voisins qui le traduisent �� leur mani��re. Ainsi, la musique, chez certains ��tres, ��veille des visions de couleurs. C'est donc une sorte de contagion de sensibilit��, transform��e suivant la fonction normale de chaque appareil c��r��bral atteint.
Par l��, on peut expliquer le c��l��bre sonnet d'Arthur Rimbaud, qui raconte les nuances des voyelles, vraie d��claration de foi, adopt��e par l'��cole symboliste.
�� noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu, voyelles, Je dirai quelque jour vos naissances latentes, ��, noir corset velu des mouches ��clatantes Qui bourdonnent autour des puanteurs cruelles,
Golfes d'ombres; E, candeurs des vapeurs et des tentes, Lances des glaciers fiers, rois blancs, frissons d'ombrelles; I, pourpre, sang crach��, rire des l��vres belles Dans la col��re ou les ivresses p��nitentes;
U, cycles, vibrements divins des mers virides, Paix des patis sem��s d'animaux, paix des rides Que l'alchimie imprime aux grands fronts studieux
O, supr��me clairon, plein de strideurs ��tranges Silences travers��s des mondes et des anges --O l'Om��ga, rayon violet de ses yeux.
A-t-il tort, a-t-il raison? Pour le casseur de pierres des routes, m��me pour beaucoup de nos grands hommes, ce po��te est un fou ou un fumiste. Pour d'autres, il a d��couvert et exprim�� une absolue v��rit��, bien que ces explorateurs d'insaisissables perceptions doivent toujours diff��rer un peu d'opinion sur les nuances et les images que peuvent ��voquer en nous les vibrations myst��rieuses des voyelles ou d'un orchestre.
S'il est reconnu par la science--du jour--que les notes de musique agissant sur certains organismes font appara?tre des colorations, si sol peut ��tre rouge, fa lilas ou vert, pourquoi ces m��mes sons ne provoqueraient-ils pas aussi des saveurs dans la bouche et des senteurs dans l'odorat? Pourquoi les d��licats un peu hyst��riques ne go?teraient-ils pas toutes choses avec tous leurs sens en m��me temps, et pourquoi aussi les symbolistes ne r��v��leraient-ils point des sensibilit��s d��licieuses aux ��tres de leur race, po��tes incurables et privil��gi��s? C'est l�� une simple question de pathologie artistique bien plus que de v��ritable esth��tique.
Ne se peut-il en effet que quelques-uns de ces ��crivains int��ressants, n��vropathes par entra?nement, soient arriv��s �� une telle excitabilit�� que chaque impression re?ue produise en eux une sorte de concert de toutes les facult��s perceptrices?
Et n'est-ce pas bien cela qu'exprime leur bizarre po��sie de sons qui, tout en ayant l'air inintelligible, essay�� de chanter en effet la gamme enti��re des sensations et de noter par les voisinages des mots, bien plus que par leur accord rationnel et leur signification connue, d'intraduisibles sens, qui sont obscurs pour nous, et clairs pour eux?
Car les artistes sont �� bout de ressources, �� court d'in��dit, d'inconnu, d'��motion, d'images, de tout. On a cueilli depuis l'antiquit�� toutes les fleurs de leur champ. Et voil�� que, dans leur impuissance, ils sentent confus��ment qu'il pourrait y avoir peut-��tre pour l'homme un ��largissement de l'ame et de la sensation. Mais l'intelligence a cinq barri��res entr'ouvertes et cadenass��es qu'on appelle les cinq sens, et ce sont ces cinq barri��res que les hommes ��pris d'art nouveau secouent aujourd'hui de toute leur force.
L'Intelligence, aveugle et laborieuse Inconnue, ne peut rien savoir, rien comprendre, rien d��couvrir que par les sens. Ils sont ses uniques pourvoyeurs, les seuls interm��diaires entre l'Universelle Nature et Elle. Elle ne travaille que sur les renseignements fournis par eux, et ils ne peuvent eux-m��mes les recueillir que suivant leurs qualit��s, leur sensibilit��, leur force et leur finesse.
La valeur de la pens��e d��pend donc ��videmment d'une fa?on directe de la valeur des organes, et son ��tendue est limit��e parleur nombre.
M. Taine d'ailleurs a magistralement trait�� et d��velopp�� cette id��e.
Les Sens sont au nombre de cinq, rien que de cinq. Ils nous r��v��lent, en les interpr��tant, quelques propri��t��s de la mati��re environnante qui peut, qui doit receler un nombre illimit�� d'autres ph��nom��nes que nous sommes incapables de percevoir.
Supposons que l'homme ait ��t�� cr���� sans oreilles; il vivrait tout de m��me �� peu pr��s de la m��me fa?on, mais pour, lui l'Univers serait muet; Il n'aurait aucun soup?on du bruit et de la musique; qui sont des vibrations transform��es.
Mais s'il avait re?u en don d'autres organes, puissants et d��licats, dou��s aussi de cette propri��t�� de m��tamorphoser en perceptions nerveuses les actions et les attributs de tout l'inexplor�� qui nous entoure, combien plus vari�� serait le domaine de notre savoir et de nos ��motions.
C'est en ce domaine imp��n��trable que chaque artiste essaye d'entrer, en tourmentant, en violentant, en ��puisant le m��canisme de sa pens��e. Ceux qui succombent par le cerveau, Heine, Baudelaire, Balzac, Byron vagabond, �� la recherche de la mort, inconsolable du malheur d'��tre un grand po��te, Musset, Jules de Goncourt et tant d'autres, n'ont-ils pas ��t�� bris��s par le m��me effort pour renverser cette barri��re mat��rielle qui emprisonne l'intelligence humaine?
Oui, nos organes sont les nourriciers et les ma?tres du g��nie artiste. C'est l'oreille qui engendre le musicien, l'oeil qui fait na?tre le peintre. Tous concourent aux
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