toutes les remarques curieuses qui
pourraient être faites par nous et par tout le monde.
* * * * *
II
=SOMMAIRE=
Grande, moyenne et petite classe des Refusés.--Les braves.--Les
suspects.--Les poltrons.--On demande les têtes des suspects.--Messieurs,
le maître-peintre Courbet!--Évidence de sa
supériorité.--Parenthèse.--Encore le critique d'art.--Paysages de M.
Daubigny en plusieurs chants.--Hautes opinions de Courbet à propos de
la peinture.--Révolution-Courbet.--Ornithologie des critiques d'art.--Ce
qu'ils avaient sur les yeux.--Réalisme et Romantisme.--Haro sur le
maître-peintre!--Les bons curés, tels que les voulait Béranger et que ne
les veut pas M. Veuillot.--Exposition du Refusé en chef.--Peinture à
l'encre ou description.--Conclusion raisonnée.
* * * * *
Les Refusés peuvent être divisés en trois classes:
La première, la grande, est celle des Oseurs, des Révoltés, des
Protestants contre les jurys, une Batterie des hommes sans peur; c'est
pour ces peintres-là, qui ne se tiennent pas tranquilles, qui sont
convaincus qu'ils savent ce qu'ils font, que l'Empereur a décrété une
Contre-Exposition. Elle était ouverte à tous; mais le danger d'être tué
ou blessé,--c'est-à-dire de déplaire au jury et d'être évincé une autre fois,
le peu de courage, de foi en soi-même aussi, ont empêché un grand
nombre de peintres de s'exposer--aux balles coniques des critiquas et
aux obus du public, autrement dit aux feuilletons et aux éclats de rire.
Ces peintres-là, leurs confrères, les Braves refusés, les appellent des
Couards et fixent leur nombre à 1,800 ou 2,000. C'est eux qui
composent la troisième, la petite classe.
Quant à la seconde, c'est celle des Suspects, gens timides, indécis, qui
acceptent en longues phrases, au lieu de dire franchement oui; peintres
timorés qui laissent leurs tableaux dans la salle des Refusés, mais qui
sont inquiets d'être vus. Ils ont l'air d'être derrière leurs confrères, bien
qu'ils soient à côté d'eux; en deux mots, ils ne mettent pas de numéros à
leurs toiles; ils ne se sont pas faits inscrire dans le catalogue des
Refusés, et ils ne peuvent être signalés que par les chiffres de refus de
l'administration. Quelques-uns mêmes de ces peintres qui se trouvent
mal et ont des borborygmes n'ont pas signé leurs ouvrages. Si le
Comité des Refusés était aussi décidé que son aîné, le Comité de salut
public, les Suspects seraient guillotinés tous comme les traîtres et les
lâches.
A la tête des plus vaillants Refusés, il convient de placer Courbet.
Quoiqu'il ne figure pas parmi eux, dans le catalogue et dans le Musée,
il est le plus Refusé des Refusés.
Courbet est la plus puissante individualité qui se soit produite parmi les
peintres depuis une vingtaine d'années.--Pour ceux qui ne cherchent pas
dans la peinture ce qu'on n'y peut pas trouver, la philosophie, la poésie
ou l'astronomie, l'agriculture, etc., mais qui se contentent d'y voir la
représentation naïve et vigoureuse des faits et des objets, la supériorité
du maître-peintre est évidente.
(Je n'exagère pas la démence des critiques d'art et d'une foule d'autres
gens, en disant qu'ils ne peuvent admettre qu'une peinture ne soit
qu'une peinture, et que dans un tableau ce qui les charme le plus, c'est
ce qui n'y est pas. Voilà un critique qui m'interrompt pour me lire son
article sur M. Daubigny: «Chaque touche, a-t-il écrit, est «un
hémistiche et fait venir à l'esprit un son cadencé, etc. C'est avant tout
un grand poëte!!!»)
Courbet tout en ayant, des idées assez vastes de la peinture et des
mondes qu'elle peut contenir, est convaincu d'abord qu'elle doit faire
ressemblant, et que le meilleur moyen de faire ressemblant est de voir.
Cette opinion instinctive est assurément préférable à celle de croire,
comme le fameux M. Thoré, que la peinture est faite pour instruire les
masses et donner des leçons de politique ou de morale.
Toute espèce de tricherie est écartée des tableaux de Courbet. Il vaut
mieux, croit-il, avoir vu ce qu'on veut peindre que l'avoir rêvé; la
peinture mythologique ou allégorique excite son rire franc-comtois; il
pense que la peinture est plus faite pour les yeux que pour l'imagination;
il veut voir pour peindre. En Art, le parti pris, est indispensable.
Le système de Courbet a fait éclore de nombreux partisans; on voit
maintenant une foule de tableaux du genre dit réaliste. Tous ces
croque-morts, ces carriers, ces sarcleurs, etc., c'est la faute de Courbet.
Il fait école non seulement pour le sujet, mais encore pour la manière
de peindre. Les nouveaux ne subissent pas seuls l'influence du nouveau
maître: des anciens, et des plus célèbres, ont visiblement modifié leur
peinture depuis sa venue. Le tableau de l'_Enterrement d'Ornans_, si
décrié à son apparition, demeuré le chef-d'oeuvre de Courbet, quoi
qu'on en dise et quoiqu'on ne veuille reconnaître de, lui, pour ne pas
avoir l'air de se rendre, que des tableaux très-beaux sans doute, mais
d'une moindre importance, l'_Enterrement d'Ornans_, dis-je, a fait
émeute, mais aussi révolution. Les oeuvres que
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