Mémoires secrets de Fournier lAméricain | Page 3

Claude Fournier
dépose sur le bureau une dénonciation signée, con?ue en ces termes: ?J'ai entendu Fournier faire des reproches à deux ou trois inconnus de ne l'avoir pas appuyé; que, sans cela, il aurait br?lé la cervelle à Petion.--_Signé_: BOURDON.?
Fournier, interrogé, répond que ce fait est faux, que le citoyen Petion a passé près de lui dans le jardin qui avoisine la salle, qu'il a entendu qu'on le huait, mais qu'il n'a tenu là-dessus aucun propos.
Interrogé sur la connaissance qu'il a des événements du 9 au 10 [mars 1793], il répond qu'il était aux Jacobins lorsqu'on y fit la motion de se transporter en foule aux Cordeliers; qu'il s'y rendit de suite pour faire part de l'arrivée des motionnaires; que ceux-ci demandaient qu'on se saisit de tous les ennemis de la patrie, qu'on fermat les barrières, etc.; que, sur ces entrefaites, il fut question de députer vers la Commune; qu'il avait vu alors un homme inconnu qui voulait se nantir des pouvoirs de la députation, mais qu'il s'en était emparé lui-même pour éviter qu'ils ne tombassent en mauvaises mains; qu'il avait parlé au procureur de la Commune et au maire: que ce dernier l'avait engagé à employer les moyens qu'il croirait les plus efficaces pour tout pacifier; qu'il était retourné aux Cordeliers pour calmer les esprits; que, de là, il s'était porté à sa section, qu'il avait trouvée fermée, et qi'il était rentré chez lui.
Interrogé pour savoir s'il a connaissance d'un Comité d'insurrection, a dit ne rien savoir sur cet objet[9].
[Note 9: Cependant Garat, dans son rapport du 19 mars 1793, signala Fournier, Varlet et Champion parmi les Cordeliers qui tentèrent d'organiser ce comité d'insurrection. (Moniteur, XV, 750.)]
Interpellé, d'après la demande du citoyen Lidon, député, de déclarer s'il n'a rien à dire qui soit relatif à des effets qui lui ont été remis par les prisonniers détenus à Orléans, il a répondu que beaucoup de papiers, d'assignats et d'effets précieux lui avaient été remis par Delessart et autres prisonniers, qu'il avait fait inventorier le tout par la municipalité de Versailles et en avait retiré procès-verbal; qu'arrivé à Paris après le massacre qui fut fait des prisonniers, il voulait consigner le dép?t entre les mains du citoyen Roland, ministre de l'intérieur, mais que le citoyen Danton, ministre de la justice, lui dit de le porter à la Commune; qu'il déclara au Conseil de la Commune qu'il ne remettrait rien sans un re?u; qu'on lui en fit un des caisses; que, le lendemain, l'inventaire de vérification fut fait en présence de témoins; qu'il en demanda une double expédition; qu'on le renvoya au lendemain, et ensuite de jour en jour; qu'ayant été quelque temps après en campagne, on décerna un mandat d'arrêt contre lui, sous prétexte qu'il avait retenu 36,000 livres. Il assure que cette arrestation n'avait eu d'autre but que de lui enlever les papiers qui étaient relatifs au dép?t; que l'on avait cru que, par ce moyen, cette affaire resterait là, mais que le Conseil de la Commune s'occupait de l'apurement de ce compte et des vérifications nécessaires.
Un membre du Comité de surveillance dit que l'on n'a rien trouvé dans les papiers de Fournier qui puisse motiver une plus longue arrestation.
Sur la proposition d'un autre membre, l'Assemblée décrète que le citoyen Fournier sera mis en liberté, sauf à être entendu comme témoin par le Tribunal extraordinaire[10].
[Note 10: _Procès-verbal de la Convention_, VII, 300-302.]
Mais Marat s'acharna après Fournier. Dans le _Publiciste de la République fran?aise_ du 9 mai 1793, il l'accusa d'être un ambitieux, un espion, un parasite. Fournier répondit par un factum apologétique[11] où il y a des renseignements sur sa situation de fortune. Après avoir rappelé qu'il est venu en France au sujet de la propriété dont il a été dépouillé à Saint-Domingue: ?Un premier jugement par défaut, dit-il, vient de m'accorder un provisoire de 400,000 livres. Je toucherai cette somme dans peu, si le jugement est confirmé contradictoirement. Jusque-là, je suis en effet misérable. Mes ressources sont uniquement fondées sur la confiance officieuse de mes amis. Je leur dois 78,000 livres, en 22 articles, dont j'ai toutes prêtes les preuves.? Marat demandait à Fournier de quel argent il avait payé une maison de campagne récemment achetée par lui. Il reconnut avoir acheté, depuis plus de deux ans, un jardin à sept lieues de Paris, à Verneuil (Seine-et-Oise): mais il ne l'a pas payé. ?S'assurer de ce fait chez le vendeur, Pasquier, marchand de vin, rue de Thionville, à c?té du club de Cordeliers.?
[Note 11: _A Marat, journaliste_. Paris, 14 mai an II, in-4 de 7 pages.]
On le voit: les explications de Fournier ne sont pas tout à fait à son honneur.
Cependant, Marat étant mort, la Commune de Paris lui donna une mission de confiance: elle le chargea, le 26 juillet 1793, d'aller acheter des grains dans les départements du Puy-de-D?me, de
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