a pleuré...
JOSEPH.--Qui ?a, mon commandant?...
LE COMMANDANT.--Eh parbleu! elle! Anita!
JOSEPH.--Vous vous réconcilierez avec elle, mon commandant!
LE COMMANDANT.--Jamais!
JOSEPH.--?a fera la huitième fois.
LE COMMANDANT.--Allons, c'est bien[5]! donne-moi ma valise, et écris-moi à Genève... demain ou ce soir! bon jour!
JOSEPH.--Bon voyage, mon commandant! (A part.) Il sera revenu avant huit jours! O les femmes!... et les hommes!... (Il sort.--Le Commandant va prendre son billet et entre dans la salle d'attente.)
ACTE I, SCèNE VIII
MADAME PERRICHON, HENRIETTE, puis PERRICHON, UN FACTEUR
MADAME PERRICHON, se levant avec sa fille.--Je suis lasse d'être assise!
PERRICHON, entrant en courant.--Enfin! c'est fini! j'ai mon bulletin[1]! je suis enregistré!
MADAME PERRICHON.--Ce n'est pas malheureux[2]!
LE FACTEUR, poussant son chariot vide, à Perrichon.--Monsieur... n'oubliez pas le facteur, s'il vous pla?t...
PERRICHON.--Ah! oui... Attendez... (Se concertant avec sa femme et sa fille.) Qu'est-ce qu'il faut lui donner à celui-là, dix sous?...
MADAME PERRICHON.--Quinze.
HENRIETTE.--Vingt.
PERRICHON.--Allons... va pour[3] vingt sous! (Les lui donnant.) Tenez, mon gar?on.
LE FACTEUR.--Merci, monsieur! (Il sort.)
MADAME PERRICHON.--Entrons-nous?
PERRICHON.--Un instant... Henriette, prends ton carnet et écris.
MADAME PERRICHON.--Déjà!
PERRICHON, dictant.--Dépenses: fiacre, deux francs... chemin de fer, cent soixante-douze francs cinq centimes... facteur, un franc.
HENRIETTE.--C'est fait.
PERRICHON.--Attends! impression[4]!
MADAME PERRICHON, à part.--Il est insupportable!
PERRICHON, dictant.--Adieu, France... reine des nations! (S'interrompant.) Eh bien! et mon panama?... je l'aurai laissé[5] aux bagages! (Il veut courir.)
MADAME PERRICHON.--Mais non, le voici!
PERRICHON.--Ah! oui. (Dictant.) Adieu, France! reine des nations[6]! (On entend la cloche et l'on voit accourir plusieurs voyageurs.)
MADAME PERRICHON.--Le signal! tu vas nous faire manquer le convoi!
PERRICHON.--Entrons, nous finirons cela plus tard! (L'employé l'arrête à la barrière pour voir les billets, Perrichon querelle sa femme, et sa fille finit par trouver les billets dans sa[7] poche. Ils entrent dans la salle d'attente.)
ACTE I, SCèNE IX
ARMAND, DANIEL, puis PERRICHON
Daniel, qui vient de prendre son billet, est heurté par Armand qui veut prendre le sien
ARMAND.--Prenez donc garde!
DANIEL.--Faites attention vous-même!
ARMAND.--Daniel!
DANIEL.--Armand!
ARMAND.--Vous partez?
DANIEL.--A l'instant! et vous?
ARMAND.--Moi aussi!
DANIEL.--C'est charmant! nous ferons route ensemble! j'ai des cigares de première classe... et où allez-vous?
ARMAND.--Ma foi, mon cher ami, je n'en sais rien encore.
DANIEL.--Tiens! c'est bizarre! ni moi non plus! J'ai pris un billet jusqu'à Lyon.
ARMAND.--Vraiment? moi aussi! je me dispose à suivre une demoiselle charmante.
DANIEL.--Tiens! moi aussi.
ARMAND.--La fille d'un carrossier!
DANIEL.--Perrichon?
ARMAND.--Perrichon!
DANIEL.--C'est la même!
ARMAND.--Mais je l'aime, mon cher Daniel.
DANIEL.--Je l'aime également, mon cher Armand.
ARMAND.--Je veux l'épouser!
DANIEL.--Moi, je veux la demander en mariage... ce qui est à peu près la même chose.
ARMAND.--Mais nous ne pouvons l'épouser tous les deux!
DANIEL.--En France, c'est défendu.
ARMAND.--Que faire?
DANIEL.--C'est bien simple! puisque nous sommes sur le marchepied du wagon, continuons gaiement notre voyage... cherchons à plaire... à nous faire aimer[1], chacun de notre c?té!
ARMAND, riant.--Alors, c'est un concours!... un tournoi!...
DANIEL.--Une lutte loyale... et amicale... Si vous êtes vainqueur... je m'inclinerai... si je l'emporte, vous ne me tiendrez pas rancune! Est-ce dit?
ARMAND.--Soit! j'accepte.
DANIEL.--La main, avant la bataille?
ARMAND.--Et la main après. (Ils se donnent la main.)
PERRICHON, entrant en courant, à la cantonade.--Je te dis que j'ai le temps!
DANIEL.--Tiens! notre beau-père!
PERRICHON, à la marchande de livres.--Madame, je voudrais un livre pour ma femme et ma fille... un livre qui ne parle ni de galanterie, ni d'argent, ni de politique, ni de mariage, ni de mort.
DANIEL, à part.--Robinson Crusoé!
LA MARCHANDE.--Monsieur, j'ai votre affaire[2]. (Elle lui remet un volume.)
PERRICHON, lisant.--Les Bords de la Sa?ne[3]: deux francs! (Payant.) Vous me jurez qu'il n'y a pas de bêtises[4] là-dedans? (On entend la cloche.) Ah diable! Bonjour, madame. (Il sort en courant.)
ARMAND.--Suivons-le!
DANIEL.--Suivons! C'est égal[5], je voudrais bien savoir où nous allons?... (On voit courir plusieurs voyageurs.--Tableau[6].)
ACTE DEUXIèME
Un intérieur d'auberge au Montanvert[1], près de la mer de Glace.--Au fond, à droite, porte d'entrée; au fond, à gauche, fenêtre; vue de montagnes couvertes de neige; à gauche, porte et cheminée haute. --Table; à droite, table où est le livre des voyageurs, et porte.
SCèNE PREMIèRE
ARMAND, DANIEL, L'AUBERGISTE, UN GUIDE
Daniel et Armand sont assis à une table et déjeunent
L'AUBERGISTE.--Ces messieurs[2] prendront-ils autre chose?
DANIEL.--Tout à l'heure... du café.
ARMAND.--Faites manger le guide; après, nous partirons pour la mer de Glace.
L'AUBERGISTE.--Venez, guide. (Il sort, suivi du guide, par la droite.)
DANIEL.--Eh bien! mon cher Armand?
ARMAND.--Eh bien! mon cher Daniel?
DANIEL.--Les opérations[3] sont engagées, nous avons commencé l'attaque.
ARMAND.--Notre premier soin a été de nous introduire dans le même wagon[4] que la famille Perrichon; le papa avait déjà mis sa calotte.
DANIEL.--Nous les avons bombardés de prévenances, de petits soins[5].
ARMAND.--Vous avez prêté votre journal à monsieur Perrichon, qui a dormi dessus... En échange, il vous a offert les Bords de la Sa?ne... un livre avec des images.
DANIEL.--Et vous, à partir de Dijon[6], vous avez tenu un store dont la mécanique[7] était dérangée; ?a a d? vous fatiguer.
ARMAND.--Oui, mais la maman m'a comblé de pastilles de chocolat.
DANIEL.--Gourmand!... vous vous êtes fait nourrir[8].
ARMAND.--A Lyon, nous descendons au même h?tel...
DANIEL.--Et le papa, en nous retrouvant, s'écrie: Ah! quel heureux hasard!...
ARMAND.--A Genève, même rencontre... imprévue...
DANIEL.--A Chamouny[9], même situation; et le Perrichon de s'écrier toujours: Ah! quel heureux hasard!...
ARMAND.--Hier soir, vous apprenez que la famille se dispose à venir voir la mer de Glace, et vous venez me chercher dans ma
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