La femme du mort, Tome I | Page 8

Alexis Bouvier
faisait enfin des efforts pour comprendre et n'y r��ussissait pas.
--Simon, si je tue Fernand, je n'en reste pas moins le malheureux que sa femme a tromp�� et qu'on ridiculise... Si je me s��pare de ma femme, je la fais libre et riche... et je reste le mari de la femme perdue, qui tra?ne ��ternellement mon nom dans son vice et le fl��trit en le faisant porter �� des enfants ill��gitimes...
Pierre Davenne se redressa tout �� coup, et fier, les bras crois��s, il dit:
--Fernand S��glin est un infame, un mis��rable et un lache; j'ai ��t�� sa dupe... mais il ne me rendra pas ridicule... Genevi��ve est une fille perdue... un monstre... mais personne ne saura que Mme Davenne, que la m��re de mon enfant, s'est d��shonor��e en trompant son mari!
--Qu'allez-vous faire?...
--Je te raconterai cela �� l'heure voulue... Simon, sais-tu o�� demeure, �� Paris, Rigobert?
--Rigobert le sauvage?...
--Oui!...
--Je sais que c'est du c?t�� de Montrouge, je ne peux pas dire o�� pr��cis��ment... Mais ne vous inqui��tez pas de ?a; il faut le trouver, je le trouverai...
--Il faut que je le voie demain.
--Mon lieutenant, ce sera fait...
--Eh bien, mon vieux Simon, va te coucher... Simon tournait son b��ret dans ses mains et ne bougeait pas.
--Eh bien, tu ne m'as pas entendu?...
--��coutez, mon lieutenant, faites-moi une grace: laissez-moi coucher l��...
--Comment, dans ma chambre?
--Vous savez bien que je dors partout, moi, sur un fauteuil, sur le tapis...
Pierre Davenne eut un triste sourire en disant:
--Mon pauvre et bon camarade, tu ne crois pas �� ma derni��re r��solution, tu crois que je veux t'��loigner...
--Eh bien, oui... j'ai peur de ?a... Une fois seul, vous perdez la tramontane, ?a vous prend, une cartouche; v'lan et ?a y est... bonsoir les gabiers.
Davenne serra la main de son matelot, haussant imperceptiblement les ��paules, et lui dit:
--Reste, Simon!... Demain, tu verras quelle campagne je te pr��pare et combien j'ai besoin de vivre pour la faire...
--Merci... Tenez, couchez-vous; je prends ce coin-l��, un tapis qui est plus doux qu'un matelas.
Et le matelot se coucha aussit?t; il feignit de dormir et ne quittait pas de l'oeil son lieutenant.
Celui-ci alla respirer �� la fen��tre, puis, revenant, il s'��tendit sur son lit et ��teignit la lampe...
Au bout de quelques instants, le matelot se glissa sans bruit sur le tapis et se pla?a juste devant le lit en se disant:
--S'il se l��ve, comme ?a il sera forc�� de me marcher sur le corps, faudra bien que je me r��veille.
Il lui sembla que Pierre respirait plus fort et s'endormait; il ��couta; le malheureux pleurait et g��missait: c'��taient les larmes qu'il versait sur le bonheur �� jamais perdu.
Et Simon grognait tout bas:
--Carcan de chien, faut-il que les hommes soient b��tes de s'attacher �� ces choses-l��!... Les femmes!... L'une fait le mal, vite l'autre vient le raconter... Quel monde!... Tant qu'au Fernand, je crois que le jour o�� nous nous aborderons tous les deux dans un coin, il passera un mauvais quart d'heure!
Pierre ne put dormir, poursuivi sans cesse par la r��v��lation cruelle qui venait, en une heure, de d��truire tous les projets de sa vie; vainement il cherchait �� se contenir; aux larmes succ��daient des cris de rage... puis des cris d'effroi, lorsque la pens��e lui revenait qu'il avait failli tuer sa fille...
Ce fut pour le malheureux une ��pouvantable nuit, dans laquelle, obligeant la volont�� �� faire taire la mati��re, il reconstruisit son avenir.
C'est la pens��e unique de son enfant qui fit sa force... C'est pour elle qu'il r��solut d'��viter le scandale en chassant la femme et en chatiant le faux ami.
Au point du jour, Simon se leva; on pense qu'il avait peu dormi. Malgr�� les pr��cautions prises par lui pour ne pas r��veiller son lieutenant, il fut tout d��sappoint�� en le voyant se dresser sur son lit et lui demander:
--Quelle heure est-il, Simon?
--Mon lieutenant, fit celui-ci, il est encore l'heure de dormir...
Pierre se leva et dit:
--Nous avons beaucoup �� faire aujourd'hui...
--Vous ne voulez pas vous reposer et vous tomberez malade.
--Lorsqu'il y avait du danger �� bord, est-ce que l'on se reposait?...
--Nous ne sommes pas �� bord, fit le matelot en secouant t��te.
D'un ton singulier, qui fit lever la t��te �� Simon, Pierre dit:
--Nous montons d'aujourd'hui la Vengeance... et la campagne commence... Simon, �� l'oeuvre... Toute la nuit, je n'ai pas ferm�� l'oeil; j'ai arr��t�� mon plan. De cette heure, tout est fini... L'amour est mort, je n'ai plus de piti��...
--Qu'allons-nous faire? demanda Simon en voyant le bouleversement des traits de son ma?tre, en constatant le changement qui s'��tait op��r�� en une nuit sur son visage...
--Il faut aujourd'hui que nous retrouvions Rigobert.
--Vous venez avec moi?...
--Je t'accompagnerai; je ne veux pas rester ici ce matin, je ne veux pas la voir...
--Mon lieutenant, il faut ��tre fort...
--Je t'ai dit, Simon, que j'avais mis ma nuit �� arr��ter mon plan.
Le matelot ne r��pliqua pas, il savait que si Pierre ��tait quelquefois long
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