrale.
Les deux patients, soutenus chacun par un prêtre, furent amenés au pied de l'échafaud, et le bourreau--à son corps défendant, mais forcé d'agir par la présence de toute l'armée américaine rangée en bataille sur le lieu du supplice--fut bien forcé d'accomplir sa funèbre tache.
J'assistais à cette exécution, et j'avoue que le spectacle horrible de ces faces tuméfiées, de ces langues pendantes, de ces contorsions atroces, resta longtemps gravé dans ma mémoire.
Mes amis Thirtle et Andrès étaient vengés!
Une exécution à San-Francisco.
La découverte des mines d'or en Californie--cette partie conquise de l'Amérique du Nord sur les c?tes du Pacifique--par les habitants des états-Unis avait attiré sur ce point du globe une quantité d'émigrants, dont le nombre affluait tous les
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