la queue.)
ACTE I, SCÈNE VII
LES MÊMES, LE COMMANDANT suivi de JOSEPH, qui porte sa
valise
LE COMMANDANT.--Tu m'entends[1] bien?
JOSEPH.--Oui, mon commandant.
LE COMMANDANT.--Tu diras à Anita que tout est fini... bien fini.
JOSEPH.--Oui, mon commandant.
LE COMMANDANT.--Et si elle demande où je suis... quand je
reviendrai... tu répondras que tu n'en sais rien... Je ne veux plus
entendre parler d'elle.
JOSEPH.--Oui, mon commandant.
PERRICHON.--J'ai mes billets!... vite! à mes bagages! Quel mètier que
d'aller à Lyon! (Il sort en courant.)
LE COMMANDANT.--Tu m'as bien compris?
JOSEPH.--Sauf votre respect[2], mon commandant, c'est bien inutile de
partir.
LE COMMANDANT.--Pourquoi?
JOSEPH.--Parce qu'à son retour, mon commandant redeviendra
amoureux de mademoiselle Anita.
LE COMMANDANT.--Oh!
JOSEPH.--Alors, autant vaudrait[3] ne pas la quitter; les
raccommodements coûtent toujours quelque chose à mon commandant.
LE COMMANDANT.--Ah! cette fois, c'est sérieux!
JOSEPH.--Adieu, mon commandant.
LE COMMANDANT s'approche du guichet et revient.--Ah! tu
m'écriras à Genève, poste restante... tu me donneras des nouvelles de...
ta santé...
JOSEPH, flatté.--Mon commandant est bien bon!
LE COMMANDANT.--Et puis, tu me diras si l'on[4] a eu du chagrin
en apprenant mon départ... si l'on a pleuré...
JOSEPH.--Qui ça, mon commandant?...
LE COMMANDANT.--Eh parbleu! elle! Anita!
JOSEPH.--Vous vous réconcilierez avec elle, mon commandant!
LE COMMANDANT.--Jamais!
JOSEPH.--Ça fera la huitième fois.
LE COMMANDANT.--Allons, c'est bien[5]! donne-moi ma valise, et
écris-moi à Genève... demain ou ce soir! bon jour!
JOSEPH.--Bon voyage, mon commandant! (A part.) Il sera revenu
avant huit jours! O les femmes!... et les hommes!... (Il sort.--Le
Commandant va prendre son billet et entre dans la salle d'attente.)
ACTE I, SCÈNE VIII
MADAME PERRICHON, HENRIETTE, puis PERRICHON, UN
FACTEUR
MADAME PERRICHON, se levant avec sa fille.--Je suis lasse d'être
assise!
PERRICHON, entrant en courant.--Enfin! c'est fini! j'ai mon
bulletin[1]! je suis enregistré!
MADAME PERRICHON.--Ce n'est pas malheureux[2]!
LE FACTEUR, poussant son chariot vide, à Perrichon.--Monsieur...
n'oubliez pas le facteur, s'il vous plaît...
PERRICHON.--Ah! oui... Attendez... (Se concertant avec sa femme et
sa fille.) Qu'est-ce qu'il faut lui donner à celui-là, dix sous?...
MADAME PERRICHON.--Quinze.
HENRIETTE.--Vingt.
PERRICHON.--Allons... va pour[3] vingt sous! (Les lui donnant.)
Tenez, mon garçon.
LE FACTEUR.--Merci, monsieur! (Il sort.)
MADAME PERRICHON.--Entrons-nous?
PERRICHON.--Un instant... Henriette, prends ton carnet et écris.
MADAME PERRICHON.--Déjà!
PERRICHON, dictant.--Dépenses: fiacre, deux francs... chemin de fer,
cent soixante-douze francs cinq centimes... facteur, un franc.
HENRIETTE.--C'est fait.
PERRICHON.--Attends! impression[4]!
MADAME PERRICHON, à part.--Il est insupportable!
PERRICHON, dictant.--Adieu, France... reine des nations!
(S'interrompant.) Eh bien! et mon panama?... je l'aurai laissé[5] aux
bagages! (Il veut courir.)
MADAME PERRICHON.--Mais non, le voici!
PERRICHON.--Ah! oui. (Dictant.) Adieu, France! reine des nations[6]!
(On entend la cloche et l'on voit accourir plusieurs voyageurs.)
MADAME PERRICHON.--Le signal! tu vas nous faire manquer le
convoi!
PERRICHON.--Entrons, nous finirons cela plus tard! (L'employé
l'arrête à la barrière pour voir les billets, Perrichon querelle sa femme,
et sa fille finit par trouver les billets dans sa[7] poche. Ils entrent dans
la salle d'attente.)
ACTE I, SCÈNE IX
ARMAND, DANIEL, puis PERRICHON
Daniel, qui vient de prendre son billet, est heurté par Armand qui veut
prendre le sien
ARMAND.--Prenez donc garde!
DANIEL.--Faites attention vous-même!
ARMAND.--Daniel!
DANIEL.--Armand!
ARMAND.--Vous partez?
DANIEL.--A l'instant! et vous?
ARMAND.--Moi aussi!
DANIEL.--C'est charmant! nous ferons route ensemble! j'ai des cigares
de première classe... et où allez-vous?
ARMAND.--Ma foi, mon cher ami, je n'en sais rien encore.
DANIEL.--Tiens! c'est bizarre! ni moi non plus! J'ai pris un billet
jusqu'à Lyon.
ARMAND.--Vraiment? moi aussi! je me dispose à suivre une
demoiselle charmante.
DANIEL.--Tiens! moi aussi.
ARMAND.--La fille d'un carrossier!
DANIEL.--Perrichon?
ARMAND.--Perrichon!
DANIEL.--C'est la même!
ARMAND.--Mais je l'aime, mon cher Daniel.
DANIEL.--Je l'aime également, mon cher Armand.
ARMAND.--Je veux l'épouser!
DANIEL.--Moi, je veux la demander en mariage... ce qui est à peu près
la même chose.
ARMAND.--Mais nous ne pouvons l'épouser tous les deux!
DANIEL.--En France, c'est défendu.
ARMAND.--Que faire?
DANIEL.--C'est bien simple! puisque nous sommes sur le marchepied
du wagon, continuons gaiement notre voyage... cherchons à plaire... à
nous faire aimer[1], chacun de notre côté!
ARMAND, riant.--Alors, c'est un concours!... un tournoi!...
DANIEL.--Une lutte loyale... et amicale... Si vous êtes vainqueur... je
m'inclinerai... si je l'emporte, vous ne me tiendrez pas rancune! Est-ce
dit?
ARMAND.--Soit! j'accepte.
DANIEL.--La main, avant la bataille?
ARMAND.--Et la main après. (Ils se donnent la main.)
PERRICHON, entrant en courant, à la cantonade.--Je te dis que j'ai le
temps!
DANIEL.--Tiens! notre beau-père!
PERRICHON, à la marchande de livres.--Madame, je voudrais un livre
pour ma femme et ma fille... un livre qui ne parle ni de galanterie, ni
d'argent, ni de politique, ni de mariage, ni de mort.
DANIEL, à part.--Robinson Crusoé!
LA MARCHANDE.--Monsieur, j'ai votre affaire[2]. (Elle lui remet un
volume.)
PERRICHON, lisant.--Les Bords de la Saône[3]: deux francs! (Payant.)
Vous me jurez qu'il n'y a pas de bêtises[4] là-dedans? (On entend la
cloche.) Ah diable! Bonjour, madame. (Il sort en courant.)
ARMAND.--Suivons-le!
DANIEL.--Suivons! C'est égal[5], je voudrais bien savoir où nous
allons?... (On voit courir
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