Les huguenots | Page 5

Charles Alfred de Janzé
donc beau se frotter les mains comme lady Macbeth, pour faire dispara?tre la tache ind��l��bile, ses mains resteront teintes du sang qu'a fait couler son impitoyable doctrine de l'intol��rance.
Les j��suites de robes courtes ou de robes longues, ont toujours pratiqu�� d'ailleurs ce syst��me �� la Ponce Pilate de d��cliner pour l'��glise, la responsabilit�� des mesures de rigueur qu'elle avait provoqu��es. Ainsi, �� l'instigation de son clerg��, Louis XIV ayant d��cr��t�� qu'on enverrait aux gal��res tout huguenot qui tenterait de sortir du royaume, assisterait �� une assembl��e de pri��res, ou, dans une maladie, d��clarerait vouloir mourir dans la religion r��form��e, ainsi que le conte Marteilhe dans ses m��moires, le sup��rieur des missionnaires de Marseille s'efforce de prouver aux for?ats pour la foi que l'��glise n'est pour rien dans leur malheur, qu'ils ne sont pas pers��cut��s pour cause de religion:
�� celui qui a ��t�� mis aux gal��res, pour avoir voulu sortir du royaume, il r��pond: ?Le roi a d��fendu �� ses sujets de sortir du royaume sans sa permission, on vous chatie pour avoir contrevenu aux ordres du roi; cela regarde la police de l'��tat et non l'��glise et la religion.?
�� celui qui a ��t�� arr��t�� dans une assembl��e, il dit: ?Autre contravention aux ordres du roi, qui a d��fendu de s'assembler pour prier Dieu, en aucun lieu que dans les paroisses et autres ��glises du royaume.?
�� celui qui a d��clar�� vouloir mourir protestant, il dit de m��me: ?Encore une contravention aux ordres du roi, qui veut que tous ses sujets vivent et meurent dans la religion romaine.?
Et il conclut: ?Ainsi tous, tant que vous ��tes, vous avez contrevenu aux ordres du roi, l'��glise n'a aucune part �� votre condamnation; elle n'a ni assist��, ni proc��d�� �� votre proc��s, tout s'est pass��, en un mot, hors d'elle et de sa connaissance.?
Pour montrer �� ce bon ap?tre, le sophisme de l'argumentation en vertu de laquelle il voulait persuader aux gal��riens huguenots qu'ils n'��taient point pers��cut��s pour cause de religion, Marteilhe d��clare qu'il consent �� se rendre sur ce point, mais demande si on consentirait �� le faire sortir des gal��res de suite, en attendant que les doutes qui lui restaient ��tant ��claircis, il se d��cidat d'abjurer. -- Non assur��ment, r��pond le missionnaire, vous ne sortirez jamais des gal��res que vous n'ayez fait votre abjuration dans toutes les formes. -- Et si je fais cette abjuration, puis-je esp��rer d'en sortir bient?t? -- Quinze jours apr��s, foi de pr��tre! -- Pour lors, reprend Marteilhe, vous vous ��tes efforc�� par tous vos raisonnements sophistiques de nous prouver que nous n'��tions pas pers��cut��s pour cause de religion, et moi, sans aucune philosophie ni rh��torique, par deux simples et na?ves demandes, je vous fais avouer que c'est la religion qui me tient en gal��res, car vous avez d��cid�� que, si nous faisons abjuration dans les formes, nous en sortirons d'abord; et au contraire qu'il n'y aura jamais de libert�� pour nous si nous n'abjurons.? Les raisonnements sophistiques de ce missionnaire valaient ceux des j��suites qui d��clinent pour l'��glise la responsabilit�� des massacres et des supplices qu'elle a provoqu��s ou ordonn��s.
Pour en revenir �� l'��dit de Nantes; faisant de la tol��rance une loi obligatoire pour les partis religieux, on comprend que cet ��dit ne pouvait ��tre accept�� sans protestation par l'��glise catholique qui professe la doctrine de l'intol��rance.
D��s 1635, l'assembl��e, g��n��rale du clerg�� formulait ainsi son blame: ?Entre toutes les calamit��s, il n'en est pas de plus grande, ni qui ait d? tant avertir et faire conna?tre l'ire de Dieu, que cette libert�� de conscience et permission �� un chacun de croire ce que bon lui semblerait sans ��tre inqui��t�� ni recherch��.?
Et l'assembl��e g��n��rale de 1651 exprimait en ces termes, son regret de ne pouvoir plus fermer violemment la bouche �� l'erreur: ?O�� sont les lois qui bannissent les h��r��tiques du commerce des hommes? O�� sont les constitutions des empereurs Valentinien et Th��odose qui d��clarent l'h��r��sie un crime contre la r��publique??
Mais si l'��glise est invariable dans sa doctrine d'intol��rance, elle se r��signe quand il le faut �� accepter la tol��rance, comme une n��cessit�� de circonstance, et modifiant son langage suivant les exigences du milieu dans lequel elle est appel��e �� vivre, elle dit, comme la chauve-souris de la fable:
Tant?t: je suis oiseau, voyez mes ailes! Tant?t: je suis souris, vivent les rats!
Voici, en effet, la r��gle de conduite opportuniste que l'��v��que de S��gur trace �� l'��glise:
?L'��glise, dit-il, peut se trouver face �� face, soit avec des pouvoirs ennemis, soit avec des pouvoirs indiff��rents, soit avec des pouvoirs amis.
-- Elle dit aux premiers: Pourquoi me frappez-vous? J'ai le droit de vivre, de parler, de remplir ma mission qui est toute de bienfaisance.
-- Elle dit aux seconds; Celui qui n'est point avec moi, est contre moi. Pourquoi traitez-vous le mensonge comme la v��rit��, le mal comme le bien?
-- Elle dit aux
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