Lassassinat du pont-rouge | Page 6

Charles Barbara
je pouvais peser, moi, vieux radoteur, ?? c?��t?? d'un homme jeune, beau gar?��on, brillant, spirituel, qui ??tait ador?? de sa femme ?? laquelle il faisait accroire ce qu'il voulait! Il joua aupr?��s d'elle sa com??die d'habitude, eut l'air de l'aimer plus que jamais, et, finalement, arracha ?? l'aveugle faiblesse des deux femmes les signatures dont il avait besoin.
--Quel mis??rable! dit Max indign??.
--Oui, mis??rable, en effet, ajouta le vieillard en secouant la t?ate, et plus que vous ne pensez. Aussi, il avait trop d'avantages superficiels pour ne pas ?atre mauvais au fond. Un homme ne peut pas tout avoir, que diable! Je n'avais pas attendu jusqu'?? ce jour pour reconna??tre qu'il manquait absolument de coeur. Il sortait de parents extr?amement pauvres qui s'??taient impos?? les plus dures privations pour lui faire apprendre quelque chose. Eh bien! il en rougissait, il les reniait, il les consignait ?? sa porte et les laissait dans la mis?��re. Le malheureux semblait n'avoir d'autre vocation que celle de prendre en haine ceux qui lui avaient fait du bien ou l'aimaient. Comment expliquer autrement qu'il d??laiss?��t madame Thillard, la beaut??, l'amour, le d??vouement en personne, pour de malhonn?ates femmes, souvent laides, quelquefois vieilles, toujours d??go??tantes par leurs moeurs, qui le volaient, le ruinaient et se moquaient de lui?
--Mais, dit Max tout ?? coup, o?1 un pareil homme a-t-il pris le courage de se tuer???
Fr??d??ric s'arr?ata et regarda Destroy avec ??tonnement.
??C'est une question que je me suis adress??e plus d'une fois, fit-il en se croisant les bras. Il remarcha et poursuivit:--Sans compter que ce qu'on a trouv?? dans son portefeuille ??tait bien peu de chose, par rapport aux sommes qu'il venait de recevoir. Il m'est singuli?��rement difficile d'admettre, du caract?��re dont je le connaissais, que le remords se soit empar?? de lui. Au total, je ne m'en cache pas, ce suicide n'a cess?? d'?atre pour moi un probl?��me.??
Il y avait moins de crainte que de surprise et de curiosit?? dans l'air dont Destroy s'??cria aussit?��t:
??Est-ce que vous croiriez?...
--Non, non, r??p??ta le vieillard d'un air pensif. D'ailleurs, la justice, qui a de meilleurs yeux que les miens, n'a rien vu de louche dans cette mort.
--Au surplus, ajouta Max, sa fuite ou sa mort, c'??tait tout un: madame Thillard et sa m?��re n'en ??taient pas moins irr??vocablement ruin??es.
--?��videmment, r??pliqua Fr??d??ric sur le point de quitter Destroy. Et, voyez-vous,--ici il prit un air capable et respira voluptueusement une ??norme prise,--quand je songe ?? tout cela, je suis tent?? de me demander ce que fait le bon Dieu l??-haut!...??

IV.
Int??rieur de Cl??ment.
Cl??ment occupait, dans une vieille maison situ??e rue du Cherche-Midi, un appartement au troisi?��me. L'ameublement, simple et propre, offrait, dans la forme et les couleurs, cette disparit?? des meubles achet??s d'occasion chez divers marchands. On y avait ??vit?? avec soin tout ce qui ??tait susceptible d'??veiller la tristesse. Aux murs et aux fen?atres des pi?��ces ??lev??es du logement, rempli de lumi?��re, ??taient un papier et des rideaux d'une nuance claire, sem??e de grosses fleurs rouges, vertes et bleues.
Une vieille femme vint ouvrir. Avant que Max n'e??t parl??, elle dit: ??Monsieur n'est pas l??.?? Mais Cl??ment qui, sans doute d'un observatoire secret, avait reconnu son ami, apparut au moment o?1 celui-ci descendait l'escalier et le rappela.
??Viens par ici, lui dit-il en l'entra??nant ?? travers plusieurs chambres, nous serons plus tranquilles. Ma femme garde le lit. On a d?? la s??parer de son enfant, puisqu'elle ne peut nourrir, et elle est tr?��s-souffrante. Tu la verras une autre fois.??
Ils furent bient?��t install??s dans une petite pi?��ce qui rappelait un cabinet d'hommes d'affaires, ?? cause d'une biblioth?��que en acajou, combl??e de livres ?? reliure uniforme, d'un grand casier dont la double pile de cartons verts ??tait s??par??e par des registres arm??s de m??tal poli, et d'un bureau devant lequel s'ouvraient les bras circulaires d'un fauteuil recouvert de cuir rouge.
??Tu n'as pas d??n??, au moins? dit Cl??ment ?? son ami.... Nous d??nerons ensemble,?? ajouta-t-il en tirant de toute sa force le cordon d'une sonnette.
La vieille femme accourut.
??Marguerite, cria Cl??ment qui accompagna ses paroles d'une pantomime expressive, vous dresserez la table ici: vous mettrez deux couverts. Ne fais pas attention, dit-il ensuite ?? Destroy dont le visage accusait de la surprise et des pr??occupations, la pauvre vieille est presque sourde.
--Je l'avais devin?? ?? son air, repartit Max. Ce n'est pas pour t'entendre ??lever la voix que je suis ??tonn??. A te parler franchement, depuis mon entr??e ici, je ne remarque que des choses qui me confondent.
--Qu'est-ce qui t'??tonne donc tant? demanda Cl??ment.
--Comment! fit Destroy, quand on t'a vu, comme je t'ai vu pendant dix ans, vivre au jour la journ??e, changer d'h?��tel tous les quinze jours, prendre racine dans les bals, te railler infatigablement de la vie bourgeoise, tu ne veux pas que je m'??tonne de te trouver mari??, p?��re de famille, travaillant, ??conomisant, vivant au coin de
Continue reading on your phone by scaning this QR Code

 / 48
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.