la pr��tendue ��cole de David avait trac��es comme des conditions de la beaut��; on voulait imiter en tout l'antiquit�� grecque, mais on ne lui avait emprunt�� que l'apparence et les formes mat��rielles, et, faute d'une ame qui p?t animer les cr��ations de la nouvelle ��cole, on avait eu recours aux poses th��atrales et aux gestes exag��r��s. Toute figure, peinte ou sculpt��e, qui n'��tait pas roide, solennelle et sans ame, ne pouvait trouver grace aux yeux d'un public dont le go?t ��tait perverti. C'est dans ces circonstances que j'exposai ma premi��re oeuvre.
--C'��tait une statue couch��e, en marbre: une jeune fille, ��tendue sur son lit de mort, tenant encore le crucifix dans des mains jointes, comme la mort l'avait surprise. J'avais ��clair�� les traits sans vie de ma statue d'un joyeux sourire, d'une expression de confiance, d'espoir et de b��atitude. Mon but ��tait de fixer sur le marbre le moment supr��me o�� l'ame quitte le corps et le force cependant encore �� manifester la joie que lui fait ��prouver la certitude d'une vie meilleure. Cette oeuvre, que j'avais nomm��e _le Pressentiment de l'��ternit��_, souleva une sorte d'��meute parmi les artistes. La plupart se d��cha?n��rent contre moi avec une esp��ce de fureur et critiqu��rent ma statue comme le fruit d'un esprit malade, et comme une h��r��sie contre les pr��ceptes alors en honneur. En effet, les formes de ma statue ��taient maigres, d��licates, fines et r��veuses: la forme mat��rielle ��tait sacrifi��e �� l'expression morale d'une id��e ou d'un sentiment. Il y eut aussi beaucoup de personnes qui parurent admirer mon oeuvre, et qui m'encourag��rent en me disant que j'��tais pr��destin�� �� faire une r��volution dans l'��cole, et �� ��lever l'art chr��tien au-dessus de l'art pa?en; mais plus je trouvai de d��fenseurs, plus je vis s'��lever contre moi d'ennemis acharn��s. Si la lutte s'��tait born��e �� la discussion des d��fauts et des m��rites de ma statue, je n'y eusse point succomb��; mais mes adversaires, aveugl��s par la passion, se mirent �� chercher dans mon pass�� des pr��textes pour me livrer �� la ris��e du public. Ils firent, sans le vouloir, saigner mon coeur par de profondes blessures, et profan��rent des souvenirs qui m'��taient plus chers que la vie. Depuis ce moment, j'ai eu peur de la publicit��, et je n'ai plus jamais rien expos��.
Il y avait dans les paroles du vieillard, un calme touchant et une ��mouvante s��r��nit��. En ce moment, sa figure me parut si noble et si majestueuse, que j'en fus profond��ment ��mu, et ce ne fut qu'apr��s un moment de r��flexion que je lui demandai:
--Et ne travaillez-vous plus du tout, maintenant?
--Je travaille encore de temps en temps, dit-il. Il me serait impossible de m'en abstenir, lors m��me que je le voudrais. L'art est devenu pour mon coeur un besoin imp��rieux, parce qu'il est la baguette magique avec laquelle j'��voque les plus douces pens��es de mon pass��, et me transporte dans le printemps de ma vie.
Le chemin ��tait devenu tr��s-sablonneux, et nous avancions �� grand'peine. Cela interrompit notre conversation pendant quelques minutes. Lorsque je pus reprendre ma place �� c?t�� du vieillard, je lui demandai:
--Si je ne me trompe, vous avez lu quelques-uns de mes ouvrages. Vous aimez donc la litt��rature?
--Je ne lis pas beaucoup, r��pondit-il; cependant Je poss��de la plupart de vos oeuvres.
--Et ont-elles su vous plaire?
--Vos r��cits de la Campine, et vos esquisses morales surtout; oui, plus que vous ne sauriez vous l'imaginer. Il en est que j'ai relus plus de dix fois. Ce ne sont pas les histoires m��mes qui me font encore plaisir apr��s plusieurs lectures; c'est le ton, une sorte d'harmonie secr��te qui s'accorde avec mon humeur et qui me ravit.
Je regardai le vieillard d'un oeil interrogateur pour obtenir de plus amples explications.
--Dans les r��cits dont je veux parler, dit-il, r��gnent une sorte de simplicit�� na?ve, de douce sensibilit�� et d'in��branlable esp��rance: un sentiment sinc��re d'admiration de la nature, de reconnaissance envers Dieu, et d'amour de l'humanit��. Ces lectures m'ont souvent touch�� vivement, mais elles ne me fatiguent pas; et quand j'ai fini un de ces ouvrage, je me sens consol��, je suis plus croyant, plus aimant, et je me r��jouis au fond du coeur en d��couvrant que des cordes si tendres et si pures, qu'on croirait propres aux seuls enfants, vibrent et r��sonnent encore dans mon ame. Je b��gayai quelques excuses et m'effor?ai de faire avouer au vieillard qu'il louait mes ouvrages plus qu'ils ne le m��ritaient, probablement par un sentiment de bienveillance ou de sympathie. Mais il repoussa cette excuse et reprit en forme de conclusion:
--C'est vrai, chaque homme sent d'une mani��re qui lui est propre, qui peut ��tre inn��e en lui, mais qui provient cependant des sensations de sa jeunesse et des ��v��nements qui ont domin�� sa vie. Je ne puis donc pas pr��tendre que chacun doit n��cessairement sentir comme moi. Quoi qu'il en soit,
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