Le tour de France en aéroplane | Page 8

Henry de Graffigny
flattés, se mirent à rire.
--Entendu pour le 10 octobre, fit Damblin. Toutefois, rien ne nous
empêche d'ici là, je pense, de nous occuper de nos futurs moyens de
transport pour cette caravane.

--Certainement. Chacun conserve sa pleine liberté et choisira le
système d'aéroplane qui aura ses préférences, répliqua vivement La
Tour-Miranne.
--Est-ce que les dames pourront prendre part au voyage?... questionna
un jeune homme qui jusque-là n'avait rien dit.
--Le Club le décidera. Pour ma part, loin d'y voir un inconvénient, je
pense que nos excursions gagneraient en agrément si nous pouvions y
faire participer nos soeurs et même nos mères. Ces chères présences
modéreraient un peu la fougue et la témérité de ceux d'entre nous qui
voudraient répéter les exploits des Latham et autres, que nous venons
de voir évoluer. Enfin nous en reparlerons. Pour l'instant, notre groupe
demeure compact. Combien sommes-nous de fondateurs de
l'Aéro-tourist-club?...
--Quatorze!... répliqua Médouville.
--Pardon, treize seulement, déclara de sa voix sèche le _Petit
Biscuitier_.
--Comment treize!... Il me semblait pourtant....
--Parce que sans doute vous me comptiez.
--Eh bien?...
--Eh bien! vous avez eu tort.
--Quoi, Réviliod, vous ne voulez plus être des nôtres! demanda La
Tour-Miranne.
--Je n'ai rien fait pour vous laisser supposer que je partageais vos idées,
je crois! Au contraire, je les ai combattues de toutes mes forces et en
toute occasion. En un mot comme en mille, non, je ne crois pas à la
possibilité du tourisme en aéroplane, et comme je ne veux pas me
rendre ridicule, je me sépare de votre groupement qui me semble voué
à tous les déboires...

--Oiseau de mauvais augure!... grommela Damblin.
--Nous aurons donc le regret de rester treize seulement, mon cher
camarade, et j'émets le voeu que ce chiffre nous soit, malgré tout,
favorable.
--C'est ce que nous verrons!... murmura Réviliod entre ses dents.
* * * * *
Cinq semaines plus tard, les treize fondateurs de l'Aéro-tourist-club se
trouvaient rassemblés dans l'un des salons de l'hôtel du duc de La
Tour-Miranne, rue de Babylone, et pour faire les choses dans les règles,
Médouville, qui aimait les usages protocolaires, avait tenu à organiser
le bureau de la nouvelle Société. Derrière une table recouverte d'un
tapis vert foncé, avaient donc pris place les quatre personnages chargés
de veiller aux intérêts de l'entreprise: La Tour-Miranne, président,
flanqué de ses deux acolytes Outremécourt et Breuval. Médouville
occupait un coin avec ses paperasses de secrétaire général.
Les statuts, lus article par article, ayant été discutés et finalement
adoptés, Médouville conclut:
--Voilà donc une chose essentielle terminée. Il ne nous reste plus, pour
être en règle avec la loi, que de déposer ces statuts à la Préfecture, et
cela, j'en fais mon affaire. Occupons-nous donc maintenant de
l'organisation de notre première sortie.
--Du tour de France en aéroplane, ainsi que l'a dit Réviliod, fit en riant
un jeune membre du Club.
--Du Tour de France, parfaitement! affirma La Tour-Miranne.
--Je demande la parole, dit un auditeur.
--Parlez, mon cher camarade.
--Il me semble qu'il conviendra de chercher bientôt un emplacement
pouvant servir de parc à la Société, où nous pourrons remiser nos

appareils et, plus tard, les expérimenter.
--C'est là une chose indispensable, en effet, répondit le jeune président,
mais je crois connaître ce qu'il nous faut. C'est le haras de mon
excellent oncle le prince Muret, dans l'Oise, à moins de dix lieues de
Paris. On peut aménager en aérodrome une partie des prairies et y
agencer les hangars où nous abriterons nos oiseaux mécaniques. Ce
terrain conviendra admirablement pour nos essais, et nous pourrons
nous livrer tranquillement à nos expériences sans crainte d'être
dérangés par des importuns, ni avoir à mobiliser aucune force de police,
comme aux Moulineaux, pour assurer l'ordre. Je ferai ce qu'il
conviendra et vous rendrai compte de mes démarches le moment venu.
[Illustration:]
--Bon. Dans ce cas, nous avons tout l'hiver pour faire construire nos
skis aériens, ajouta Médouville. Pour ma part, je compte commander le
mien à un inventeur de génie que j'ai découvert et que je patronne.
Martin Landoux, tel est son nom. Je vous engage fort, mes chers amis,
à vous adresser également à lui, vous aurez pleine satisfaction.
--Est-ce que tu toucheras une commission sur ces ventes, Médouville?
dit narquoisement, de sa place, Georges Damblin.
--Ce serait plutôt le contraire! murmura Outremécourt qui connaissait le
travers du Mécène. Heureusement que le cousin Lhier est là!...
--Dites-nous, président, demanda Damblin, avez-vous songé à
l'itinéraire que nous suivrons dans notre excursion?...
--Oui, j'en ai causé avec les membres du bureau et nous avons jeté les
grandes lignes du projet. Nous avons au moins six mois devant nous
pour l'étudier dans ses moindres détails.
--A quelle époque de l'année nous mettrons-nous en route?...
--Pas avant le mois de juin prochain au plus tôt. Songez qu'en passant
commande de nos appareils
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