Le roman de la rose | Page 7

G. de Lorris
maltraités de son vivant, ses plus mortels ennemis, les moines Mendiants enfin.

[p. XXVII]?ANALYSE DU ROMAN DE LA ROSE.
Nous allons d'abord faire un résumé sommaire du drame, et à la suite une analyse détaillée de l'oeuvre de chaque poète, pour bien faire comprendre la portée de ces deux ouvrages si singulièrement fondus ensemble et pourtant si différents l'un de l'autre.
ANALYSE SOMMAIRE.

PARTIE DE GUILLAUME DE LORRIS.
C'était en mai. L'_Amant_ (notre poète) s'endort à la fin d'une belle journée de printemps; _il voit_ un songe délicieux. Ce songe, voilà la cha?ne du roman; la trame en est savamment ourdie.
L'_Amant_ tout au matin se lève, s'habille et part s'ébattre dans la campagne. Après avoir erré à l'aventure dans une splendide prairie arrosée par une belle rivière, il se prend à suivre le cours de l'eau, et tout à coup, au détour d'une colline, se trouve en face [p. XXVIII] d'un haut et vaste mur crénelé qui entoure un verger magnifique. Sur ce mur, en dehors, sont peintes des images hideuses. Ce sont d'abord _Haine_ flanquée de _Félonie_ et de _Vilenie_, puis _Convoitise_ c?te à c?te d'_Avarice_, et successivement _Envie, Tristesse, Vieillesse, Papelardie_ et _Pauvreté_. L'_Amant_ contemple ces images et veut pénétrer dans le verger riant, qui n'est autre que la demeure de _Déduit_ ou Plaisir d'Amour. Après avoir cherché quelques instants, il découvre un petit guichet, seul endroit par où ce beau verger soit accessible. Il frappe, et la belle _Oyseuse_ vient lui ouvrir.
Aussit?t entré, celle-ci le conduit au ma?tre de céans. _Déduit_ est là qui _karole_ avec sa gente compagnie. Cette troupe choisie se compose de _Liesse, Dieu d'Amours_ et son serviteur _Doux-Regard, Beauté, Richesse, Largesse, Franchise, Courtoisie, Oyseuse_ et _Jeunesse. Courtoisie_ apercevant notre _Amant_, le vient quérir et le présente à l'Assemblée. Il prend part à la _karole_ et, les danses terminées, se hate de visiter le jardin enchanté. Il s'arrête au bord d'une fontaine, qui n'est autre que la fontaine de Narcisse, et comme lui veut se mirer dans les eaux limpides. Au fond est un miroir magique doué d'une vertu singulière. Tous ceux qui viennent à y jeter les yeux sont soudain tellement épris de ce qu'ils voient, qu'une invincible passion s'empare de leur coeur. L'_Amant_ y admire un magnifique buisson de _Roses_ parmi lesquelles il en choisit une, belle entre toutes, et son coeur est aussit?t br?lé du désir de cueillir la divine fleur. Pendant qu'il la contemple, _Dieu d'Amours_ lui décoche ses flèches. L'_Amant,_ épuisé de ses blessures, tombe pamé. _Dieu d'Amours_ se précipite sur lui, le fait prisonnier, s'empare de son [p. XXIX] coeur en le fermant d'une clef d'or, lui dicte ses commandements et dispara?t.
Aussit?t l'_Amant_ de courir à la belle _Rose_. Mais elle est entourée d'une haie d'épines, et il fait de vains efforts pour atteindre jusqu'à elle. Il n'y serait jamais parvenu peut-être sans _Bel-Accueil_, qui s'offre à lui faire franchir la cl?ture et le mène près de la _Rose_. Mais elle est gardée par _Danger, Honte, Peur_ et _Malebouche. Danger_ dormait; il s'éveille soudain et chasse du jardin le pauvre _Amant_. Celui-ci désolé s'enfuit, et _Raison_, qui a pitié de ses douleurs, vient pour le secourir. Il l'éconduit brutalement sans vouloir écouter ses conseils, et vient chercher des consolations auprès d'_Ami,_ qui le réconforte. ?Retournez, dit _Ami_, vers ce _Danger_; il est moins terrible qu'il n'en a l'air; amadouez-le par de belles paroles, et il vous laissera revoir votre chère _Rose_.? _Danger_ effectivement se radoucit et s'endort. L'_Amant_ en abuse aussit?t et, grace aux bons offices de _Bel-Accueil,_ baise la charmante _Rose_. Mais _Malebouche_ est là qui veille. Tant il jase sur leur compte, qu'enfin _Jalousie_ qui sommeillait s'éveille, vient gourmander l'_Amant,_ et prévient _Bel-Accueil_ qu'elle va faire batir une tour pour l'enfermer. épouvantées de tant de sévérité, _Honte_ et _Peur_ prient _Jalousie_ de pardonner à _Bel-Accueil_, mettant tout sur le compte de sa folle jeunesse. Mais _Jalousie_ ne veut rien entendre. Elle fait batir un chateau-fort flanqué de quatre tourelles, et au milieu une tour où elle fait enfermer _Bel-Accueil_ et les _Roses_. L'_Amant_ pleure et se désespère, et... là se termine la partie de Guillaume de Lorris.

[p. XXX]?PARTIE DE JEHAN DE MEUNG.
L'_Amant_ désespéré parle de mourir, lorsque _Raison_ revient le consoler. Il l'éconduit pour la deuxième fois et retourne trouver _Ami_ qui relève son courage et lui indique le chemin pour entrer au chateau. Mais ce chemin a nom _Trop-Donner,_ et _Richesse_ le garde, qui en a chassé _Pauvreté_, et le chasse à son tour. _Dieu-d'Amours_, le trouvant assez éprouvé, vient alors à son aide. Il lui demande d'abord s'il n'a point oublié ses commandements. L'_Amant_ les lui récite. Satisfait, _Dieu d'Amours_ mande aussit?t toute sa baronnie. C'est assavoir: _Oyseuse, Noblesse de Coeur, Richesse, Franchise, Pitié, Largesse, Courage, Honneur, Courtoisie, Ga?té, Beauté, Jeunesse, Bonté, Simplesse, Compagnie, S?reté, Désir, Déduit, Liesse, Amabilité,
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