Les loups de Paris | Page 3

Jules Lermina
De lui, plein de vitalit��, d'��nergie, on allait, dans quelques heures, faire un cadavre. Ce coeur qui battait �� pulsations pr��cipit��es s'arr��terait tout �� coup; sous ce front qui pensait se ferait la nuit et le n��ant.... Les deux mains du condamn�� se crispaient lentement l'une contre l'autre... et pourtant pas un soupir ne s'��chappait de sa bouche. Et quiconque aurait pu voir son visage e?t remarqu�� avec surprise que sur ses l��vres il y avait comme un sourire.... Ses yeux fix��s sur les t��n��bres semblaient revoir encore l'apparition qui tout �� l'heure s'��tait dress��e en face de lui.
Mourir! La jeunesse a d'��tranges incr��dulit��s.
Jacques savait qu'il ��tait perdu, et pourtant il doutait encore... et comme si c'e?t ��t�� un mot cabalistique, un nom vint sur ses l��vres:
--Marie! Marie!...
L'horloge de la grosse tour sonna.
Il ��tait dix heures. Encore neuf heures �� vivre.
A ce moment, Jacques entendit un pas s'approcher de son cachot. Une clef fut introduite dans l'��norme serrure, qui grin?a, puis la lourde porte tourna sur ses gonds.
Je ne sais quel espoir fou monta au cerveau de Jacques. Toutes ses ��nergies se concentr��rent dans son regard. Mais sa t��te retomba tristement....
C'��tait un ge?lier, couvert d'un grand manteau qui tombait jusqu'�� ses pieds, le front cach�� sous un bonnet de loutre qui ne laissait apercevoir que deux yeux creux, et une barbe ��paisse encadrant de grosses l��vres.
L'homme avait une lanterne �� la main.
--Que me voulez-vous? demanda brusquement Jacques. Ne puis-je du moins obtenir le repos?
Sans r��pondre, le ge?lier ferma la porte, puis s'approchant de Jacques, il souleva son bonnet, d'o�� s'��chappa une chevelure hirsute, presque sauvage:
--Monsieur de Costebelle, dit-il, me reconnaissez-vous?
Jacques le regarda attentivement.
--Pierre Lamalou! s'��cria-t-il.
--Oui, Pierre Lamalou, dit le ge?lier, qui vous a vu tout petit, pas plus haut que ?a, et qui est d��sesp��r��...
--Mon brave, que veux-tu? c'est la guerre. Je suis le vaincu et je paye ma dette.... J'ai fait mon devoir, comme d'autres le feront apr��s moi...
--Oui, oui, je sais, fit l'homme en secouant tristement la t��te. Ils disent comme ?a que vous ��tes un rebelle et qu'il faut faire un exemple.... Moi, je sais que vous ��tes bon et que vous ne pouvez avoir voulu que le bien.
--Mon ami, reprit Jacques, la sympathie d'un honn��te homme comme toi sera ma meilleure et derni��re consolation.
--Attendez, fit Lamalou.
Il se pencha vers la porte et parut ��couter attentivement au dehors. On n'entendait aucun bruit.
Puis, il se rapprocha de Jacques.
--Voyez-vous, dit-il, j'ai pris un vilain m��tier; mais j'ai femme et enfants... deux enfants... faut vivre.... Je me suis bien souvent reproch�� d'avoir accept�� cette place-l��; mais aujourd'hui je suis bien heureux que la mis��re m'ait pouss�� ici.
--Que veux-tu dire?
--Vous disiez, monsieur Jacques, que les quelques mots que je vous ai dits seraient votre derni��re consolation... Je ne crois pas ?a, parce que je vous en apporte une autre.
--Je ne te comprends pas....
Lamalou ��carta son manteau et prit �� sa ceinture un papier soigneusement pli��.
--Une lettre! s'��cria Jacques, en ��tendant la main.
--Oui, une lettre.
--Qui te l'a remise?
--Une dame, que je crois jeune, quoique je n'aie pas vu sa figure. Elle se cachait sous un voile tr��s-��pais. Elle h��sitait, la pauvre femme. Je voyais bien qu'elle voulait me dire quelque chose. Alors je me suis approch�� d'elle, et je lui ai dit tout bas: ?Je connais M. de Costebelle depuis plus de vingt ans.? J'ai vu que ?a lui faisait plaisir et que ?a lui donnait confiance.... J'ai ajout��: ?Si vous voulez que je lui dise quelque chose de votre part...?--?Non, a-t-elle fait, c'est une lettre.? Oh! je n'ai fait ni une ni deux, je l'ai prise, et la voil��. Maintenant ne perdez pas de temps, lisez vite, car si l'on nous surprenait....
Jacques, immobile, tenait le billet entre ses mains. Tout son corps tremblait. Il semblait qu'il n'e?t pas le courage de briser le cachet. Car cette lettre, c'��tait toute sa vie, tout son pass��, tout ce qui avait ��t�� son bonheur et son esp��rance.
--Allons! allons! monsieur Jacques, insista le ge?lier.
--Tu as raison, fit Jacques. Devant mes juges, j'avais plus de courage.
Il d��chira l'enveloppe.
Lamalou avait lev�� la lanterne et l'��clairait.
Mais �� peine le jeune homme eut-il jet�� les yeux sur le billet qu'il palit et jeta un cri.
--Mon Dieu! mon Dieu! mais c'est horrible, cela!
--Qu'y a-t-il, monsieur Jacques? Comment! est-ce que j'ai mal fait de me charger de la commission?
Mais Jacques ne l'entendait plus. Il lisait, il d��vorait les lignes rapidement trac��es.
Voici ce que contenait ce billet:
?Mon ami, mon fr��re, je suis mourante de douleur et d'angoisse; vous ��tes condamn��! notre p��re a ��t�� impitoyable. Les larmes me suffoquent; �� peine si je puis guider ma main, et cependant il faut que je vous dise.... Mon Dieu! en un pareil moment! Jacques, celle que vous aimez, celle qui s'est donn��e �� vous, Marie enfin.... Marie est m��re! Les angoisses de ces horribles
Continue reading on your phone by scaning this QR Code

 / 126
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.