Le marquis de Loc-Ronan | Page 8

Ernest Capendu
de Cormatin. Le troisi��me, M. de Chantereau. Le quatri��me, l'homme au panache et au mouchoir, ��tait le marquis de Jausset, r��cemment arriv�� de l'��migration, et qui n'avait encore pris aucune part aux affaires actives. Il ��tait envoy�� par le comte de Provence. Enfin, en dernier venait Marcof, dont l'oeil intelligent ��changeait souvent avec celui de Boishardy de nombreux signes qui ��chappaient �� leurs interlocuteurs.
La conf��rence touchait �� son terme. MM. de Cormatin et de Chantereau venaient de se lever. Boishardy leur remit �� chacun une feuille de papier sur laquelle se lisaient des caract��res d'impression.
--N'oubliez pas, leur dit-il, de faire placarder ce d��cret partout, c'est un puissant auxiliaire pour notre cause.
--Quel d��cret, mon tr��s cher? demanda le marquis d'une voix gr��le et avec un accent tra?nard qui contrastait ��trangement avec la voix rude et le ton ferme et imp��ratif de Boishardy.
--Le d��cret de la Convention, dont je vous parlais tout �� l'heure.
--Vous plairait-il de le relire?
--Volontiers.
Boishardy ouvrit l'une des feuilles.
--D��cret du 31 juillet 1793, dit-il.
--Mais, interrompit Marcof, si ce d��cret a quatre mois de date, il doit ��tre connu de tous.
--Non pas, capitaine. Ce d��cret porte la date du 31 juillet, mais il para?t qu'il est rest�� longtemps en carton �� Paris, car il n'est arriv�� ici et n'a ��t�� placard�� qu'il y a quinze jours.
--Continuez alors.
Boishardy reprit:
--Je vous fais grace des consid��rants, messieurs. Il y en a deux pages, dans lesquels ces bandits assassins de la Convention nous traitent de brigands, d'aristocrates; j'en arrive aux arr��t��s, les voici:
Arr��tons et d��cr��tons ce qui suit:
?1o Tous les bois, taillis et gen��ts de la Vend��e et de la Bretagne seront livr��s aux flammes;
?2o Les for��ts seront ras��es;
?3o Les r��coltes coup��es et port��es sur les derri��res de l'arm��e;
?4o Les bestiaux saisis;
?5o Les femmes et les enfants enlev��s et conduits dans l'int��rieur;
?6o Les biens des royalistes confisqu��s pour indemniser les patriotes r��fugi��s;
?7o Au premier coup du tocsin, tous les hommes, sans distinction, depuis seize ans jusqu'�� soixante, devront prendre les armes dans les districts limitrophes, sous peine d'��tre d��clar��s tra?tres �� la patrie et trait��s comme tels par tous les bons patriotes.?
Boishardy jeta le papier sur la table.
--Qu'en pensez-vous, messieurs? demanda-t-il; la Convention pouvait-elle mieux agir, et nos gars, en lisant ou en ��coutant les termes de ces articles, ne se d��fendront-ils pas jusqu'�� la mort?
--Sans doute! r��pondit Cormatin.
--Permettez, fit le marquis en s'��ventant gracieusement avec son mouchoir. Tout cela est bel et bon, mais ce n'est pas suffisant. Il faut ��craser la R��publique et remettre sur le tr?ne nos princes l��gitimes.
--C'est ce �� quoi nous tachons, monsieur, dit Chantereau.
--Et vous n'y parviendrez qu'en suivant une autre marche.
--Laquelle? demanda Boishardy en souriant ironiquement.
--Il faut d'abord ��lire des chefs.
--Nous en avons.
--Mais j'entends par chefs des hommes de naissance.
--Douteriez-vous de la mienne?
--Dieu m'en garde, monsieur de Boishardy! Seulement, vous reconna?trez qu'il y a en France des noms au-dessus du v?tre.
--O�� sont-ils, ceux-l��?
--A l'��tranger.
--Eh bien, qu'ils y restent!
--Sans eux vous ne ferez rien de bon, cependant.
--Qu'ils viennent, alors! s'��cria Marcof en frappant sur la table.
--Ils viendront, messieurs, ils viendront!
--Quand il n'y aura plus rien �� faire, n'est-ce pas, monsieur le marquis?
--Vous prenez d'��tranges libert��s, mon cher.
--Marcof a raison, interrompit Boishardy. Nous commen?ons �� ��tre fatigu��s de cette ��migration qui ne fait rien, qui parle sans cesse, et qui, lorsque nous aurons prodigu�� notre sang pour r��tablir la monarchie, viendra, sans nous honorer d'un regard, reprendre les places qu'elle dira lui appartenir! Morbleu! qu'elle les garde donc ces places, ou tout au moins qu'elle les d��fende! Pourquoi a-t-elle pris la fuite, cette ��migration qui doit tout abattre? Est-ce le devoir d'un gentilhomme d'abandonner son roi lorsque le danger menace? R��pondez, monsieur le marquis! Vous pr��tendez que les ��migr��s veulent venir en Bretagne. Qui les en emp��che? qui s'oppose �� leur venue parmi nous? qui les retient de l'autre c?t�� du Rhin, o�� il n'y a rien �� faire? Pourquoi ces retards? Est-ce d'aujourd'hui, d'ailleurs, qu'ils devraient songer �� combattre dans nos rangs et �� donner leur sang comme nous avons donn�� le n?tre? Leur place n'est-elle pas aupr��s de nous? Encore une fois, monsieur, r��pondez!
Boishardy s'arr��ta. Cormatin et Chantereau approuvaient tacitement. Marcof reprit la parole sans laisser le temps au marquis d'articuler un mot.
--Quand monsieur de Jausset a parl�� d'hommes de naissance pour commander, dit-il, il a dirig�� ses regards vers moi.
--Apr��s?... fit d��daigneusement le marquis.
--Je lui demanderai donc ce qu'il avait l'intention de dire.
--C'est fort simple. Il y a ici une confusion de rangs incroyable, vous avez ob��i �� un Cathelineau. Vous avez pour chefs des gens n��s pour pourrir dans les grades inf��rieurs.
--Comme moi, n'est-ce pas?
--Comme vous, mon cher.
Marcof palit. Boishardy voulut s'interposer, le marin l'arr��ta.
--Ne craignez rien, dit-il; je traite les hommes suivant leur valeur, et je ne me fache que contre les gens qui en valent la peine.
Puis, se tournant vers le marquis:
--Monsieur, continua-t-il,
Continue reading on your phone by scaning this QR Code

 / 111
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.