lui... et sans qu'on sache ce qu'il y fait.
-- C'est un conspirateur ou un faux-monnayeur... dit Nini-Moulin en riant.
-- Pauvre cher homme! dit la m��re Ars��ne, o�� serait-elle donc, sa fausse monnaie? il me paye toujours en gros sous le morceau de pain et le radis noir que je lui fournis pour son d��jeuner, quand il d��jeune.
-- Et comment s'appelle ce myst��rieux caduc?... demanda Dumoulin.
-- M. Charlemagne, dit la fruiti��re. Mais tenez... quand on parle du loup on en voit la queue.
-- O�� est-elle donc cette queue?
-- Tenez... ce petit vieux, l��-bas... le long de la maison; il marche le cou de travers avec son parapluie sous son bras.
-- M. Rodin! s'��cria Nini-Moulin; et se reculant brusquement, il descendit en hate trois marches de l'escalier, afin de n'��tre pas vu. Puis il ajouta:
-- Et vous dites que ce monsieur s'appelle?...
-- M. Charlemagne... Est-ce que vous le connaissez? demanda la fruiti��re.
-- Que diable vient-il faire ici sous un faux nom? dit Jacques Dumoulin �� voix basse en se parlant �� lui-m��me.
-- Mais vous le connaissez donc? reprit Rose-Pompon avec impatience. Vous voil�� tout interdit.
-- Et ce monsieur a pour pied-��-terre deux chambres dans cette maison? et il vient myst��rieusement? dit Jacques Dumoulin de plus en plus surpris.
-- Oui, reprit Rose-Pompon, on voit ses fen��tres du colombier de Phil��mon.
-- Vite! vite! passons par l'all��e; qu'il ne me rencontre pas, dit Dumoulin.
Et, sans avoir ��t�� aper?u de Rodin, il passa de la boutique dans l'all��e, et de l'all��e monta l'escalier qui conduisait �� l'appartement occup�� par Rose-Pompon.
-- Bonjour, monsieur Charlemagne, dit la m��re Ars��ne �� Rodin qui s'avan?ait alors sur le seuil de la porte, vous venez deux fois en un jour, �� la bonne heure, car vous ��tes joliment rare.
-- Vous ��tes trop honn��te, ma ch��re dame, dit Rodin avec un salut fort courtois. Et il entra dans la boutique de la fruiti��re.
II. Le r��duit.
La physionomie de Rodin, lorsqu'il ��tait entr�� chez la m��re Ars��ne, respirait la simplicit�� la plus candide; il appuya ses deux mains sur la pomme de son parapluie et lui dit:
-- Je regrette bien, ma ch��re dame, de vous avoir ��veill��e ce matin de tr��s bonne heure...
-- Vous ne venez pas assez souvent, mon digne monsieur, pour que je vous fasse des reproches.
-- Que voulez-vous, ch��re dame! j'habite la campagne, et je ne peux venir que de temps �� autre dans ce pied-��-terre pour y faire mes petites affaires.
-- �� propos de ?a, monsieur, la lettre que vous attendiez hier est arriv��e ce matin; elle est grosse et vient de loin. La voil��, dit la fruiti��re en la tirant de sa poche, elle n'a pas co?t�� de port.
-- Merci, ma ch��re dame, dit Rodin en prenant la lettre avec une indiff��rence apparente; et il la mit dans la poche de c?t�� de sa redingote, qu'il reboutonna ensuite soigneusement.
-- Allez-vous monter chez vous, monsieur?
-- Oui, ma ch��re dame.
-- Alors je vais m'occuper de vos petites provisions, dit m��re Ars��ne. Est-ce toujours comme �� l'ordinaire, mon digne monsieur?
-- Toujours comme �� l'ordinaire.
-- ?a va ��tre pr��t en un clin d'oeil. Ce disant, la fruiti��re prit un vieux panier; apr��s y avoir jet�� trois ou quatre mottes �� br?ler, un petit fagotin de cotrets, quelques morceaux de charbon, elle recouvrit ces combustibles d'une feuille de chou, puis, allant au fond de sa boutique, elle tira d'un bahut un gros pain rond, en coupa une tranche, et choisit ensuite d'un oeil connaisseur un magnifique radis noir parmi plusieurs de ces racines, le divisa en deux, y fit un trou qu'elle remplit de gros sel gris, rajusta les deux morceaux et les pla?a soigneusement aupr��s du pain, sur la feuille de chou qui s��parait les combustibles des comestibles. Prenant enfin �� son fourneau quelques charbons allum��s, elle les mit dans un petit sabot rempli de cendres qu'elle posa aussi dans le panier.
Remontant alors jusqu'�� la derni��re marche de son escalier, la m��re Ars��ne dit �� Rodin:
-- Voici votre panier, monsieur.
-- Mille remerciements, ma ch��re dame, r��pondit Rodin; et plongeant la main dans le gousset de son pantalon, il en tira huit sous qu'il remit un �� un �� la fruiti��re, et lui dit en emportant le panier:
-- Tant?t, en redescendant de chez moi, je vous rendrai, comme d'habitude, votre panier.
-- �� votre service, mon digne monsieur, �� votre service, dit la m��re Ars��ne.
Rodin prit son parapluie sous son bras gauche, souleva de sa main droite le panier de la fruiti��re, entra dans l'all��e obscure, traversa une petite cour, monta d'un pas all��gre jusqu'au second ��tage d'un corps de logis fort d��labr��, puis arriv�� l��, sortant une clef de sa poche, il ouvrit une premi��re porte, qu'ensuite il referma soigneusement sur lui.
La premi��re des deux chambres qu'il occupait ��tait compl��tement d��meubl��e; quant �� la seconde, on ne saurait imaginer un r��duit d'un aspect plus
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