la bassesse et la faim ont dict��es; ces laches satires o�� l'on m��nage le vautour, et o�� l'on d��chire la colombe; ces romans d��nu��s d'imagination, o�� l'on voit tant de portraits de femmes que l'auteur ne conna?t pas.
Il jeta au feu tous ces d��testables ��crits, et sortit pour aller le soir �� la promenade. On le pr��senta �� un vieux lettr�� qui n'��tait point venu grossir le nombre de ses parasites. Ce lettr�� fuyait toujours la foule, connaissait les hommes, en fesait usage, et se communiquait avec discr��tion. Babouc lui parla avec douleur de ce qu'il avait lu et de ce qu'il avait vu.
Vous avez lu des choses bien m��prisables, lui dit le sage lettr��; mais dans tous les temps, dans tous les pays, et dans tous les genres, le mauvais fourmille, et le bon est rare. Vous avez re?u chez vous le rebut de la p��danterie, parceque, dans toutes les professions, ce qu'il y a de plus indigne de para?tre est toujours ce qui se pr��sente avec le plus d'impudence. Les v��ritables sages vivent entre eux retir��s et tranquilles; il y a encore parmi nous des hommes et des livres dignes de votre attention. Dans le temps qu'il parlait ainsi, un autre lettr�� les joignit; leurs discours furent si agr��ables et si instructifs, si ��lev��s au-dessus des pr��jug��s et si conformes �� la vertu, que Babouc avoua n'avoir jamais rien entendu de pareil. Voil�� des hommes, disait-il tout bas, �� qui l'ange Ituriel n'osera toucher, ou il sera bien impitoyable.
Raccommod�� avec les lettr��s, il ��tait toujours en col��re contre le reste de la nation. Vous ��tes ��tranger, lui dit l'homme judicieux qui lui parlait; les abus se pr��sentent �� vos yeux en foule, et le bien qui est cach��, et qui r��sulte quelquefois de ces abus m��mes, vous ��chappe.[17] Alors il apprit que parmi les lettr��s il y en avait quelques uns qui n'��taient pas envieux, et que parmi les mages m��me il y en avait de vertueux. Il con?ut �� la fin que ces grands corps, qui semblaient en se choquant pr��parer leurs communes ruines, ��taient au fond des institutions salutaires; que chaque soci��t�� de mages ��tait un frein �� ses rivales; que si ces ��mules diff��raient dans quelques opinions, ils enseignaient tous la m��me morale, qu'ils instruisaient le peuple, et qu'ils vivaient soumis aux lois; semblables aux pr��cepteurs qui veillent sur le fils de la maison, tandis que le ma?tre veille sur eux-m��mes. Il en pratiqua plusieurs, et vit des ames c��lestes. Il apprit m��me que parmi les fous [18] qui pr��tendaient faire la guerre au grand-lama, il y avait eu de tr��s grands hommes. Il soup?onna enfin qu'il pourrait bien en ��tre des moeurs de Pers��polis comme des ��difices, dont les uns lui avaient paru dignes de piti��, et les autres l'avaient ravi en admiration.
[17] Ce texte est de 1751. Dans les ��ditions de 1748 et 1750, on lit: ?...vous ��chappe. Alors ils le men��rent chez le principal mage, qu'on appelait le surveillant, Babouc vit dans ce mage un homme digne d'��tre �� la t��te des justes; il sut qu'il y en avait beaucoup qui lui ressemblaient. Il con?ut m��me que ces grands corps, etc.?
Le mot ��v��que, en latin episcopus, vient du grec episcopos, qui veut dire inspecteur. En 1748 et 1750 l'archev��que de Paris ��tait Christophe de Beaumont, alors r��cemment nomm��, mais qui se rendit bient?t _ridicule et odieux �� tout Paris_ (voyez tome XXII, page 339). Beaumont, vingt-cinq ans apr��s, ne permit pas qu'�� la mort de Voltaire on f?t le service d'usage jusque-l�� pour chaque membre de l'acad��mie fran?aise. B.
[18] Les jans��nistes. B.
X. Il dit �� son lettr��: Je con?ois tr��s bien que ces mages, que j'avais crus si dangereux, sont en effet tr��s utiles, surtout quand un gouvernement sage les emp��che de se rendre trop n��cessaires; mais vous m'avouerez au moins que vos jeunes magistrats, qui ach��tent une charge de juge d��s qu'ils ont appris �� monter �� cheval, doivent ��taler dans les[19] tribunaux tout ce que l'impertinence a de plus ridicule, et tout ce que l'iniquit�� a de plus pervers; il vaudrait mieux sans doute donner ces places gratuitement �� ces vieux jurisconsultes qui ont pass�� toute leur vie �� peser le pour et le contre.
[19] L'��dition de 1750 porte: leurs. B.
Le lettr�� lui r��pliqua: Vous avez vu notre arm��e avant d'arriver �� Pers��polis; vous savez que nos jeunes officiers se battent tr��s bien, quoiqu'ils aient achet�� leurs charges: peut-��tre verrez-vous que nos jeunes magistrats ne jugent pas mal, quoiqu'ils aient pay�� pour juger.
Il le mena le lendemain au grand tribunal, o�� l'on devait rendre un arr��t important. La cause ��tait connue de tout le monde. Tous ces vieux avocats qui en parlaient ��taient flottants dans leurs opinions; ils all��guaient cent lois, dont aucune n'��tait applicable au fond de la question;
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