causés, s'imagina que Molière l'avait pris pour l'original de son Cocu imaginaire. Ce Bourgeois crut devoir en être offencé; il en marqua son ressentiment à un de ses amis. ?Comment!? lui dit-t-il, ?un petit Comédien aura l'audace de mettre impunément sur le Théatre un homme de ma sorte?? (Car le Bourgeois s'imagine être beaucoup plus au-dessus du Comédien, que le Courtisan ne croit être élevé au-dessus de lui.) ?Je m'en plaindrai,? ajouta-t-il: ?en bonne police on doit réprimer l'insolence de ces gens-là: ce sont les pestes d'une Ville; ils observent tout pour le tourner en ridicule.? L'ami, qui étoit homme de bon sens, et bien informé, lui dit: ?Eh! Monsieur, si Molière a eu intention sur vous, en fesant le Cocu imaginaire, de quoi vous plaignez-vous? Il vous a pris du beau c?té; et vous seriez bien heureux d'en être quitte pour l'imagination.? Le Bourgeois, quoique peu satisfait de la réponse de son ami, ne laissa pas d'y faire quelque réflexion, et ne retourna plus au Cocu imaginaire.
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Molière ne fut pas heureux dans la seconde Pièce nouvelle qu'il fit paro?tre à Paris le 4 Février 1661. Dom-Garcie de Navarre, ou le Prince jaloux, n'eut point de succès. Molière sentit, comme le Public, le foible de sa Pièce. Aussi ne la fit-il pas imprimer; et on ne l'a ajoutée à ses Ouvrages qu'après sa mort.
Ce peu de réussite releva ses ennemis; ils espéroient qu'il tomberoit de lui-même, et que comme presque tous les Auteurs comiques, il seroit bien-t?t épuisé. Mais il n'en connut que mieux le go?t du tems: il s'y acommoda entièrement dans l'école des Maris, qu'il donna le 24 Juin 1661. Cette Pièce qui est une de ses meilleures, confirma le Public dans la bonne opinion qu'il avoit con?ue de cet excellent Auteur. On ne douta plus que Molière ne f?t entièrement ma?tre du Théatre dans le genre qu'il avoit choisi. Ses envieux ne purent pourtant s'empêcher de parler mal de son Ouvrage. Je ne vois pas, disoit un Auteur Contemporain, qui ne réussissoit point, où est le mérite de l'avoir fait: ce sont les Adelphes de Térence; il est aisé de travailler en y mettant si peu du sien, et c'est se donner de la réputation à peu de frais. On n'écoutoit point les personnes qui parloient de la sorte; et Molière eut lieu d'être satisfait du Public, qui aplaudit fort à sa Pièce; c'est aussi une de celles que l'on verroit encore représenter aujourd'hui avec le plus de plaisir, si elle étoit jouée avec autant de feu et de délicatesse qu'elle l'étoit du tems de l'Auteur.
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Les Facheux, qui parurent à la Cour au mois d'Ao?t 1661, et à Paris le 4 du mois de Novembre suivant, achevèrent de donner à Molière la supériorité sur tous ceux de son tems qui travailloient pour le Théatre comique. La diversité de caractères dont cette Pièce est remplie, et la nature que l'on y voyoit peinte avec des traits si vifs, enlevoient tous les aplaudissements du Public. On avoua que Molière avoit trouvé la belle Comédie: il la rendoit divertissante et utile. Cependant l'homme de Cour, comme l'homme de Ville, qui croyoit voir le ridicule de son caractère sur le Théatre de Molière, ataquoit l'Auteur de tous c?tés. Il outre tout, disoit-t-on; il est inégal dans ses peintures; il dénoue mal. Toutes les dissertations malines que l'on fesoit sur ses Pièces, n'en empêchoient pourtant point le succès; et le Public étoit toujours de son c?té.
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On lit dans la Préface, qui est à la tête des Pièces de Molière, qu'elles n'avoient pas d'égales beautés, parce, dit-on, qu'il étoit obligé d'assujettir son génie à des Sujets qu'on lui prescrivoit, et de travailler avec une très-grande précipitation. Mais je sai par de très-bons mémoires qu'on ne lui a jamais donné de sujets. Il en avoit un magazin d'ébauchez par la quantité de petites farces qu'il avoit hazardées dans les Provinces; et la Cour et la Ville lui présentoient tous les jours des originaux de tant de fa?ons, qu'il ne pouvoit s'empêcher de travailler de lui-même sur ceux qui frapoient le plus. Et quoiqu'il dise dans sa Préface des Facheux, qu'il ait fait cette Pièce en quinze jours de tems, j'ai cependant de la peine à le croire; c'étoit l'homme du monde qui travailloit avec le plus de difficulté; et il s'est trouvé que des divertissements qu'on lui demandoit, étoient faits plus d'un an auparavant.
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On voit dans les remarques de Mr Ménage que ?dans la Comédie des Facheux, qui est,? dit-t-il, ?une des plus belles de Mr de Molière, le Facheux chasseur qu'il introduit sur la Scène, est Mr de S**: que ce fut le Roi qui lui donna ce sujet, en sortant de la première représentation de cette
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