vous ramener dans le bon chemin.
Rendez grâces à Dieu avec moi, de ce qu'après m'avoir donné le talent
de la parole, il a rendu vos coeurs capables d'être touchés et portés au
bien. Il ne vous reste plus qu'à persévérer dans la pratique des vertus et
à ne pas oublier ce que vous avez appris de moi. Quand je serai mort,
mon corps restera avec vous, et mon esprit sera votre intercesseur là où
Dieu le placera, et il ne cessera jamais de vous faire tout le bien qui
sera en son pouvoir. Je vous le promets, pourvu que vous ne vous
écartiez pas de ce que je vous ai enseigné.»
Ces paroles étaient prononcées le 25 mars 1419; dix jours après, le 5
avril, saint Vincent Ferrier rendait son âme à Dieu. Son corps fut
solennellement déposé dans le choeur de l'église cathédrale de Vannes,
où il fit un si grand nombre de miracles, que le pape Calixte III n'hésita
pas à le mettre au nombre des saints dès le 19 juin de l'année 1455;
cependant la bulle de la canonisation ne fut expédiée que sous le
pontificat de Pie II, son successeur, l'an 1458, le 7 octobre.
Les habitants de Vannes se sont vus plus d'une fois exposés au danger
de perdre le corps de saint Vincent. Vers le milieu du seizième siècle,
des troupes espagnoles, envoyées par Philippe II, ayant protégé
efficacement la ville contre les efforts des hérétiques, le Chapitre de la
cathédrale voulut témoigner au chef don Juan d'Aguilar sa
reconnaissance, et lui offrit un fragment considérable des reliques de
son compatriote. Mais les soldats formèrent le complot d'enlever le
corps tout entier. Heureusement les chanoines furent avertis à temps; ils
cachèrent donc eux-mêmes, pendant la nuit, la châsse qui contenait le
corps de saint Vincent, et ils le firent avec tant de secret que cette
châsse demeura inconnue et comme ensevelie dans l'oubli depuis l'an
1590 jusqu'en 1637. À cette époque, elle fut découverte par l'évêque de
Vannes, Sébastien de Rosmadec. Les saintes reliques furent vérifiées
très exactement, et l'on en fit une seconde translation le 6 septembre,
jour dès lors consacré pour en renouveler la mémoire tous les ans. Ce
grand saint, qui a fait plus de huit cents miracles authentiques,
rapportés au procès de sa canonisation, était né à Valence en 1357.
Dès l'âge de dix-sept ans il entra dans l'ordre des Dominicains et se fit
une telle réputation qu'on venait pour l'entendre de tous les points de
l'Espagne. Plusieurs princes étrangers l'appelèrent à eux, et c'est ainsi
qu'il vint en France, en Angleterre, en Allemagne et enfin en Bretagne
sur les instances du duc Jean V, qui lui mandait de venir en hâte dans
ses États, jeter les semences de la divine parole, qu'il avait déjà portée
en tant d'autres lieux. Il y vint, en effet, vivant d'austérités et de
mortifications et convertissant les peuples, il y demeura jusqu'au jour
où il rendit son esprit à Dieu, assisté de son évêque, Amaury de la
Motte, et entouré des hauts dignitaires du pays. Sa mort fut un deuil
général: grands et petits, riches et pauvres, tout le monde pleurait. On
visite encore aujourd'hui l'appartement où il a vécu, transformé en
modeste oratoire, et où l'on a toutes les peines du monde à pénétrer[1].
La clef de ce simple réduit se trouve chez un pâtissier, ce qui lui fait
vendre ses gâteaux et le verre d'eau sucrée qui les accompagne,
autrement cela ne lui arriverait pas souvent, j'en réponds. Il vous sert de
l'eau chaude et trouble dans des verres douteux, et ses pâtisseries sont
assiégées de mouches, on y découvre même des fourmis, et pendant le
premier moment d'hésitation qui détourne votre main de ces gâteaux si
peu engageants, l'honnête marchand vous dit de l'air le plus tranquille:
«Faites pas attention, ce n'est rien, faites comme moi, soufflez dessus»,
et son haleine plus ou moins fraîche se promène en éventant tout le
comptoir. Trop primitif vraiment, ce bon indigène vannetais[2].
J'ai visité plusieurs églises, qui ne m'ont rien dit de particulier, mais je
me suis arrêtée à Saint-Patern, un vieux monument où l'on ne prêche
qu'en breton, et à la chapelle de Monseigneur, style grec pur, dont la
sévérité, tempérée par quelques beaux tableaux, me plaît beaucoup.
Nous avons ensuite fait un tour sur la Rabine, promenade qui longe la
rivière, et où les élégantes se donnent rendez-vous les jours de musique.
Vannes était jadis une ville forte, entourée de fossés profonds et de
hautes murailles dont il reste encore quelques vestiges. L'intérieur de
cette vieille cité, que les Bretons nomment toujours Gwened, garde
encore aujourd'hui des rues rappelant l'ancienne Rome que l'empereur
de monstrueuse mémoire fit brûler pendant une fête. On a prétendu que
ces ordres furent donnés par lui sous prétexte
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