La fabrique de crimes | Page 5

Paul H. C. Féval
ces horribles massacres, afin de ne point effrayer les touristes qui sont la fortune de Paris.
De m��me que les trois Pieuvres males de l'impasse Gu��m��n��e ��taient soudoy��s par le duc, de m��me les trois belles et robustes natures, rassembl��es sur le trottoir oppos�� travaillaient pour Fandango.
C'��tait Pollux, le joueur d'orgues, Castor, le r��mouleur et Mustapha, le conducteur de citadine.
Tous trois d��guis��s en hommes du peuple!
Remarquez ceci: Jadis les gens du peuple se d��guisaient en grands seigneurs pour faire leurs m��chants tours; aujourd'hui, 'depuis que le roman coupable dispose des doubles fonds de Paris, les gens de qualit�� se mettent en voyous pour pouvoir p��n��trer dans tous ces souterrains o�� grouille le crime. C'est un ��change fait entre l'auvergnat �� cinq centimes et l'habit noir �� un sou.
Mandina ?ta d'un geste rapide son faux nez avec ses lunettes; elle arracha son chapeau de berg��re. Il ne lui manquait d��sormais que sa crinoline.
-- Paris! dit-elle, craignant de n'��tre pas reconnue.
-- Palmyre! r��pondirent les trois bons coeurs.
Puis, mademoiselle de Hachecor leur demanda avec ��nergie:
-- Vous ai-je suffisamment prouv�� que je suis Mandina, la fille du grand chef des Ancas! l'Escarboucle de Charenton-le-Pont?
-- Oui! r��pondit Mustapha, tu as notre confiance, parle.
Il se permit en m��me temps un geste r��gence autant qu'indiscret, car il aimait les dames. Sans cela, il eut ��t�� parfait. Mandina le repoussa avec d��cence et dit:
-- J'ai examin�� le ciel avec soin; une lueur a paru du c?t�� de Mauruse o�� s'est ��coul��e mon enfance.
Pollux, Castor et Mustapha se regard��rent sans fr��mir.
-- Que Dieu prot��ge le Fils de la Condamn��e, murmura le choeur des belles natures.
Et tous se serr��rent la main d'une fa?on particuli��re.
Mandina, contenant son ��motion, prit une pose plus saisissante.
-- Ces voitures gigantesques, poursuivit-elle en montrant le v��hicule, de MM. Lesage et Cie, sont propres �� cacher tous les forfaits.
-- Contient-elle des animaux dangereux? demanda vivement Mustapha.
S'il n'avait pas d'��p��e, �� cause de son m��tier civil, n��anmoins il ��tait digne d'en porter une. Mandina eut un sourire amer.
-- Je ne sais, r��pondit-elle, je ne fais pas allusion au dedans, mais au dehors; sur le trottoir qui vous fait face, et �� l'abri de cette volumineuse machine, j'ai vu r��unis: Carapace, l'homme �� l'��lixir funeste; Arbre-��-Couche, le secr��taire du duc et Boulet- Rouge, l'assassin du cent-garde!
Castor, le r��mouleur, grin?a aussit?t les dents. Ce n'est pas ��tonnant, le cent-garde ��tait son propri��taire.
Mustapha mesurait d��j�� de l'oeil la voiture de vidange. Il ��tait dans son caract��re de la franchir, au lieu d'en faire le tour.
-- Boulet-Rouge, ajouta Mandina, a sous sa chemise le cercueil de l'enfant!...
Un cri d'horreur s'��leva de toutes les poitrines.
Les vidangeurs, cependant, achevaient leur besogne. On avait vid�� et purifi�� la modeste fosse d'aisance de la Maison du Repris de justice, dont le rez-de-chauss��e ��tait occup�� par deux industriels brevet��s: un marchand de cirage inoffensif pour la chaussure et un commer?ant en colle de poisson.
Pollux, Castor, Mandina et Mustapha se rapproch��rent les uns des autres si ��troitement que leurs haleines se confondirent.
Elles n'��taient pas toutes agr��ables.
Mandina parlant d'une voix creuse et avec des inflexions ��tranges disait:
-- L'amadou �� l'usage des fumeurs est une des plus r��centes inventions de ce si��cle qui marche d'un pas s?r vers le progr��s mat��riel. Il a produit le t��l��graphe ��lectrique et la photographie, sans parler d'autres merveilles qu'il serait trop long d'��num��rer dans des circonstances aussi graves. Plus r��cemment encore, il a produit, toujours pour l'usage des fumeurs, ce petit briquet ��tonnant avec lequel on parvient �� enflammer les allumettes de la r��gie. J'en poss��de un. Il suffirait de se glisser jusqu'�� cette voiture ��norme, de pr��senter avec adresse �� l'ouverture du robinet d'arriv��e une allumette pr��alablement enflamm��e... L'esprit s'��tonne de ce qui arriverait!
Les compagnons de Mandina ��prouv��rent un malaise, except�� Mustapha dont l'esprit r��solu et subtil ��tait fait pour comprendre les avantages incalculables de cette combinaison.
-- Je l'oserai! pronon?a-t-il avec un geste intraduisible. Si ma m��re me voit du haut des cieux, elle appr��ciera les motifs de cette d��marche. C'est le seul moyen honn��te que nous ayons pour d��barrasser l'Europe civilis��e de ces trois Pieuvres males.
Mandina, pour cette bonne r��ponse, lui confia aussit?t sa main �� baiser. Castor et Pollux approuv��rent la r��solution de Mustapha. Celui-ci, pale d'��motion, mais gardant aux pommettes cette tache rouge qui indique la phtisie galopante, re?ut de mademoiselle de Hachecor, le briquet r��cemment invent��. Muni de cette arme incendiaire, il se coula comme un tigre vers la voiture de vidange.
Les employ��s allaient justement fermer les robinets. Une minute de plus et l'entreprise ��tait manqu��e.
Messa, Sali et Lina avaient fini de parler affaire; ils se pr��paraient �� partir en fredonnant des chants patriotiques.
Mustapha ��tait beau �� voir au moment o�� par des prodiges de patience, il r��ussissait �� enflammer une r��calcitrante allumette de l'imp?t. Aucun signe de crainte ne se manifestait en lui, sinon un tremblement g��n��ral et bien
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