Blanche a ��t�� prise d'un violent mal de t��te, et depuis les douleurs sont devenues intol��rables.
--Je te laisse, mon ami.
--Non, reste. Le docteur va descendre dans un instant, et je suis bien aise de t'avoir aupr��s de moi.
Une porte s'ouvrit, et le docteur ��tienne Aubertot, professeur �� la Facult�� et membre de l'Acad��mie de m��decine, parut avec sa bonne figure de chanoine enti��rement ras��e et que surmontait au-dessus d'un front tr��s haut, vrai front de penseur et d'artiste, une chevelure grise aux boucles soyeuses.
--Eh bien? dit Olivier.
--Eh bien? r��p��ta Pontaillac, malgr�� lui, sous le visible effort d'une inqui��tude grandissante.
--La marquise n'est pas en danger, mais elle souffre atrocement d'une n��vralgie susorbitaire que je vais combattre avec de l'antipyrine. Fran?ois est parti en chercher.
--Vous croyez, docteur, que l'antipyrine la gu��rira?
--Nous aurons au moins un soulagement, mon cher marquis.
--Hatez-vous, de grace?... Blanche est martyris��e.
--C'est vrai. La n��vralgie susorbitaire a sa place au nombre des maux humains les plus douloureux; mais dans une demi-heure...
--Et vous la laisserez souffrir une demi-heure encore? C'est impossible!
--Que voulez-vous? J'esp��re que l'antipyrine agira, et, du reste, il n'y a pas de meilleur rem��de.
--Je vous demande pardon, monsieur le docteur, fit Pontaillac. Il y en a un puissant, radical, infaillible.
--Et pourrais-je conna?tre cette belle panac��e?
--La morphine, cher ma?tre, la morphine!
Le professeur Aubertot r��fl��chit un instant et observa le capitaine de son oeil bleu tr��s clair:
--Ma foi, vous avez raison, et je vous remercie de m'y avoir fait songer.
Il se tourna vers M. de Montreu:
--Je vais ��crire une ordonnance.
--Inutile, docteur, continua Raymond. J'ai l�� sur moi tout ce qu'il faut pour gu��rir.
Pontaillac tendit au m��decin un minuscule flacon et un ��crin des plus ��l��gants.
--Non, non! Pas ?a! pas ?a! dit Aubertot: Je n'en connais pas la dose, et je veux une solution tr��s faible; mais j'accepte l'instrument. Vous ��tes notre Providence, mon cher capitaine.
L'officier prit cong�� de M. de Montreu et du docteur Aubertot, et quelques minutes plus tard, le mari et le m��decin p��n��tr��rent dans la chambre de la malade.
Sur une haute et vaste lit��e, en un fouillis de dentelles, la marquise Blanche de Montreu, n��e de La Croze, ��treignait nerveusement sa t��te de ses deux mains aux doigts l��gers, et le long des ��paules un peu maigres et des bras nus, les beaux cheveux roux s'��pandaient avec des lueurs m��talliques. On devinait, au travers de la chemise de surah et l'on voyait par l'��chancrure de la gorge, une peau ros��e d'un sang vermeil; le corps ��tait jeune et chaud, et les formes juv��niles, dans leur chaste enveloppement, ��taient pleines de grace et de suggestions voluptueuses.
Elle retomba sur l'oreiller, en ��touffant un cri de douleur; ses beaux yeux de velours brun s'emperlaient de larmes, le petit nez aux narines d��licates, les l��vres qui laissaient voir une rang��e de dents mignonnes, le cou svelte, tout ce charmant visage, enfin toute cette adorable jeunesse luttait, vaillante, pour ne pas affliger l'��poux ador��.
Aubertot s'avan?a, t��te nue, et dit:
--Madame, nous vous apportons le soulagement.
Le docteur emplissait la Pravaz d'une solution de morphine au trenti��me, et Olivier se sentait trembler �� l'id��e que l'aiguille blesserait les chairs roses et douces.
Pontaillac, l'ami Pontaillac, le cuirassier-hercule, pouvait supporter une op��ration m��me terrible--mais elle, sa dame si fluette, sa Blanche si impressionnable, aurait-elle la force?
Et, dans son ignorance du rem��de, comme s'il devinait les choses �� venir, Olivier arr��ta brusquement le bras du docteur.
--Non... Je vous en prie?
--Pourquoi?
--J'ai peur... pour elle.
--Aucun mal, aucun danger, monsieur.
--Vous me le jurez?
--Marquis, je vous le jure.
Il y eut un silence.
--Moi, je n'ai pas peur, Olivier, fit la marquise, en pr��sentant son bras.
La piq?re faite, Aubertot questionna la dame.
--Vous ai-je fait du mal?
--Pas du tout; mais je souffre toujours.
--Attendez.
Les deux hommes s'��loign��rent au fond de la chambre, et Blanche commen?a bient?t �� subir la domination du stup��fiant.
Immobile, d'un oeil d��j�� voil��, elle regardait le christ d'argent clou�� sur un sombre velours, le b��nitier d'ivoire, le prie-Dieu, la glace de Venise, les bibelots, les portraits, le vitrail des hautes fen��tres, et ces objets s'animaient et vivaient.
Le docteur et le mari se rapproch��rent, observant la femme. A un moment, sa respiration tr��s calme sembla s'arr��ter tout �� fait: le m��decin secoua doucement madame de Montreu, et la respiration reprit aussit?t, franche, r��guli��re.
Blanche ne dormait pas; elle ne souffrait plus; elle ne r��pondait pas aux paroles qu'Olivier lui adressait; mais elle les entendait pour ainsi dire inachev��es, sans pr��cision humaine, telles que ces voix qui, dans le r��ve, bruissent �� nos oreilles leurs harmonies confuses. Elle ne remuait pas; mais ses l��vres entr'ouvertes souriaient d'un sourire de b��atitude--et toute la femme se transportait vers un au-del�� o�� elle jouissait de secr��tes et incomparables extases.
Au bout d'une heure de calme persistant, le m��decin se retira.
--Vous veillerez, dit-il au mari, car il faut secouer madame la marquise, si la respiration s'arr��te encore.
Il s'en tint l��, ne voulant
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