Nicolas Foucquet, surintendant des finances | Page 3

Arthur de Marsy

système, qui ne fut réformé que plus tard par Colbert qui, soit dit en
passant, en avait largement bénéficié avant d'en faire ressortir les
inconvénients.
Toute l'histoire de Foucquet se résume en quelque sorte dans cette
oeuvre: remplir les caisses royales au moyen d'avances, et se faire
rembourser ensuite ces avances. Il eut procurer pendant près de dix ans
à Louis XIV des sommes considérables, mais ne réussit pas à les
recouvrer et il y eut un moment où il était créancier de l'État de plus de
neuf millions, dont les reçus seuls restèrent dans sa cassette.
Mais revenons à Foucquet, que la force des événements et ses
antécédents de famille et d'éducation vont entraîner à devenir l'un des
ennemis les plus ardents de la Fronde.

Procureur général de la Chambre de Justice créée le 18 juillet 1648,
Foucquet ne fut pas accepté par le Parlement, qui craignait son humeur
conciliante et surtout son dévouement à la Reine, au lendemain de la
Journée des Barricades, il suivit la Régente et la Cour à Saint-Germain,
et, dès lors, intendant de Paris hors de Paris, il devint l'intendant de
l'armée charge de reconquérir la capitale rebelle.
Nous ne suivrons ni Foucquet ni la Cour pendant les pérégrinations de
la Royauté luttant contre les Parisiens. Le bel ouvrage de
Sainte-Aulaire nous donne les grandes lignes de l'histoire de cette
époque agitée, les mémoires de Retz, de Joly, de Dubuisson-Aubenay
et de Navailles, la correspondance de Mazarin et les gazettes de Loret
nous on font connaître les détails, mais nous espérons qu'un jour un de
nos confrères écrira l'histoire de Compiègne pendant la Fronde et, ce
jour-là, il pourra consulter avec fruit quelques chapitres du livre de M.
Lair et recourir avec confiance aux nombreuses sources qu'il indique.
En 1650, Mazarin désirant placer à la tête du parquet du Parlement un
magistrat qui serait réellement l'homme du roi, jeta les yeux sur
Foucquet et décida Méliand à vendre à celui-ci sa charge de procureur
général. C'est à dater de cette époque que Colbert et Foucquet furent
mis en rapports par Mazarin. Relevons à ce propos un détail curieux
pour les moeurs du temps. Au lendemain de sa nomination, les Gardes
du corps des Merciers de Paris vinrent faire leur cour à Foucquet et lui
offrirent douze aulnes de satin de Gênes noir que le nouveau procureur
général accepta «sans violence et de bonne grâce, pour faire une robe à
l'ordinaire».
Le 5 février 1651, jour du second mariage de Foucquet, le parlement
prenait décidément parti pour la Fronde. Tous les efforts de celui-ci
tendirent alors à gagner du temps et à lasser les frondeurs. Il rendit à
cette époque de nombreux services à la reine-mère ainsi qu'à Mazarin.
Au mois d'août 1652, le parlement était divisé entre Paris et Pantoise, la
Cour était à Compiègne avec les ministres. C'est à cette date que se
place le voyage dans notre ville du cardinal de Retz. Jugeant la Fronde
perdue, le coadjuteur résolut de faire sa paix avec la reine, en venant
recevoir la barrette qui consacrait son élévation au cardinalat. Mais,

Mazarin et Foucquet veillaient: à peine Retz commençait-il à expliquer
à la régente son plan de restauration de l'autorité royale qu'Ondedei
venait gratter à la porte pour entretenir la souveraine d'affaires urgentes.
Après lui, arrivait botté, tout poudreux, en pourpoint de toile, l'abbé
Basile Foucquet, le rival de Retz auprès de Mademoiselle de Chevreuse.
Le coadjuteur était joué, éconduit, mystifié, il retourna à Paris où le
peuple qui ne s'arrête pas aux finesses de la politique lui fit une ovation
aux cris de: Vive le Roi!
L'abbé Foucquet eut à cette époque une singulière aventure avec la
duchesse de Chatillon, qui habitait le château de Mello, où naquit une
prétendue conspiration que Bertaut et Ricous payèrent de leur vie. Il sut
persuader à la duchesse qu'elle y était compromise et pendant deux
mois, il courut avec elle de château en maison des champs, d'hôtel en
couvent, prisonnière et gardien volontaires tous deux, se déguisant
tantôt en cavaliers tantôt en religieux pour échapper à des poursuites
auxquelles personne n'avait jamais songé.
Plus tard nous retrouvons, à l'automne de 1655, Madame de Chatillon
mêlée aux négociations qui amenèrent le maréchal d'Hocquincourt,
gouverneur de Péronne, Ham et Montdidier, à rentrer dans l'obéissance
royale. Il y a là, dans les rôles joués par la duchesse de Chatillon, par
Navailles et par Basile Foucquet les éléments d'une comédie
spirituellement conduite et dont on voit Mazarin tenir les fils de
Compiègne.

III
Le 2 janvier 1653, la mort de la Vieuville, surintendant des finances,
offre à Foucquet une occasion de réclamer de Mazarin la récompense
des services qu'il lui a rendus. Apparenté au monde de la finance par les
Castille, les Jeannin et les Maupeou, Foucquet peut offrir le concours
des
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