Mémoires secrets de Fournier lAméricain | Page 6

Claude Fournier

si longtemps et avec tant d'injustice.
FOURNIER[15].
[Note 15: _Collection de M. Etienne Charavay._]
Dans un interrogatoire que Fournier subit quatre jours plus tard devant
le Comité de sûreté générale, il déclara encore ignorer les motifs de son
arrestation et on ne les lui donna pas tout d'abord. En réalité, il était
impliqué dans la procédure commencée par le tribunal criminel de
Seine-et-Oise contre les auteurs des massacres commis à Versailles le 8
septembre 1792[16]. Il bénéficia de l'amnistie du 4 brumaire an IV, les
poursuites contre lui furent abandonnées et on le rendit à la liberté.
[Note 16: M. Mortimer-Ternaux (III, 601-607) a publié cinq
dépositions de témoins faites contre Fournier à cette occasion.]
Il se retira alors dans sa maison de campagne de Verneuil. Mais les
attaques des feuilles thermidoriennes l'y poursuivirent, comme le
prouve la lettre suivante, qu'il écrivit en l'an V au rédacteur du _Journal
des hommes libres_[17]:
[Note 17: Le Journal des hommes libres, continuation du
_Républicain_ (par Charles Duval et autres), commença à paraître sous
ce titre à partir du 29 juin 1793.]
Je vous prie, citoyen, d'insérer dans votre feuille la note ci-jointe. Vous
obligerez un concitoyen qui désire dans tous les temps vous en
témoigner sa reconnaissance.
«Quelle a été ma surprise de voir dans la feuille intitulée _le Miroir_[18]
la note suivante:
[Note 18: Le Miroir, rédigé par le royaliste Beaulieu, commença à
paraître le 11 floréal an IV.]

«Il n'est personne dans la Révolution qui n'ait entendu parler d'un
nommé Fournier l'Américain, fameux par cent expéditions
révolutionnaires et notamment celle envers les prisonniers d'Orléans.
Un jeune homme de Lyon, nommé Maupetit, âgé de vingt-huit ans, a
consenti à se battre en duel avant-hier au bois de Boulogne avec cet
individu, et a reçu une blessure mortelle.»
«Je dois répondre aux calomnies des journaux chouans, qui veulent me
qualifier d'assassin, par les tournures qu'ils veulent donner dans leurs
sales feuilles malheureusement publiques. Je suis fort tranquille chez
moi, depuis ma sortie des prisons, il y a environ un an, détenu par la
tyrannie du Comité de sûreté générale pour cause non expliquée; plus,
avoir resté encore quinze mois sous la tyrannie du Comité de salut
public et de sûreté générale, réputée tyrannie de Robespierre, et ce pour
cause encore non expliquée.
«Enfin, il est bon que toute la France sache que j'ai été tyrannisé de
cachots en cachots, dans toutes les prisons de Paris pendant trois ans, et
ce sans avoir jamais été ni interrogé, ni entendu, tous mes papiers
enlevés de chez moi, que je n'ai pu jusqu'à ce moment obtenir; [ce] qui
prouve bien clairement que je n'ai jamais été l'assassin de personne, que
bien au contraire je suis devenu la proie de tous les intrigants, voleurs,
agioteurs, royalistes et calomniateurs, tels que le Miroir et autres
journalistes à gages que j'ai confondus devant les tribunaux de police,
notamment le Courrier, dit _Républicain_[19], au sujet de la
dénonciation d'un nommé Malgana, mouchard de je ne sais qui.
[Note 19: Le _Courrier républicain_, continuation du _Courrier
français_, avait commencé à paraître le 10 brumaire an II. Il était rédigé
par un certain Auvray.]
Par conséquent, étant à sept lieues de Paris à cultiver mon jardin, je
peux prouver à ce Miroir que je ne suis point le Fournier qui a eu cette
affaire avec M. Maupetit, de Lyon, et qu'il n'a voulu profiter du nom de
Fournier que pour me calomnier.
Enfin, quand est-ce que finiront mes tourments, depuis 1782 jusqu'à ce
jour, tyrannisé sous le gouvernement royal et sous les gouvernements
qui lui ont succédé, sans pouvoir obtenir justice que je ne cesse de
réclamer?
Citoyen, si mes moyens m'eussent permis de me faire imprimer, je vous
aurais évité la peine de transmettre cette note dans votre journal.

J'espère que vous vous ferez un plaisir de l'insérer dans dans votre plus
prochain numéro.
FOURNIER[20].
[Note 20: _Collection de M. Etienne Charavay_.--Cette lettre est sans
date. Mais Fournier dit qu'il l'écrit un an après sa sortie de prison,
c'est-à-dire en l'an V.]
En fructidor an VII, le nom de Fournier se trouve au bas de la pétition
des citoyens de Paris contre la nomination de Sieyès au Directoire.
Sous le Consulat[21], il fut une des personnes qui, à la suite de l'attentat
de la rue de Saint-Nicaise, se virent l'objet des mesures de rigueur
approuvées par le sénatus-consulte du 15 nivôse an IX. Des ordres
furent donnés pour le déporter à l'île d'Oléron. Mais il parvint d'abord à
se soustraire aux poursuites et se cacha à Villejuif, où il se plaça
comme jardinier. Arrêté deux ans plus tard, il fut enfermé au fort de
Joux avec les nommés Château, Michel et Brisavin, le 2 fructidor an XI
(20 août 1803).
[Note 21: Le 24 brumaire an IX, il adresse une longue pétition
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