Dresde; mais
l'édition de 1750, faite probablement sous les yeux de l'auteur, quoique
portant l'adresse d'Amslerdam, porte seulement: eu honte. B.
[13] C'est d'après l'édition de 1750 que j'ai ajouté le mot passagère. B.
Je vends aux nations voisines les mêmes bagatelles plus chèrement qu'à
vous, et par là je suis utile à l'empire. Babouc, après avoir un peu rêvé,
le raya de ses tablettes[14]; car enfin, disait-il, les arts du luxe ne sont
en grand nombre dans un empire que quand tous les arts nécessaires
sont exercés, et que la nation est nombreuse et opulente. Ituriel me
paraît un peu sévère.
[14] C'est aussi d'après l'édition de 1750 que je rétablis la fin de cet
alinéa. B.
VII. Babouc, fort incertain sur ce qu'il devait penser de Persépolis,
résolut de voir les mages et les lettrés; car les uns étudient la sagesse, et
les autres la religion; et il se flatta que ceux-là obtiendraient grâce pour
le reste du peuple. Dès le lendemain matin il se transporta dans un
collège de mages. L'archimandrite lui avoua qu'il avait cent mille écus
de rente pour avoir fait voeu de pauvreté, et qu'il exerçait un empire
assez étendu en vertu de son voeu d'humilité; après quoi il laissa
Babouc entre les mains d'un petit frère qui lui fit les honneurs.
Tandis que ce frère lui montrait les magnificences de cette maison de
pénitence, un bruit se répandit qu'il était venu pour réformer toutes ces
maisons. Aussitôt il reçut des mémoires de chacune d'elles; et les
mémoires disaient tous en substance: «Conservez-nous, et détruisez
toutes les autres.» A entendre leurs apologies, ces sociétés étaient
toutes nécessaires; à entendre leurs accusations réciproques, elles
méritaient toutes d'être anéanties. Il admirait comme il n'y avait aucune
d'elles qui, pour édifier l'univers, ne voulût en avoir l'empire. Alors il se
présenta un petit homme qui était un demi-mage, et qui lui dit: Je vois
bien que l'oeuvre va s'accomplir; car Zerdust est revenu sur la terre; les
petites filles prophétisent, en se fesant donner des coups de pincettes
par-devant et le fouet par-derrière[15]. Ainsi nous vous demandons
votre protection contre le grand-lama. Comment! dit Babouc, contre ce
pontife-roi qui réside au Thibet?--Contre lui-même.--Vous lui faites
donc la guerre, et vous levez contre lui des armées?--Non; mais il dit
que l'homme est libre; et nous n'en croyons rien; nous écrivons contre
lui de petits livres qu'il ne lit pas; à peine a-t-il entendu parler de nous,
il nous a seulement fait condamner, comme un maître ordonne qu'on
échenille les arbres de ses jardins. Babouc frémit de la folie de ces
hommes qui fesaient profession de sagesse, des intrigues de ceux qui
avaient renoncé au monde, de l'ambition et de la convoitise
orgueilleuse de ceux qui enseignaient l'humilité et le désintéressement;
il conclut qu'Ituriel avait de bonnes raisons pour détruire toute cette
engeance
[15] Tel est le texte de 1748 et de toutes les autres éditions. Mais
l'édition de 1750, que j'aurais peut-être dû suivre, porte:
«... par-derrière. Il est évident que le monde va finir: ne pourriez-vous
point, avant cette belle époque, nous protéger contre le
grand-lama?--Quel galimatias, dit Babouc, contre le grand-lama? contre
ce pontife-roi qui réside au Thibet?--Oui, dit le petit demi-mage avec
un air opiniâtre, contre lui-même.--Vous lui faites donc la guerre, vous
avez donc des armées? dit Babouc.--Non, dit l'autre, mais nous avons
écrit contre lui trois on quatre mille gros livres qu'on ne lit point, et
autant de brochures, que nous fesons lire par des femmes: à peine a-t-il
entendu, etc.» B.
VIII. Retiré chez lui, il envoya chercher des livres nouveaux pour
adoucir son chagrin, et il pria quelques lettrés à dîner pour se réjouir. Il
en vint deux fois plus qu'il n'en avait demandé, comme les guêpes que
le miel attire. Ces parasites se pressaient de manger et de parler; ils
louaient deux sortes de personnes, les morts et eux-mêmes, et jamais
leurs contemporains, excepté le maître de la maison. Si quelqu'un d'eux
disait un bon mot, les autres baissaient les yeux et se mordaient les
lèvres de douleur de ne l'avoir pas dit. Ils avaient moins de
dissimulation que les mages, parcequ'ils n'avaient pas de si grands
objets d'ambition. Chacun d'eux briguait une place de valet et une
réputation de grand homme; ils se disaient en face des choses
insultantes, qu'ils croyaient des traits d'esprit. [16]Ils avaient eu quelque
connaissance de la mission de Babouc. L'un d'eux le pria tout bas
d'exterminer un auteur qui ne l'avait pas assez loué il y avait cinq ans;
un autre demanda la perte d'un citoyen qui n'avait jamais ri à ses
comédies; un troisième demanda l'extinction de l'académie, parcequ'il
n'avait jamais pu parvenir à y être admis. Le repas fini, chacun d'eux
s'en alla seul, car il n'y avait pas dans toute la
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