du roi n'étaient mesurés aux voeux de ses peuples et aux besoins de l'état; chacun interrogeait la Charte et regrettait son silence.?
Pour faire ce que n'avait pas fait la Charte, nous avions à nous prononcer entre divers systèmes, tous empressés à se manifester et à réclamer le droit de devenir loi. Selon les uns, ce n'était pas aux Chambres, c'était à la nation elle-même à faire cette loi; au pouvoir constituant seul, et à une assemblée formellement investie de ce pouvoir, il appartenait de résoudre une telle question et d'élire cette royauté temporaire. D'autres, en repoussant le pouvoir constituant, voulaient que la régence f?t, dans chaque occasion, élective et instituée par les pouvoirs parlementaires, en vertu d'une loi spéciale. D'autres, en admettant le principe de la régence élective, demandaient que la régence des femmes f?t aussi admise en principe, et qu'en particulier madame la duchesse d'Orléans en f?t investie, pendant la minorité du prince son fils. Et chacun de ces systèmes invoquait à l'appui de sa prétention, non-seulement des principes généraux, mais des faits puisés soit dans notre propre histoire, soit dans l'histoire des nations civilisées, et des considérations de circonstance suscitées par les intérêts actuels du pays et du gouvernement qu'il avait à coeur de fonder.
La question que nous avions à résoudre était en effet une question de circonstance bien plus que de principe; elle ne nous donnait à appliquer ou à ménager aucune de ces grandes vérités morales, aucun de ces droits préexistants qui règlent, mais aussi qui compliquent la marche d'un pouvoir honnête et sensé. Entre les divers systèmes en présence, la raison politique, c'est-à-dire l'intérêt bien entendu du pays et la juste prévoyance de l'avenir, devait seule nous décider. Pour agir avec cette forte indépendance nous étions dans une situation favorable: nous n'avions pas, comme le parlement d'Angleterre en 1788 et 1810, une régence immédiate à instituer pour remplacer un roi fou et hors d'état d'exercer ses fonctions; point de trouble, point de lacune chez nous au sommet de l'état; les trois grands pouvoirs constitutionnels, la royauté et les deux Chambres étaient parfaitement sains et actifs, assurés d'un loyal concours mutuel, et c'était à l'avenir seul, et probablement à un avenir assez éloigné, qu'ils avaient à pourvoir. Les deux principaux systèmes entre lesquels nous avions à délibérer avaient l'un et l'autre de dignes et rassurants représentants. M. le duc de Nemours, à qui devait appartenir la régence masculine si ce principe prévalait, était un prince exempt de toute mauvaise ambition, profondément dévoué à son frère a?né et à ses neveux: ?Nemours, disait souvent de lui le duc d'Orléans, est le devoir personnifié;? et les Chambres, comme le pays tout entier, pouvaient avoir dans ce prince la même confiance que la famille royale, car il était aussi attaché au régime constitutionnel qu'à ses devoirs envers sa race, aussi plein de respect pour les lois de sa patrie que pour les droits de ses neveux. D'autre part, si la régence féminine était admise, madame la duchesse d'Orléans donnait à la France, à ses libertés comme à son honneur national, toutes les garanties qu'on peut attendre d'une intelligence élevée et d'une ame droite et grande. Il ne nous venait donc, des personnes mêmes, aucun embarras, aucune inquiétude; nous pouvions choisir entre les systèmes avec pleine sécurité dans les mérites et les vertus de leurs représentants.
Ce fut dans cet affranchissement de toute facheuse pression, dans cette entière liberté de résolution comme de pensée et en vue du seul bien futur de l'état que fut préparé le projet de loi présenté le 9 ao?t 1842 à la Chambre des députés. Il était simple et en parfaite harmonie avec les principes fondamentaux de nos institutions. Notre gouvernement était monarchique; la régence fut monarchique aussi, établie d'après une règle fixe et générale qui statuait d'avance. La loi salique était la loi permanente, moderne aussi bien qu'ancienne, de la monarchie fran?aise; elle fut aussi la loi de la régence; le prince le plus proche du tr?ne dans l'ordre de succession en fut investi de droit; mais la garde et la tutelle du roi mineur furent réservées à sa mère; au régent l'administration de l'état, sous la responsabilité de ses ministres; à la mère, sous sa propre responsabilité morale, l'éducation du roi, le soin de sa personne, la direction de sa maison et de ses affaires domestiques. La régence élective et la régence féminine ainsi écartées, la régence devenait selon la loi ce qu'elle était en fait, une royauté temporaire, formée à l'image de la royauté véritable dont elle remplissait momentanément les fonctions, investie de tous les pouvoirs royaux, et en même temps soumise à toutes les conditions de liberté publique, de contr?le et de concours parlementaire instituées par le régime constitutionnel.
La discussion fut l'image vraie et vive, avec convenance et non sans grandeur, de
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