Le gorille | Page 6

Oscar Méténier
kal��idoscope! dit le comte ��vasivement.
--Elle vous ressemble un peu, cette gracieuse figure, insista Blanche.
--Flatteur pour moi! balbutia Paul, en s'inclinant d'un air distrait. Ce visage o�� pas une ride ... tandis que le mien....
Il n'acheva point.
--Mon ami, dit, un kilom��tre plus loin, la pauvre comtesse, il y a de chacun de nous une histoire que nous savons seuls, et que nous oublions m��me quelquefois.
--Oui, r��pliqua Paul; cette remarque, qui est, je crois, d'Alphonse Karr, pourrait ��tre de vous, qui avez, dans l'occasion, tant de verve et d'humour,
--Merci, mon ami. Eh bien! je me figure qu'il existe de vous une histoire in��dite, ant��rieure �� moi, et dont vous me faites myst��re depuis quelques vingt ans.
--Une seule histoire serait trop peu, ma ch��re Blanche. Moi, je parie pour la demi-douzaine, sans avoir pris le temps de les compter avant de vous r��pondre. Que de folies s'accomplissent pour un jeune homme, entre vingt et vingt-cinq ans! Mais tout cela tiendrait aujourd'hui dans la paume de la main.
--Y compris le sang des blessures et les cendres des souvenirs?
--Le sang des blessures! r��p��ta Paul avec une feinte ironie. Il faudrait savoir d'abord si les blessures de cette ��poque de la vie rendent beaucoup de sang!
--La cicatrice que vous portez au menton, mon ami, et que vous attribuez �� un accident de chasse, pourrait bien....
--Non, r��pondit le comte avec une s��v��rit�� triste mais d��cisive, non! Absolument rien de romanesque de ce c?t��! Tournez hardiment la page, cette blessure n'��tait qu'une blessure b��te!
Mme de Breuilly se mordit les l��vres et ne parla plus.
Au, bout d'un moment, Paul, craignant d'avoir afflig�� Blanche par un peu de brusquerie, renoua la conversation sur un sujet diff��rent. Il parla musique avec un int��r��t qui gagna la comtesse, et elle finit par ne plus ressentir l'acuit�� du trait que le regard de la jeune inconnue lui avait d��coch��. En se retrouvant dans son salon sans avoir eu �� s'affliger, ce jour-l��, de l'absence de son mari, elle s'approcha de son piano, l'ouvrit et elle chercha sur le clavier la phrase musicale dont elle avait eu la r��v��lation, un matin que Paul jouait du violon apr��s des ann��es de silence.
On ne sait ni pourquoi une phrase musicale rentre dans la m��moire, ni Pourquoi elle en sort; C'est de sa promenade au bois que Blanche avait rapport�� cette musique. Elle l'essaya, la retrouva, et le r��sultat fut qu'en m��me temps, ou presque en m��me temps, Paul reprit son archet et joua du commencement �� la fin, non plus une phrase d��tach��e, mais tout le morceau, parfaitement nouveau pour la comtesse. Elle se tut, pour bien ��couter, et, cette fois, retenir le chef-d'?uvre inconnu.
C'en ��tait un, sans nom d'auteur, mais �� la composition duquel le g��nie Allemand avait d? pr��sider.
Blanche se leva, ouvrit la porte du salon, qui donnait dans le cabinet de son mari, et elle lui dit:
--Quelle est donc cette musique que nous jouons tous les deux sans nous ��tre concert��s?
--J'ai entendu cela �� Dresde, il y a vingt-cinq ans; un duo pour violon et clavecin, comme on disait encore dans la soci��t�� fran?aise de ce pays-l��. Et vous, Blanche, vous la connaissez sans doute pour me l'avoir entendu fredonner?
--Si vous saviez, mon ami, o�� trouver cette musique, nous pourrions l'��tudier ensemble, puisque vous l'aimez.
--Je m'en informerai, r��pliqua M. de Breuilly.
Mais, du ton m��me dont il fit cette r��ponse, Blanche inf��ra qu'il ��tait r��solu �� ne pas s'en occuper. Elle pensa qu'il ex��cutait ce duo avec une autre musicienne qu'elle, et peut-��tre ... rue d'Anjou-Saint-Honor��.
--��tes-vous bien s?r, Paul, reprit-elle, avec un triste sourire, d'aimer encore �� faire de la musique avec moi?
--Et vous, ma ch��re Blanche, ��tes-vous bien s?re de ne pas exiger de moi, depuis quelque temps, la d��monstration ext��rieure de sentiments qui, chez moi, pour ��tre plus latents, n'en sont que plus profonds? Nous avons travers�� de si grandes peines, que nous sommes excusables d'��tre un peu moins alertes qu'aux beaux jours.
--Le coeur des femmes est ainsi fait, interrompt la comtesse, qu'elles veulent tout avoir, dans ce moment supr��me o�� elles sentent que tout va leur ��chapper.
--C'est un cri du fond de ton ame, Blanche, r��pondit Paul en allant �� elle et la pressant dans ses bras. Pauvre enfant, que crains-tu de perdre encore? D'o�� vient la f��brile appr��hension qui te ronge? De qui donc ou de quoi donc te sens-tu jalouse? L'��tais-tu de nos pauvres enfants, quand tu me voyais les adorer! Le serais-tu d'un troisi��me enfant, si Dieu nous l'accordait encore? Et toi-m��me, l'aimerais-tu moins que moi?
--Oui, naturellement, s'il ��tait l'enfant, d'une autre m��re! Mais, que parlez-vous d'un troisi��me enfant? Vous savez, h��las! tout comme moi, que je n'en aurai plus... Seulement, la pr��dilection pseudo-paternelle, l'adoption est quelquefois une tentation de votre age, Paul.
--Oui, tr��s forte! r��pondit loyalement le comte. Mais je sens bien par ce que vous venez
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