Le renard | Page 9

Johann Wolfgang von Goethe
dans les t��n��bres, on s'en trouverait peut-��tre fort mal.? Alors Hinz�� r��pliqua: ?Mais apprenez-moi donc, mon neveu, ce que nous mangerons, si je reste ici?? Reineke dit: ?Nous vivons pauvrement; mais, si vous restez, je vous offrirai des rayons de miel frais, je choisirai les plus dor��s.--Je n'en mange jamais, r��pliqua le chat en grognant. Si vous n'avez rien �� la maison, donnez-moi une souris! avec cela je suis parfaitement trait�� et vous pouvez garder votre miel pour les autres.--Aimez-vous donc tant les souris? dit Reineke. Si vous parlez s��rieusement, je puis vous en procurer. Mon voisin le cur�� a dans sa cour une grange o�� il y a tant de souris, qu'on en remplirait des voitures; j'ai entendu le cur�� se plaindre d'en ��tre ennuy�� nuit et jour.? Sans y songer le chat s'��cria: ?Faites-moi le plaisir de me conduire o�� il y a tant de souris: car je les pr��f��re �� tout le gibier du monde.? Reineke dit: ?Eh bien, vraiment, vous allez faire un fameux souper! Maintenant que je sais votre go?t, ne perdons pas un instant.?
Hinz�� le crut et le suivit; ils arriv��rent �� la grange du cur��. La muraille ��tait de bauge; la veille, Reineke y avait fait un trou, et avait pris, pendant le sommeil du cur��, le plus beau de ses poulets. Martinet, le neveu ch��ri du bon pr��tre voulait en tirer vengeance; il avait adroitement pr��par�� un noeud coulant devant l'ouverture. De cette fa?on il esp��rait se venger de la perte de son poulet sur le voleur, qui ne pouvait manquer de revenir. Reineke, qui s'��tait aper?u du man��ge, dit au chat: ?Mon cher neveu, entrez hardiment par cette ouverture; je monterai la garde au dehors, pendant que vous chasserez aux souris; dans l'obscurit��, vous en prendrez par douzaines. Ah! ��coutez comme elles sifflent gaiement! comme elles babillent! Quand vous en aurez assez, vous n'avez qu'�� revenir; vous me trouverez l��. Il ne faut pas nous s��parer ce soir; car, demain, nous partirons de bonne heure et nous abr��gerons le chemin par de joyeux propos.--Croyez-vous, dit le chat, qu'on puisse entrer l�� en toute s?ret��? car parfois les pr��tres ont de la malice en t��te.?
Alors le rus�� renard r��pliqua: ?Qui peut le savoir! Avez-vous peur? Alors nous nous en retournerons; ma femme vous recevra honorablement, elle vous fera un d?ner agr��able, et, si ce ne sont pas des souris, nous ne le mangerons pas moins de bon coeur.?
�� ces mots ironiques de Reineke, Hinz�� le chat sauta dans le trou et tomba dans le pi��ge. Telle fut l'hospitalit�� que Reineke offrit �� son h?te.
Lorsque Hinz�� se sentit la corde au cou, il tressaillit; la peur le saisit; il se d��mena et bondit avec force: alors le noeud se r��tr��cit. Il appela Reineke d'une voix lamentable; mais lui l'��coutait �� l'autre c?t�� du trou et se r��jouissait malignement; il lui glissa ces paroles dans l'ouverture: ?Hinz��, comment trouvez-vous les souris? Elles sont engraiss��es, je crois. Si Martinet savait seulement que vous mangez de ce gibier, certainement il vous apporterait de la moutarde; c'est un enfant plein d'attentions. Est-ce que l'on chante ainsi �� la cour pendant le d?ner? Je n'aime pas cette musique. Si seulement Isengrin ��tait dans ce trou pris au pi��ge comme vous, il me payerait tout le mal qu'il m'a fait!? Et Reineke s'en alla.
Mais il ne s'en alla pas pour se livrer �� ses voleries ordinaires; pour lui, l'adult��re, le vol, le meurtre et la trahison n'��taient pas des p��ch��s; et il s'��tait mis en t��te une autre aventure. Il voulait visiter la belle Girmonde, dans une double intention. D'abord, il esp��rait apprendre d'elle ce dont Isengrin l'accusait; puis le sc��l��rat voulait renouveler ses vieux p��ch��s. Isengrin ��tait parti pour la cour et il voulait en profiter; car qui en doute? la passion de la louve pour l'infame renard avait allum�� la col��re du loup. Reineke entra dans l'appartement de la dame; elle n'��tait pas �� la maison. ?Bonjour, petits batards,? dit-il, ni plus ni moins, aux enfants en les saluant, et il s'en alla �� ses affaires.
Lorsque dame Girmonde rentra le matin, elle dit: ?Est-ce que personne n'est venu me demander?--Notre parrain Reineke vient de sortir �� l'instant; il avait �� vous parler. Tous, tant que nous sommes ici, il nous a appel��s ses petits batards--Il me le payera!? s'��cria Girmonde. Et vite elle courut se venger de cette injure �� l'instant m��me. Elle savait o�� le trouver; elle l'atteignit et l'apostropha ainsi en col��re: ?Qu'avez-vous dit? quelles sont ces paroles injurieuses que vous avez prononc��es effront��ment devant mes enfants? Vous me le payerez!? Telles furent ses paroles. Elle lui montre un visage enflamm�� de col��re, elle le prend par la barbe; il sent la vigueur de ses dents, se sauve et cherche �� lui ��chapper; elle s'��lance
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