Mémoires secrets de Fournier lAméricain | Page 4

Claude Fournier
la Haute-Loire et autres circonvoisins. Nous ne savons comment il s'acquitta de cette mission, ni même s'il la remplit réellement.
Fournier fut un de ceux qui, en ao?t 1793, dénoncèrent la comédie de _Paméla_ comme étant une apologie séditieuse de la noblesse[12].
[Note 12: _Paméla ou la vertu récompensée_, comédie en cinq actes et en vers, par Fran?ois de Neufchateau, fut représentée pour la première fois au Théatre de la Nation, le 1er ao?t 1793. On trouvera dans l'_Histoire du Théatre-Fran?ais_, par Etienne et Martainville (tome III, pages 99 à 105), l'histoire des incidents qui troublèrent les représentations de cette pièce et amenèrent l'arrestation de l'auteur et des comédiens. Voir aussi E. Biré, Paris pendant la Terreur, p. 287.]
A la même époque, il pétitionnait à la Convention pour réclamer la formation d'une armée révolutionnaire: il se voyait déjà général de cette armée.
En octobre suivant, il fut un instant emprisonné à Versailles à cause d'un duel[13].
[Note 13: Séance du club des Jacobins du 15 octobre 1793:
?_Blanchet_: Fournier, qui dénon?a, il y a quelque temps, l'incivisme du Théatre-Fran?ais relativement à _Paméla_, qui a donné depuis la Révolution des preuves réitérées de patriotisme, est actuellement en prison à Versailles. Il a été arrêté sous le prétexte d'un duel. La Société doit son appui à cet officier, connu par son civisme.
?Un membre du Comité de correspondance rend compte des démarches qu'il a faites à ce sujet; il annonce que Fournier va être mis en liberté.?]
Depuis sa querelle avec Marat, Fournier avait été éliminé du club des Cordeliers, comme un faux frère, un renégat. Dénoncé par Vincent, il fut arrêté dans le club même, au moment où il essayait d'y rentrer de force (22 frimaire an II--12 décembre 1793), comme il ressort du curieux document inédit qu'on va lire:
CLUB DES CORDELIERS
_Séance du duodi 22 frimaire, l'an second de la République fran?aise une et indivisible._
_Présidence de_ MOMORO.
On faisait lecture de la correspondance lorsqu'un membre fait la proposition de laisser introduire Dunouy l'a?né et Fournier, dit l'Américain, dans la Société.
A ces noms, la Société a reconnu d'abord dans Dunouy l'a?né un de ses membres qui l'avait abandonnée et ne paraissait plus dans son sein depuis la scission que des scélérats ont tentée en cherchant à détruire le club des Cordeliers et n'a pas vu sans étonnement le retour de cet homme dans son sein, à l'instant où il venait d'être éloigné du sein de la Commune, comme ayant apostrophé et parlé avec dédain et mépris du peuple[14].
[Note 14: Dunouy avait en effet été exclu de la Commune, le 12 frimaire an II, comme ?exagéré?. (Moniteur, XVIII, 580.)]
Elle a également vu dans Fournier un individu expulsé de son sein comme protecteur de la faction liberticide des rolandistes et des girondistes, un des plus cruels ennemis de Marat, un de ses dénonciateurs perfides. Après discussion, l'Assemblée a passé à l'ordre du jour sur la proposition d'introduction dans son sein des nommés Dunouy et Fournier.
Les individus qui avaient déjà mis un pied dans la salle voulurent réclamer, mais le président fut chargé de maintenir l'exécution de l'arrêté et les censeurs invitèrent Dunouy et Fournier à se retirer. Ils semblaient être hors de la salle, les travaux de l'Assemblée reprenaient leur cours et la porte battante les tenait séparés du local des séances, lorsque l'on renouvelle la proposition de laisser introduire Fournier, dit l'Américain, qui, disait-on, voulait être entendu.
A l'instant, la Société manifeste [son] animadversion par un mouvement spontané de justice (_sic_) et d'indignation de se voir interrompue dans ses travaux par des hommes auxquels elle était fondée de refuser l'entrée de ses séances.
On apercevait Fournier au travers de la porte faire des signes de menace.
Un orateur étant monté à là tribune pour y développer, avec l'énergie dont doit être animé tout Cordelier, les justes motifs du refus de la Société de laisser introduire dans son sein Fournier, et la Société ayant maintenu son premier arrêté, à l'instant la porte a été foncée avec violence, Fournier s'est introduit dans la salle et, montrant au doigt l'orateur, il lui a dit d'un ton furieux et mena?ant, et le bras levé, qu'il saurait bien le faire traduire au Tribunal révolutionnaire; cette menace a occasionné une nouvelle scène et un second mouvement d'indignation.
Considérant que ce citoyen a apporté du trouble dans sa séance, considérant qu'il a porté atteinte aux droits de la liberté, qui lui sont garantis par les lois, considérant que cette violence, dans un moment où elle avait convoqué les membres extraordinairement pour s'occuper d'un des plus grands intérêts de la République, présentait quelque chose de suspect, a arrêté que ledit Fournier serait envoyé au Comité révolutionnaire de la section de l'Unité, qui serait invité à suivre suivant la rigueur des lois, que le détail de tous les faits serait inséré au procès-verbal, qu'expédition d'icelui sera envoyée aux Comités révolutionnaires et au Comité de
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