Mémoires secrets de Fournier lAméricain | Page 2

Claude Fournier
possible que Fournier ait traité durement les prisonniers confiés à sa garde, mais la septembrisade de Versailles ne doit pas lui être imputée.
Fournier eut plus de mal à se disculper de l'accusation d'improbité. Il passait pour avoir dilapidé l'argent qui lui avait été confié par la Commune en vue de son expédition et pour avoir soustrait à son profit une partie des effets des prisonniers. Il fut même arrêté quelques jours après son retour d'Orléans; mais la Commune ordonna sa mise en liberté, par arrêté du 20 septembre 1792[5].
[Note 5: Mortimer-Ternaux, III, 588.--Cet auteur a consulté les registres de la Commune de Paris, aujourd'hui détruits.]
Il est certain qu'une partie des effets des prisonniers disparut. Mais Fournier affirma que cette disparition avait eu lieu depuis qu'il n'était plus responsable de ce dép?t. Voici d'ailleurs le compte qu'il rendit au ministre de l'intérieur:
1° Il a pris à étampes, en allant à Orléans, deux pièces de canon avec leurs aff?ts et trois caissons d'artillerie, le tout bien conditionné, et les a remis à l'H?tel de Ville, dont le général Santerre doit en rendre compte.
2° A Orléans, il a fait remettre toutes les malles appartenant aux prisonniers d'état, ainsi que plusieurs autres effets, tant argenterie qu'autres objets, trouvés dans les prisons. Le tout a été renfermé dans chaque chambre des prisonniers dont il a lui-même fermé les portes et remis les clefs au ge?lier, en présence de MM. Garran de Coulon et Bourdon [de] la Crosnière, commissaire du pouvoir exécutif, pour le tout être remis à qui de droit.
3° Arrivé à Versailles, jour du massacre des prisonniers, tous leurs effets et bagages ont été remis entre les mains de la Commune de Versailles[6]. Ces mêmes effets m'ont été remis pour être déposés entre les mains du ministre de la justice, ce que j'ai fait en arrivant à Paris. M. Danton m'a observé qu'il fallait déposer le tout à l'H?tel de Ville; et j'ai rempli cette mission et ai fait faire un inventaire du tout, ainsi que d'une cassette qui m'avait été confiée, de même qu'un paquet que M. Delessart m'avait remis en secret, contenant plusieurs lettres de change et d'autres papiers importants, dont je me suis cru obligé de faire le dép?t plut?t que de le remettre à l'adresse qu'il m'avait indiqué.
[Note 6: Le procès-verbal qui fut dressé à cette occasion (10 septembre 1792) se trouve dans les papiers de Fournier.]
4° Il a été remis, par les volontaires du détachement, de l'or monnayé et autre argent, ainsi que des billets nationaux, montres et autres effets à la Commune de Versailles en dép?t pour en rendre compte.
Je certifie le tout sincère et véritable.
A Paris, le 5 octobre, l'an 1er de la République fran?aise.
Signé: FOURNIER[7]
[Note 7: Fournier se fit délivrer, le 30 brumaire an V, aux Archives, une copie certifiée de cette lettre. Cette copie fait actuellement partie de la collection d'autographes de M. étienne Charavay, qui a bien voulu nous la communiquer.--Ces comptes de Fournier ont d'ailleurs été déjà publiés par Mortimer-Ternaux, III, 590.]
En même temps, il remit à Roland un état détaillé de ses dépenses.
Roland se déclara satisfait, approuva hautement Fournier par ses lettres à la Convention des 5 et 6 octobre 1792 et, comme Fournier réclamait une indemnité pour frais extraordinaires et que toutes les dépenses de l'expédition n'avaient pas été réglées, la Convention, par décret du 9 décembre suivant, vota les crédits nécessaires. Le général de l'expédition d'Orléans se trouva ainsi couvert par l'approbation directe de Roland et par l'approbation indirecte de la Convention.
Malheureusement pour lui, il arriva que le procès-verbal du dép?t qu'il avait effectué à la Commune de Paris fut égaré. Il ne put obtenir qu'une attestation du secrétaire greffier Coulombeau qu'il avait rendu ses comptes[8], mais non un état détaillé. Or, lui-même nous apprend que les plus précieux objets avaient disparu dans l'intervalle. De là les soup?ons, vraisemblablement injustes, dont il fut poursuivi toute sa vie.
[Note 8: Cette attestation, en date du 12 ao?t 1793, se trouve aux Archives, dans les papiers de Fournier.]
Dénoncé et surveillé, il fut l'objet, en mars 1793, d'un rapport de police où il est traité de chevalier d'industrie associé à une coquine, la femme Marthe Fonvielle, dite Pujol, sa ma?tresse, et à une prétendue marquise de Saint-Giran (Voir ses papiers, aux Archives).
Marat ne pouvait lui pardonner d'avoir été protégé par Roland. Dans la séance du 12 mars 1793, il le signala comme étant un des instigateurs de l'insurrection avortée du 10 mars. Fournier fut décrété d'arrestation. Voici le compte rendu officiel de l'interrogatoire qu'il subit le lendemain 13 mars, à la barre de la Convention:
Le citoyen Fournier, qui avait été mis en état d'arrestation, est introduit à la barre. Il demande qu'il lui soit fait part du chef d'accusation articulé contre lui, afin qu'il puisse répondre sur chaque article.
Le citoyen Bourdon (de l'Oise), député,
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