Le din dEpicure | Page 7

Anatole France
o�� ses lecteurs n'allaient point, car c'��taient de vieux Byzantins blanchis au fond de leur palais, au milieu de f��roces mosa?ques ou derri��re le comptoir sur lequel ils avaient amass�� de grandes richesses. Afin d'��gayer ces vieillards mornes, le conteur leur montra deux beaux enfants. Et pour qu'on ne confondit point son Daphnis et sa Chlo�� avec les petits polissons et les fillettes vicieuses qui foisonnent sur le pav des grandes villes, il prit soin de dire: ?Ceux dont je vous parle vivaient autrefois �� Lesbos, et leur histoire fut peinte dans un bois consacr�� aux Nymphes.? Il prenait l'utile pr��caution que toutes les bonnes femmes ne manquent jamais de prendre avant de faire un conte, quand elles disent: ?Au temps que Berthe filait.? ou: ?Quand les b��tes parlaient.
Si l'on veut nous dire une belle histoire, il faut bien sortir un peu de l'exp��rience et de l'usage.

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Nous mettons l'infini dans l'amour. Ce n'est pas la faute des femmes.

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Je ne crois pas que douze cents personnes assembl��es pour entendre une pi��ce de th��atre forment un concile inspir�� par la sagesse ��ternelle; mais le public, ce me semble, apporte ordinairement au spectacle une na?vet�� de coeur et une sinc��rit d'esprit qui donnent quelque valeur au sentiment qu'il ��prouve. Bien des gens �� qui il est impossible de se faire une id��e de ce qu'ils ont lu sont en ��tat de rendre un compte assez exact de ce qu'ils ont vu repr��sent��. Quand on lit un livre, on le lit comme on veut, on en lit ou plut?t on y lit ce qu'on veut. Le livre laisse tout �� faire �� l'imagination. Aussi les esprits rudes et communs n'y prennent-ils pour la plupart qu'un pale et froid plaisir. Le th��atre au contraire fait tout voir et dispense de rien imaginer. C'est pourquoi il contente le plus grand nombre. C'est aussi pourquoi il pla?t m��diocrement aux esprits r��veurs et m��ditatifs. Ceux-l�� n'aiment les id��es que pour le prolongement qu'ils leur donnent et pour l'��cho m��lodieux qu'elles ��veillent en eux-m��mes. Ils n'ont que faire dans un th��atre et pr��f��rent au plaisir passif du spectacle la joie active de la lecture. Qu'est-ce qu'un livre? Une suite de petits signes. Rien de plus. C'est au lecteur �� tirer lui-m��me les formes, les couleurs et les sentiments auxquels ces signes correspondent. Il d��pendra de lui que ce livre soit terne ou brillant, ardent ou glac��. Je dirai, si vous pr��f��rez, que chaque mot d'un livre est un doigt myst��rieux, qui effleure une fibre de notre cerveau comme la corde d'une harpe et ��veille ainsi une note dans notre ame sonore. En vain la main de l'artiste sera inspir��e et savante. Le son qu'elle rendra d��pend de la qualit�� de nos cordes intimes. Il n'en est pas tout �� fait de m��me du th��atre. Les petits signes noirs y sont remplac��s par des images vivantes. Aux fins caract��res d'imprimerie qui laissent tant �� deviner sont substitu��s des hommes et des femmes, qui n'ont rien de vague ni de myst��rieux. Le tout est exactement d��termin��. Il en r��sulte que les impressions re?ues par les spectateurs sont aussi peu dissemblables que possible, en ��gard �� la fatale diversit�� des sentiments humains. Aussi voit-on, dans toutes les repr��sentations (que des querelles litt��raires ou politiques ne troublent point), une v��ritable sympathie s'��tablir entre tous les assistants. Si l'on consid��re, d'ailleurs, que le th��atre est l'art qui s'��loigne le moins de la vie, on reconna?tra qu'il est le plus facile �� comprendre et �� sentir et l'on en conclura que c'est celui sur lequel le public est le mieux d'accord et se trompe le moins.

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Que la mort nous fasse p��rir tout entiers, je n'y contredis point. Cela est fort possible. En ce cas, il ne faut pas la craindre:
Je suis, elle n'est pas; elle est, je ne suis plus.
Mais si, tout en nous frappant, elle nous laisse subsister, soyez bien s?rs que nous nous retrouverons au del�� du tombeau tels absolument que nous ��tions sur la terre. Nous en serons sans doute fort penauds. Cette id��e est de nature �� nous gater par avance le paradis et l'enfer.
Elle nous ?te toute esp��rance, car ce que nous souhaitons le plus, c'est de devenir tout autres que nous ne sommes. Mais cela nous est bien d��fendu.

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Il y a un petit livre allemand qui s'appelle: Notes �� ajouter au livre de la vie, et qui est sign�� Gerhard d'Amyntor, livre assez vrai et par cons��quent assez triste, o�� l'on voit d��crite la condition ordinaire des femmes. ?C'est dans les soucis quotidiens que la m��re de famille perd sa fra?cheur et sa force et se consume jusqu'�� la moelle de ses os. L'��ternel retour de la question: ?Que faut-il faire cuire aujourd'hui?? l'incessante n��cessit�� de balayer le plancher, de battre,
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