fantaisie telles que jamais elle ne se r��p��tait, cr��ant des roses au coeur saignant, pleurant des larmes de soufre, des lis pareils �� des urnes de cristal, des fleurs m��me sans forme connue, ��largissant des rayons d'astre, laissant flotter des corolles ainsi que des nu��es. Ce jour-l��, sur la feuille sabr��e �� grands coups de crayon noir, c'��tait une pluie d'��toiles pales, tout un ruissellement de p��tales infiniment doux; tandis que, dans un coin un ��panouissement innom��, un bouton aux chastes voiles, s'ouvrait.
--Encore un que tu vas me clouer l��! reprit le docteur en montrant le mur, o�� s'alignaient d��j�� des pastels aussi ��tranges. Mais qu'est-ce que ?a peut bien repr��senter, je te le demande?
Elle resta tr��s grave, se recula pour mieux voir son oeuvre.
--Je n'en sais rien, c'est beau.
A ce moment, Martine entra, l'unique servante, devenue la vraie ma?tresse de la maison, depuis pr��s de trente ans qu'elle ��tait au service du docteur. Bien qu'elle e?t d��pass�� la soixantaine, elle gardait un air jeune, elle aussi, active et silencieuse, dans son ��ternelle robe noire et sa coiffe blanche, qui la faisait ressembler �� une religieuse, avec sa petite figure bl��me et repos��e, o�� semblaient s'��tre ��teints ses yeux couleur de cendre.
Elle ne parla pas, alla s'asseoir �� terre devant un fauteuil, dont la vieille tapisserie laissait passer le crin par une d��chirure; et, tirant de sa poche une aiguille et un ��cheveau de laine, elle se mit �� la raccommoder. Depuis trois jours, elle attendait d'avoir une heure, pour faire cette r��paration qui la hantait.
--Pendant que vous y ��tes, Martine, s'��cria Pascal plaisamment, en prenant dans ses deux mains la t��te r��volt��e de Clotilde, recousez-moi donc aussi cette caboche-l��, qui a des fuites.
Martine leva ses yeux pales, regarda son ma?tre de son air habituel d'adoration.
--Pourquoi monsieur me dit-il cela?
--Parce que, ma brave fille, je crois bien que c'est vous qui avez fourr�� l�� dedans, dans cette bonne petite caboche ronde, nette et solide, des id��es de l'autre monde, avec toute votre d��votion.
Les deux femmes ��chang��rent un regard d'intelligence.
--Oh! monsieur, la religion n'a jamais fait de mal �� personne.... Et, quand on n'a pas les m��mes id��es, il vaut mieux n'en pas causer, bien s?r.
Il se fit un silence g��n��. C'��tait la seule divergence qui, parfois, amenait des brouilles, entre ces trois ��tres si unis, vivant d'une vie si ��troite. Martine n'avait que vingt-neuf ans, un an de plus que le docteur, quand elle ��tait entr��e chez lui, �� l'��poque o�� il d��butait �� Plassans comme m��decin, dans une petite maison claire de la ville neuve. Et, treize ann��es plus tard, lorsque Saccard, un fr��re de Pascal, lui envoya de Paris sa fille Clotilde, ag��e de sept ans, �� la mort de sa femme et au moment de se remarier, ce fut elle qui ��leva l'enfant, la menant �� l'��glise, lui communiquant un peu de la flamme d��vote dont elle avait toujours br?l��; tandis que le docteur, d'esprit large, les laissait aller �� leur joie de croire, car il ne se sentait pas le droit d'interdire �� personne le bonheur de la foi. Il se contenta ensuite de veiller sur l'instruction de la jeune fille, de lui donner en toutes choses des id��es pr��cises et saines. Depuis pr��s de dix-huit ans qu'ils vivaient ainsi tous les trois, retir��s �� la Souleiade, une propri��t�� situ��e dans un faubourg de la ville, �� un quart d'heure de Saint-Saturnin, la cath��drale, la vie avait coul�� heureuse, occup��e �� de grands travaux cach��s, un peu troubl��e pourtant par un malaise qui grandissait, le heurt de plus en plus violent de leurs croyances.
Pascal se promena un instant, assombri. Puis, en homme qui ne machait pas ses mots:
--Vois-tu, ch��rie, toute cette fantasmagorie du myst��re a gat�� ta jolie cervelle.... Ton bon Dieu n'avait pas besoin de toi, j'aurais d? te garder pour moi tout seul, et tu ne t'en porterais que mieux.
Mais Clotilde, fr��missante, ses clairs regards hardiment fix��s sur les siens, lui tenait t��te.
--C'est toi, ma?tre, qui te porterais mieux, si tu ne t'enfermais pas dans tes yeux de chair.... Il y a autre chose, pourquoi ne veux-tu pas voir?
Et Martine vint �� son aide, en son langage.
--C'est bien vrai, monsieur, que vous qui ��tes un saint, comme je le dis partout, vous devriez nous accompagner �� l'��glise.... S?rement, Dieu vous sauvera. Mais, �� l'id��e que vous pourriez ne pas aller droit en paradis, j'en ai tout le corps qui tremble.
Il s'��tait arr��t��, il les avait devant lui toutes deux, en pleine r��bellion, elles si dociles, �� ses pieds d'habitude, d'une tendresse de femmes conquises par sa gaiet�� et sa bont��. D��j��, il ouvrait la bouche, il allait r��pondre rudement, lorsque l'inutilit�� de la discussion lui apparut.
--Tenez! fichez-moi la paix. Je ferai mieux d'aller travailler.... Et, surtout, qu'on ne me d��range pas!
D'un pas leste, il
Continue reading on your phone by scaning this QR Code
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the
Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.