La corde au cou | Page 3

Emile Gaboriau
et pour Juv��nal, pour Horace surtout, un culte que trahissaient d'incessantes citations.
R��veill�� en sursaut comme tout le monde, ce digne et galant homme se d��p��chait de s'habiller pour courir aux renseignements, lorsque sa vieille gouvernante, tout effar��e, vint lui annoncer la visite de M. S��neschal.
--Qu'il entre! s'��cria-t-il, qu'il entre! Et d��s que le maire parut:
--Car vous allez m'apprendre, continua-t-il, pourquoi tout ce tumulte, ces cris et ces roulements de tambour. _Clamor que virum, clangorque tubarum_.
--Un ��pouvantable malheur arrive, pronon?a M. S��neschal.
Tel ��tait son accent, qu'on e?t jur�� que c'��tait lui qui ��tait atteint. Et ce fut si bien l'impression de M. Daubigeon que tout aussit?t:
--Qu'est-ce, mon cher ami? fit-il. _Quid? _Du courage, morbleu! du sang-froid!... Souvenez-vous que le po��te conseille de garder dans l'adversit�� une ame toujours ��gale: _?quam, memento, rebus in arduis, Servare mentem..._
--Des malfaiteurs ont mis le feu au Valpinson! l'interrompit le maire.
--Que me dites-vous l��! grands dieux! _O Jupiter. Quod verbum audio..._
--Victime d'une lache tentative d'assassinat, le comte de Claudieuse se meurt peut-��tre en ce moment.
--Oh!...
--Le tambour que vous entendez r��unit les pompiers, que je vais envoyer combattre l'incendie, et si je me pr��sente chez vous �� cette heure, c'est officiellement, pour vous d��noncer le crime et demander bonne et prompte justice!
Il n'en fallait pas tant pour glacer toutes les citations sur les l��vres du procureur de la R��publique.
--Il suffit! dit-il vivement. Venez, nous allons prendre nos mesures pour que les coupables ne puissent ��chapper.
Lorsqu'ils arriv��rent dans la rue Nationale, elle ��tait plus anim��e qu'en plein midi, car Sauveterre est une de ces sous- pr��fectures o�� les distractions sont trop rares pour qu'on n'y saisisse pas avidement tout pr��texte d'��motion.
D��j�� les tristes ��v��nements ��taient connus et comment��s. On avait commenc�� par douter, mais on avait ��t�� s?r, lorsqu'on avait vu passer au grand galop le cabriolet du docteur Seignebos, escort�� d'un paysan �� cheval.
Les pompiers, de leur c?t��, n'avaient pas perdu leur temps.
D��s que le maire et M. Daubigeon furent signal��s sur la place du March��-Neuf, le capitaine Parenteau se pr��cipita �� leur rencontre, et portant militairement la main �� son casque:
--Mes hommes sont pr��ts, d��clara-t-il.
--Tous?
--Il n'en manque pas dix. Quand on a su qu'il s'agissait de porter secours au comte et �� la comtesse de Claudieuse, nom d'un tonnerre! vous comprenez que personne ne s'est fait tirer l'oreille.
--Alors, partez et faites diligence, commanda M. S��neschal. Nous vous rattraperons en route. Nous allons, de ce pas, monsieur Daubigeon et moi, prendre monsieur Galpin-Daveline, le juge d'instruction.
Ils n'eurent pas loin �� aller. Ce juge, pr��cis��ment, les cherchait par la ville depuis une demi-heure, il arrivait sur la place et venait de les apercevoir.
Vivant contraste du procureur de la R��publique, M. Galpin-Daveline ��tait bien l'homme de son ��tat, et m��me quelque chose de plus. Tout en lui, de la t��te aux pieds, depuis ses gu��tres de drap jusqu'�� ses favoris d'un blond risqu��, d��non?ait le magistrat. Il n'��tait pas grave, il ��tait l'incarnation de la gravit��. Nul, bien qu'il f?t jeune encore, ne se pouvait flatter de l'avoir vu sourire ni entendu plaisanter. Et, telle ��tait sa roideur, qu'au dire de M. Daubigeon, on l'e?t cru empal�� par le glaive m��me de la loi.
�� Sauveterre, M. Galpin-Daveline avait la r��putation d'un homme sup��rieur. Il pensait l'��tre. Aussi s'indignait-il d'op��rer sur un th��atre trop ��troit et de d��penser les grandes facult��s dont il se croyait dou�� �� des besognes vulgaires, �� rechercher les auteurs d'un vol de fagots ou de l'effraction d'un poulailler. C'est que ses d��marches d��sesp��r��es pour obtenir un poste en ��vidence avaient toujours ��chou��. Vainement, il avait mis tous ses amis en campagne. Inutilement, il s'��tait, en secret, m��l�� de politique, dispos�� �� servir le parti, quel qu'il f?t, qui le servirait le mieux.
Mais l'ambition de M. Galpin-Daveline n'��tait pas de celles qui se d��couragent, et en ces derniers temps, �� la suite d'un voyage �� Paris, il avait donn�� �� entendre qu'un brillant mariage ne tarderait pas �� lui assurer les protections qui, jusqu'alors, avaient manqu�� �� ses m��rites.
Lorsqu'il rejoignit M. S��neschal et M. Daubigeon:
--Eh bien! commen?a-t-il, voici une terrible affaire, et qui va certainement avoir un immense retentissement.
Le maire voulait lui donner des d��tails.
--Inutile, lui dit-il. Tout ce que vous savez, je le sais. J'ai rencontr�� et interrog�� le paysan qui vous avait ��t�� exp��di��. (Puis, se retournant vers le procureur de la R��publique:) Je pense, monsieur, poursuivit-il, que notre devoir est de nous transporter imm��diatement sur le th��atre du crime.
--J'allais vous le proposer, r��pondit M. Daubigeon.
--Il faudrait avertir la gendarmerie...
--Monsieur S��neschal vient de la faire pr��venir. L'agitation du juge d'instruction ��tait grande, si grande qu'elle faisait en quelque sorte ��clater son ��corce d'impassible froideur.
--Il y a flagrant d��lit, reprit-il.
--��videmment.
--De telle sorte que nous pouvons agir de concert, et parall��lement, chacun selon notre fonction, vous requ��rant, moi statuant sur vos r��quisitions...
Un ironique sourire glissait sur
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