Le Collier de la Reine, Tome I | Page 7

Alexandre Dumas, père
qui fut battue. Mais aussi, convenons-en, cette d��route ne fut pas une victoire tout �� fait loyale de la part de l'Angleterre. Le roi ��douard avait des canons, circonstance parfaitement ignor��e de Philippe de Valois, ou plut?t circonstance �� laquelle Philippe de Valois n'avait pas voulu croire quoique je l'en eusse pr��venu, quoique je lui eusse dit que de mes yeux j'avais vu ces quatre pi��ces d'artillerie qu'��douard avait achet��es des V��nitiens.
--Ah! ah! dit Mme du Barry, ah! vous avez connu Philippe de Valois?
--Madame, j'avais l'honneur d'��tre un des cinq seigneurs qui lui firent escorte en quittant le champ de bataille, r��pondit Cagliostro. J'��tais venu en France avec le pauvre vieux roi de Boh��me, qui ��tait aveugle, et qui se fit tuer au moment o�� on lui dit que tout ��tait perdu.
--Oh! mon Dieu! monsieur, dit La P��rouse, vous ne sauriez croire combien je regrette qu'au lieu d'assister �� la bataille de Cr��cy, vous n'ayez pas assist�� �� celle d'Actium.
--Et pourquoi cela, monsieur?
--Ah! parce que vous eussiez pu me donner des d��tails nautiques, qui, malgr�� la belle narration de Plutarque, me sont toujours demeur��s fort obscurs.
--Lesquels, monsieur? Je serais heureux si je pouvais vous ��tre de quelque utilit��.
--Vous y ��tiez donc?
--Non, monsieur, j'��tais alors en ��gypte. J'avais ��t�� charg�� par la reine Cl��opatre de recomposer la biblioth��que d'Alexandrie; chose que j'��tais plus qu'un autre �� m��me de faire, ayant personnellement connu les meilleurs auteurs de l'Antiquit��.
--Et vous avez vu la reine Cl��opatre, monsieur de Cagliostro? s'��cria la comtesse du Barry.
--Comme je vous vois, madame.
--��tait-elle aussi jolie qu'on le dit?
--Madame la comtesse, vous le savez, la beaut�� est relative. Charmante reine en ��gypte, Cl��opatre n'e?t pu ��tre �� Paris qu'une adorable grisette.
--Ne dites pas de mal des grisettes, monsieur le comte.
--Dieu m'en garde!
--Ainsi, Cl��opatre ��tait...
--Petite, mince, vive, spirituelle, avec de grands yeux en amande, un nez grec, des dents de perle, et une main comme la v?tre, madame; une v��ritable main �� tenir le sceptre. Tenez, voici un diamant qu'elle m'a donn�� et qui lui venait de son fr��re Ptol��m��e; elle le portait au pouce.
--Au pouce! s'��cria Mme du Barry.
--Oui; c'��tait une mode ��gyptienne, et moi, vous le voyez, je puis �� peine le passer �� mon petit doigt.
Et, tirant la bague, il la pr��senta �� Mme du Barry.
C'��tait un magnifique diamant, qui pouvait valoir, tant son eau ��tait merveilleuse, tant sa taille ��tait habile, trente ou quarante mille francs.
Le diamant fit le tour de la table et revint �� Cagliostro, qui le remit tranquillement �� son doigt.
--Ah! je le vois bien, dit-il, vous ��tes incr��dules: incr��dulit�� fatale que j'ai eue �� combattre toute ma vie. Philippe de Valois n'a pas voulu me croire quand je lui dis d'ouvrir une retraite �� ��douard; Cl��opatre n'a pas voulu me croire quand je lui ai dit qu'Antoine serait battu. Les Troyens n'ont pas voulu me croire quand je leur ai dit �� propos du cheval de bois: ?Cassandre est inspir��e, ��coutez Cassandre.?
--Oh! mais c'est merveilleux, dit Mme du Barry en se tordant de rire, et en v��rit�� je n'ai jamais vu d'homme �� la fois aussi s��rieux et aussi divertissant que vous.
--Je vous assure, dit Cagliostro en s'inclinant, que Jonathas ��tait bien plus divertissant encore que moi. Oh! le charmant compagnon! C'est au point que lorsqu'il fut tu�� par Sa��l, je faillis en devenir fou.
--Savez-vous que si vous continuez, comte, dit le duc de Richelieu, vous allez rendre fou lui-m��me ce pauvre Taverney, qui a tant peur de la mort qu'il vous regarde avec des yeux tout effar��s en vous croyant immortel. Voyons, franchement, l'��tes-vous, oui ou non?
--Immortel?
--Immortel.
--Je n'en sais rien, mais ce que je sais, c'est que je puis affirmer une chose.
--Laquelle? demanda Taverney, le plus avide de tous les auditeurs du comte.
--C'est que j'ai vu toutes les choses et hant�� tous les personnages que je vous citais tout �� l'heure.
--Vous avez connu Montecuculli?
--Comme je vous connais, monsieur de Favras, et m��me plus intimement, car c'est pour la deuxi��me ou troisi��me fois que j'ai l'honneur de vous voir, tandis que j'ai v��cu pr��s d'un an sous la m��me tente que l'habile strat��giste dont nous parlons.
--Vous avez connu Philippe de Valois?
--Comme j'ai eu l'honneur de vous le dire, monsieur de Condorcet; mais lui rentr�� �� Paris, je quittai la France et retournai en Boh��me.
--Cl��opatre?
--Oui, madame la comtesse, Cl��opatre. Je vous ai dit qu'elle avait les yeux noirs comme vous les avez, et la gorge presque aussi belle que la v?tre.
--Mais, comte, vous ne savez pas comment j'ai la gorge?
--Vous l'avez pareille �� celle de Cassandre, madame, et, pour que rien ne manque �� la ressemblance, elle avait comme vous, ou vous avez comme elle, un petit signe noir �� la hauteur de la sixi��me c?te gauche.
--Oh! mais, comte, pour le coup vous ��tes sorcier.
--Eh! non, marquise, fit le mar��chal de Richelieu en riant,
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